Attentats de Bruxelles : Osama Krayem sera-t-il jugé à Bruxelles?

“La défense d’Osama Krayem, également inculpé dans l’enquête sur les attentats à Paris, demande à la chambre des mises de faire application du principe “non bis in idem”, qui veut qu’une personne ne peut pas être jugée deux fois”, a expliqué Me Hamid El Abouti, avocat de la partie civile dans le dossier des attentats à Bruxelles, lundi, à l’issue de sa plaidoirie devant la chambre des mises en accusation. “Ce qui saute directement aux yeux, c’est qu’avant d’être jugé deux fois, il faut être jugé une fois, donc tant qu’il n’y a pas de décision de la cour d’assises de Paris, coulée en force de chose jugée, c’est-à-dire définitive et plus susceptible d’un recours, je vois mal comment on peut invoquer un ‘non bis in idem'”, a-t-il affirmé.

“Ensuite, la jurisprudence européenne dispose que pour faire application de ce principe, il faut que les faits aient eu lieu dans le même État, ce qui n’est pas le cas ici. C’est donc le deuxième argument que l’on a fait valoir contre monsieur Krayem en tant que partie civile. Et enfin, les périodes infractionnelles sont différentes”, a insisté le pénaliste.

“Ce qu’essaie de dire la défense de monsieur Krayem, c’est qu’il s’agit de la même intention, du même projet terroriste, mais ça ne tient pas du tout la route. Elle essaie aussi de faire poser une question préjudicielle à la Cour Constitutionnelle. En fait, la défense tente d’utiliser la procédure pour que le procès n’ait pas lieu ou tarde à avoir lieu”, a encore commenté Me El Abouti.

La chambre des mises en accusation de Bruxelles examine, dès ce lundi, à huis clos, le dossier relatif à l’enquête sur les attentats à Bruxelles du 22 mars 2016. Elle validera ou réformera la décision de la chambre du conseil rendue en janvier dernier, qui avait prononcé le non-lieu pour trois inculpés et le renvoi aux assises des dix autres.

Le cas des frères Farisi

“Les plaidoiries des parties civiles étaient centrées sur deux ressentiments, puisés, à mon avis, dans une méconnaissance du dossier”, a déclaré Me Sébastien Courtoy, conseil de Smail Farisi, lundi, en sortant de l’audience devant la chambre des mises en accusation de Bruxelles. Celle-ci examine le dossier des attentats du 22 mars 2016 sur le sol belge, en vue de décider du renvoi des inculpés devant le juge du fond. “Elles se demandent, premièrement, comment cela se fait que les frères Farisi soient libres, et deuxièmement, comment cela se fait que le procureur demande qu’ils soient renvoyés en correctionnelle et pas aux assises”, a expliqué Me Courtoy.

“Certaines parties civiles se demandent comment c’est possible que les frères Farisi prennent place dans la salle d’audience, totalement libres, avec leur bouteille de Fanta. Évidemment que pour les gens qui ne connaissent pas cette affaire, qui n’étaient pas présents lors de l’instruction et lors de débats sur la détention préventive, c’est étonnant”, a déclaré Me Courtoy.
“Pour des victimes, quand on leur dit que ces deux mecs ont participé aux attentats, que d’une part on les libère et que d’autre part on dit qu’ils peuvent aller en correctionnelle, là où on poursuit les voleurs de bagnoles et les mecs qui ont sonné aux portes, c’est difficile. Mais s’ils ont été libérés, c’est parce qu’on s’est rendu compte qu’ils ne sont pas liés à cette affaire. Et si le parquet fédéral demande leur renvoi en correctionnelle, c’est parce qu’il sait qu’il y a un grand risque d’acquittement. C’est une tentative piteuse du parquet fédéral qui, au lieu de dire ‘on s’est trompé, on demande le non-lieu’, de les exfiltrer vers le tribunal en disant qu’il y a des circonstances atténuantes. La vérité, c’est qu’ils sont innocents. Mon client a prêté son appartement en méconnaissance de cause. Mais ça le parquet ne peut pas le dire”, a argumenté l’avocat.

Smail et Ibrahim Farisi sont suspectés d’avoir prêté leur appartement de la rue des Casernes à Khalid El Bakraoui, l’un des kamikazes des attentats. Ils auraient aussi nettoyé et vidé le logement juste après les faits.

Le parquet fédéral demande que huit inculpés – Salah Abdeslam, Oussama Atar (qui serait décédé en Syrie), Mohamed Abrini, Sofien Ayari, Osama Krayem, Ali El Haddad Asufi, Bilal El Makhoukhi et Hervé Bayingana Muhirwa – soient renvoyés aux assises. Et il demande que les frères Smail et Ibrahim Farisi soient, eux, renvoyés en correctionnelle.

La chambre des mises en accusation tranchera. En première instance, en janvier dernier, la chambre du conseil avait fait le choix de renvoyer ces dix inculpés tous aux assises.

Avec Belga

 

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21 juin 2021 - 13h57
Modifié le 21 juin 2021 - 18h23