Affaire Ihsane Haouach : la Sûreté de l’Etat a attendu un mois avant de transmettre sa note

La Sûreté de l’Etat a attendu un mois avant de communiquer son rapport sur Ihsane Haouach, selon une enquête du comité R (Comité permanent de contrôle des services de renseignement et de sécurité), dont BX1 a pu prendre connaissance, “sur la manière dont la Sûreté de l’État a assuré le suivi de la commissaire du gouvernement Ihsane Haouach.” 

L’enquête confirme également que la note produite par la Sûreté de l’Etat ne résultait pas d’une demande du gouvernement mais bien d’une initiative des services de renseignement.

Pour rappel, c’est le 17 mai dernier qu’Ihsane Haouach avait été nommée commissaire du gouvernement auprès de l’Institut pour l’égalité entre les femmes et les hommes (IEFH). Cette désignation a fait l’objet d’une vive polémique, et a été émaillée de multiples incidents, jusqu’à ce que moins d’un mois plus tard, l’intéressée jette l’éponge et démissionne. Dans la foulée de sa démission, la presse révélait l’existence d’une note de la Sûreté de l’Etat.

Une note finalisée le 3 juin

Bien qu’une note écrite ait été préparée et finalisée le 3 juin, il est décidé, dans les jours qui suivent, de ne pas envoyer cette note. À la VSSE (Sûreté de l’Etat, NDLR), l’on a conscience que la note est politiquement sensible, incomplète, et qu’il faut éviter une fuite. La décision est prise d’informer oralement le ministre de la Justice, mais l’entretien n’aura pas lieu.”, révèle le Comité dans son enquête.

L’enquête indique encore que la note a été “retenue” plus d’un mois, dans le but d’en vérifier certains éléments mais aussi parce que la Sûreté “ne souhaitait pas être instrumentalisée.” A cet égard, le rapport d’enquête précise qu’au lendemain de la parution dans le journal Le Soir (le 3 juillet) d’une interview d’Ihsane Haouach dont les propos ont suscité une nouvelle polémique, “vu les différents devoirs déjà réalisés, la VSSE entend, le 6 juillet 2021, clarifier les données en sa possession. Une instruction en ce sens est donnée en interne. Finalement, elle sera envoyée le 12 juillet au Premier ministre Alexander De Croo, aux Vices-Premiers et à la ministre de l’Intérieur, sans avoir été modifiée.” Dans ses conclusions, le comité R juge que la note respectait le principe de précaution.

La démission d’Ihsane Haouach, annoncée le 8 juillet, est-elle liée à l’existence de la note à la Sûreté? Le Comité R pose la question mais ne se prononce pas sur un éventuel lien causal entre les deux. Il évoque également une rencontre entre la Sûreté et Ihsane Haouach à l’initiative de cette dernière, le 2 septembre, sans donner davantage de détails. Selon nos informations, à cette occasion Ihsane Haouach a demandé aux enquêteurs d’étayer leurs informations, ce qu’ils se sont engagés à faire.

Démission d’Ihsane Haouach: aucun lien avec la note de la Sûreté de l’État

Faut-il procéder à un screening systématique pour les missions revêtant un caractère public?, interroge le Comité R dans sa conclusion. Réponse : au politique de trancher. Le nom d’une personne assumant des fonctions publiques peut apparaît dans une note de la Sûreté, pour autant “la VSSE n’est pas demandeuse d’émettre systématiquement un avis dans ce contexte. Il s’agit d’une décision qui, le cas échéant, doit être prise au niveau politique.” En gardant à l’esprit le risque d’instrumentalisation, quand le sujet est politiquement sensible, conclut le rapport.

Georges Dallemagne : “un délai incompréhensible

Au sein de la commission en charge du dossier, on retrouve notamment le député fédéral Georges Dallemagne (cdH).

Ce dernier estime qu’il s’agit d'”un délai incompréhensible : la Sûreté a voulu bien faire par rapport à une confirmation par le premier ministre du soutien à Mme Haouach, et n’a pas voulu interférer dans cette décision politique. Je me souviens q’il avait été dit que la Sûreté avait interféré négativement envers Ihsane Haouach, mais c’est l’inverse qui s’est passé : la Sûreté n’a pas voulu fragiliser le gouvernement dans la décision qui avait été prise“.

 

S.R.