200 mesures pour une Belgique plus durable après la crise du coronavirus
Il s’appelle SOPHIA. C’est “un plan de transition pour la Belgique”. Son but : proposer une relance durable post-covid-19 de notre pays. Il a été développé par le Résilience Management Group (RMG), composé de scientifiques et d’entrepreneurs engagés dans la transition écologique. Il est désormais à la disposition des autorités fédérales et régionales.
“La crise économique que nous subissons n’en est qu’à ses début“, prévient le RMG en préambule. Alors une centaines de scientifiques et 182 entrepreneurs de la coalition KAYA – qui rassemble des entreprises de la transition écologique, ont planché pour tenter de tirer les leçons de la situation que nous traversons, partant de l’idée que “la résilience de l’économie est aussi importante que sa productivité et sa compétitivité” et “qu’une transition écologique et sociale permettra d’éviter ou d’atténuer les effets des crises futures.”, Résultat : 200 mesures, destinées à construire “une Belgique solidaire, prospère, résiliente et durable“.
Membre du groupe de réflexion, le climatologue Jean-pascal Van Ypersele, explique que tout comme il faut aplatir la courbe épidémique, il est indispensable d’aplatir la courbe du réchauffement climatique. “La grande différence entre la crise du Covid et la crise climatique, c’est qu’il n’y aura pas de vaccin pour le climat.” Et d’insister sur la nécessité de créer des synergies entre la protection du climat et la relance économique.”La transition énergétique va de pair avec une économie durable.”
Economie, urbanisme, mobilité, santé… : 15 thèmes, 200 mesures
Le plan propose une série de principes généraux, dont certains déjà connus – le soutien aux entreprises engagées dans la transition, la création emplois durables … – et une batterie de propositions : 200 mesures concrètes, réparties en 15 thèmes, comme l’aide aux entreprises, l’aménagement du territoire, l’alimentation, la mobilité, la fiscalité (avec l’idée de l’introduction d’une taxe carbone accompagnée,ée socialement), ou bien sûr la santé.
Prenons les aides aux entreprises. Le plan propose que les pouvoirs publics privilégient “la transition juste en préservant les activités essentielles, la minimisation du chômage et des inégalités.” Concrètement le RMG plaide, entre autres, pour le transfert de l’essentiel des aides vers les activités économiques soutenables dans les secteurs considérés comme prioritaires (énergie, mobilité, agro-alimentation, bâtiment, …); pour un soutien et une attention particulière aux indépendants et PME ou encore la suppression progressive “endéans les 5 ans de toutes les aides économiques aux entreprises pour des activités non soutenables (…) afin de les orienter vers la soutenabilité.” “L’idée est d’envoyer un signal en faveur d’une prise en compte beaucoup plus grande des questions environnementales dans les politiques d’aides économiques.”, explique Marek Hudon, professeur à la Solvay Brussels school et membre du RMG. “Cette crise montre également la nécessité de penser non seulement en terme de transition mais aussi de résilience, c’est-à-dire de capacité à rebondir. D’où l’importance d’aider et de favoriser l’économie réelle, locale, des entreprises qui proposent des emplois non délocalisables et axées sur les circuits-courts. ”
Densifier tout en donnant de la place à la nature
Au chapitre aménagement du territoire, les experts recommandent d’appliquer en la matière les principes de l’économie circulaire, autrement dit favoriser le recours aux matériaux durables et recyclés, et un usage raisonné des sols; et préférer le “recyclage des nombreuses friches urbaines“, plutôt que l’éparpillement urbain, tout en arrêtant la destruction de la nature. Exemple ? “Bruxelles doit être densifiée“, nous répond Leo Van Broeck, architecte, bouwmeester flamand et co-auteur du chapitre, “mais il faut prévoir dans les projets de logement, des espaces verts ainsi que des lieux de nature non accessibles pour créer de la biodiversité.” Le plan propose encore un moratoire sur les infrastructures lourdes qui augmentent la dépendance à l’économie fossile (autoroutes, aéroports, zonings…), la réduction des îlots de chaleur et des surfaces bétonnées ou la rénovation en profondeur du parc de logements dans un sens durable. “L’idée de ce RMG c’est de considérer cette crise comme une une opportunité pour devenir moins fragiles et ainsi être mieux armés pour affronter les prochaines. “, conclut Léo Van Broeck.
Contacté, le porte-parole de Barbara Trachte (Ecolo), la secrétaire d’Etat à la Transition économique nous confirme que le cabinet a bien reçu le plan SOPHIA, sans avoir pu encore l’analyser en profondeur. “Les propositions sont intéressantes, il faudra faire ensuite le tri entre ce qui est applicable et ce qui ne l’est pas.” Une rencontre est prévue avec des représentants du RMG.
Sabine Ringelheim – Photo: Belga