Rue de la Loi : le pacte d’excellence est-il menacé par les négociations en cours ? (J+99)
900 000 élèves, 125 000 enseignants, ajoutez du personnel administratif, des chauffeurs de bus scolaire et près de 2 millions de parents : difficile de trouver un sujet plus concernant que la rentrée des classes. Si, à titre privé, vous vous affairez à découvrir votre nouvel enseignant ou vos nouveaux élèves, à trouver la liste des fournitures scolaires ou à mémoriser le nouvel emploi du temps, les politiques, eux, révisent les tenants et aboutissants du pacte d’excellence. L’équation est la suivante : comment maintenir le pacte dans ses grands principes (dans le cas contraire, les syndicats d’enseignants ou les pouvoirs organisateurs ne manqueront pas de s’agiter), tout en intégrant les accents des nouveaux partis de la future majorité (MR et, sous réserves, Ecolo, seront associés au PS, alors que le pacte est une réalisation PS-CDH et porte ka marque de Marie-Martine Schyns) sans mettre à mal des finances de la Fédération Wallonie-Bruxelles qui ne sont guère brillantes ?
En ce jour de rentrée, la ministre de l’enseignement (pour quelques jours encore) prend bien soin de dépolitiser son héritage : “Les pouvoirs organisateurs, les enseignants, les associations de parents ont rédigé ensemble ce pacte, qui court sur 10 ans. Celui qui voudra revoir ces équilibres devra discuter avec les acteurs. La garantie de ce pacte, ce sont les acteurs”, explique la ministre en sursis, avant de glisser “de là où je serais (comprenez les bancs de l’opposition), je suivrai très personnellement la mise en œuvre du pacte”.
La réaction défensive appelle donc les acteurs de l’enseignement à la mobilisation vigilante. C’est que le CDH ayant opté pour l’opposition ne sera plus en mesure de défendre cette grande réforme de l’enseignement. C’est notamment l’allongement du tronc commun jusqu’à la troisième secondaire qui est menacé par les déclarations du Mouvement Réformateur. « La réforme ne va pas régler le problème de l’accès au travail pour de nombreux jeunes », répétait encore ce lundi matin Françoise Schepmans. La députée bruxelloise se montrait dubitative sur les bienfaits d’une orientation reportée à 15 ans (au lieu de 14), estimant qu’il aurait mieux valu investir massivement dans l’enseignement professionnel et technique : « Aujourd’hui, on a l’impression que ce sont des filières de relégation ». Les libéraux défendent donc une conception qui va à l’opposé de ce point précis (mais central) du pacte d’excellence. Comme pour le décret inscription, ils auront à cœur d’en obtenir une renégociation, et les deux points font bien partie des « nœuds qui restent encore à trancher » dans les négociations en cours.
Comment se comporteront le PS et Ecolo sur ce dossier ? À ce stade, ils ont la clef de la défense du pacte. Françoise Schepmans, prudente, préférait ne pas faire de la suppression de l’allongement du tronc commun une exigence libérale. Position prudente pour ne pas cabrer les discussions en cours. Il est vrai que l’allongement du tronc commun n’interviendra réellement qu’en 2028 (les reformes du pacte d’excellence commenceront par la maternelle l’an prochain et progresseront d’année en année). Cela laisse le temps de venir. Le temps aussi d’organiser une évaluation, qui permettrait de ne pas trancher tout de suite et de permettre à tous les acteurs de s’en sortir la tête haute.