Rue de la Loi : en attendant Bart (J+22)

Occuper le terrain mais pas trop. Laisser les options ouvertes. Envoyer des messages, via presse interposée. Attendre que ça se débloque.  Trois semaines après les élections la plupart des négociateurs sont en suspension. Et ils attendent que ça retombe.

A l’exception de la Communauté Germanophone et la Région Bruxelloise, les autres niveaux de pouvoirs attendent encore de voir la couleur de leur coalition. Tous les regards cette semaine vont se fixer sur Bart De Wever. Le président de la N-VA, candidat auto-proclamé à la ministre-présidence flamande entame sont troisième tour de consultation. Le Vlaams Belang est toujours dans le jeu et le formateur flamand ne l’a toujours pas écarté à ce stade, même si le chef de groupe N-VA au parlement flamand Peter De Roover a marqué sa préférence pour une coalition majoritaire. Bref, le minoritaire on en parle partout.. sans que l’on sache s’il s’agit d’une option sérieuse ou juste d’un épouvantail destiné à faire pression sur les autres partenaires possibles. Bart De Wever lancera-t-il de véritables négociations avant la fin de la semaine ? Les autres partis l’espèrent, car en attendant on fait du surplace.

Ce lundi après-midi, les deux informateurs du niveau fédéral, Johan Vande Lanotte et Didier Reynders feront un nouveau rapport au roi. Mais sauf surprise, rien n’a bougé ces derniers jours : le PS n’envisage pas de gouverner avec la N-VA, l’inverse est également vrai et les autres partis flamands ne sont pas prêts à monter dans une coalition fédérale qui serait minoritaire dans leur rôle linguistique. Bref, c’est coincé et toute l’agitation de jeudi autour de la vraie-fausse ouverture d’Elio Di Rupo tient du tango : c’est quand on croit faire deux pas en avant que l’on finit par en faire trois en arrière. Le choix de Bart De Wever aura donc des répercussions directes sur ce qui sera envisageable au fédéral. Avec le Vlaams Belang ou sans ?  Une coalition de droite avec le CD&V et l’Open VLD ? Ou à l’anversoise avec le SPA ? Aucune de ces options ne sera sans conséquences.

En Wallonie aussi, on cherche toujours aussi une  majorité. Après la formule « portugaise » voici le « coquelicot » proposé par Ecolo. En réalité c’est la même chose, mais avec un autre nom et une ouverture à des ministres issus de la société civile. Mais l’essentiel est bien dans la proximité des deux idées : Ecolo vient de signifier par la voix de Jean-Marc Nollet qu’il était prêt à poursuivre dans le scénario envisagé par le PS : celui d’une coalition wallonne minoritaire qui pourrait être installée grâce à des soutiens extérieurs. Si on peut toujours espérer l’une ou l’autre abstention ou absence diplomatique pour faire passer l’un ou l’autre décret, le problème vient de l’investiture de ce gouvernement. Les ministres régionaux étant désignés par un vote de leur parlement (et non par une nomination royale comme leurs collègues du fédéral) la loi spéciale prévoit une majorité absolue des membres du parlement concerné (les membres, c’est différents des membres présents) : il faut donc un minimum de 38 voix pour… PS et Ecolo en ont 35, il faut donc aller chercher au moins 3 votes positifs du coté du PTB ou du CDH… La prochaine réunion entre Elio Di Rupo et Paul Magnette et leurs interlocuteurs écologistes est annoncée pour mercredi matin. On verra d’ici là si le modèle du coquelicot lusitanien progresse.  Et on ne doute pas que l’expression de chaque mandataire CDH ou PTB est soigneusement analysée. Pour les Wallons aussi si Bart De Wever peut faire diversion et capter l’attention des médias cela permettrait de trouver le temps moins long et d’envisager un coup d’accélérateur… car à ce stade, les chances d’avoir un gouvernement installé à Namur pour le 21 juillet semblent se réduire (d’où l’idée que le coquelicot peut refleurir en septembre).

Même les négociations bruxelloises sont dans cette phase de tempo adagio (un peu plus soutenu que le lento ou le largo, mais moins rapide que l’andante ou le moderato). Ce lundi, un groupe technique doit être mis en place pour discuter des perspectives budgétaires puis des perspectives d’investissement de la STIB. Officiellement, les chefs de délégation n’y participent pas, laissant la place à leur proche conseiller (les fameux « sherpas »).  Officieusement, on noue des contacts mais on attend que ça se débloque ailleurs avant d’oser avancer à Bruxelles.