L’édito de Fabrice Grosfilley : le couple “contre-nature” peut-il entrer en réelle négociation ?

14 heures cet après-midi.
C’est le rendez-vous donné par David Leisterh pour la poursuite des négociations autour du budget en Région bruxelloise.
Le premier des rendez-vous, devrait-on précisément dire, puisque le formateur va reprendre sous forme de bilatérales. Les délégations seront donc reçues une à une.

Une hypothétique réunion plénière n’est pas exclue, mais pour l’instant elle n’est pas confirmée.
David Leisterh continue donc d’avancer à pas prudents dans cette négociation qui peine à passer à la vitesse supérieure, tant il semble craindre qu’une accélération trop brusque ne se traduise par une sortie de route qui pourrait être fatale à la négociation.

Hier, les négociateurs bruxellois ont reçu une forme de bon d’encouragement de la part de l’agence de notation Standard & Poor’s.
Cette agence américaine a décidé de maintenir sa recommandation concernant la dette bruxelloise : la note reste donc un A, avec perspective négative.
Il n’y a donc pas de nouvelle dégradation de la note, et la Région peut continuer d’emprunter aux mêmes taux.

Même si Sven Gatz, ministre du Budget en affaires courantes, a tenu à nuancer cette relative bonne nouvelle :  « Le voyant d’alerte sur le tableau de bord reste allumé, nous devons agir maintenant pour éviter le pire »,  a-t-il fait savoir, annonçant par ailleurs avoir reçu une lettre de la banque Belfius l’informant que celle-ci mettrait, en janvier prochain, un terme à l’une des lignes de crédit dont bénéficie la Région bruxelloise.

Une ligne de crédit, c’est l’équivalent d’une autorisation de découvert.
Ce n’est pas la première fois que les banques menacent de les supprimer, et dans les faits, elles sont assez peu utilisées.
Mais la réaction de Sven Gatz est assez symptomatique.

En fait, hier, chez certains négociateurs, on sentait presque une pointe de déception, comme s’ils avaient spéculé — ou même souhaité — une nouvelle dégradation de la part des agences de notation. Une décision qui aurait été une mauvaise nouvelle, certes, mais qui aurait permis d’ajouter un peu de pression et de justifier qu’on aille plus loin et plus vite dans les mesures d’économies.

Cette dégradation n’a donc pas eu lieu. Et en réalité, les décideurs politiques le savaient déjà ce week-end. Ce non-événement a pour effet de renvoyer dos à dos les tenants du remède de cheval et les partisans de l’assainissement en douceur.

Cela ne facilite pas le travail du formateur, c’est vrai.
Mais cela nous ramène aux fondamentaux de cette négociation qui n’en finit plus :
d’un côté, un bloc libéral qui voudrait obtenir une réduction substantielle des dépenses publiques ;
de l’autre, un bloc de centre gauche — PS, Groen, Vooruit — qui veut préserver l’essentiel des politiques mises en place précédemment.

C’est tout le problème de cette formation de gouvernement bruxellois : elle ne peut pas être dans la même tonalité que ce qui est mis en place au fédéral, avec le gouvernement Arizona, ou à la Fédération Wallonie-Bruxelles, avec la majorité MR–Engagés.

Il ne peut donc pas y avoir à Bruxelles une politique budgétaire de type « remède de cheval », parce qu’il n’y a pas de majorité pour la soutenir.

À l’inverse, la politique budgétaire ne plus peut non plus être un copier-coller de celle des dernières années. D’abord, parce qu’elle nous a conduits dans le mur, budgétairement parlant. Et aussi parce qu’il n’y a plus, là non plus, de majorité pour continuer comme avant.

Il faut donc trouver cet entre-deux, qui pourrait convenir à la fois au bloc de droite et au bloc de gauche.

C’est inconfortable pour tout le monde, parce qu’on se doute bien que le MR et l’Open VLD rêvent de pouvoir dire qu’ils ont mis cette région si mal gérée par le passé sur le droit chemin.
C’est inconfortable pour le PS, pour Groen, pour Vooruit, qui vont devoir décaler des programmes ou renoncer à des projets sur lesquels ils s’étaient engagés auprès de leurs électeurs. Cela nécessite des deux côtés d’accepter de changer de logiciel.

Mais ce qui serait plus inconfortable encore, ce serait qu’on ne soit pas capable de faire l’accord, et qu’on ne fasse pas l’effort de sortir de cet enlisement. Parce qu’on a beau retourner le Rubik’s Cube bruxellois dans tous les sens, si on patine depuis si longtemps, c’est finalement parce que le PS et le MR donnent le sentiment qu’ils n’ont pas vraiment envie de travailler ensemble. Le couple contre-nature, pour reprendre l’expression de Laurette Onkelinx, semble avoir bien du mal à se retrouver.

Et depuis quinze mois, on a le sentiment que tous les prétextes sont bons pour éviter d’entrer réellement en négociation.

Fabrice Grosfilley

BX1
Résumé de la politique de confidentialité

Ce site utilise des cookies afin que nous puissions vous fournir la meilleure expérience utilisateur possible. Les informations sur les cookies sont stockées dans votre navigateur et remplissent des fonctions telles que vous reconnaître lorsque vous revenez sur notre site Web et aider notre équipe à comprendre les sections du site que vous trouvez les plus intéressantes et utiles.

Plus d'informations sur nos mentions légales