L’édito de Fabrice Grosfilley : Budget, un premier pas

Un frémissement, une attente, et peut-être un tournant. Le coup d’envoi des négociations politiques cet après-midi en Région bruxelloise est un jalon important dans la crise qui paralyse les institutions depuis 15 mois. Ce moment, enfin porteur d’espoir, on le doit à David Leisterh, qui a lancé officiellement des invitations ce dimanche. Il ne s’agit pas de négocier un gouvernement, mais bien de travailler sur le budget.

Précision importante : les participants à cette négociation se sont mis d’accord sur l’idée de travailler sur un budget pluriannuel, et pas seulement sur le budget de l’an prochain. Ils ont aussi marqué leur accord sur un chiffre : réduire le déficit d’un milliard d’ici à la fin de la législature. Aujourd’hui, le déficit annuel de la Région tourne aux alentours d’1,5 milliard. Il devrait donc être réduit aux deux tiers, pour atteindre environ 500 millions en 2029.

Comment va-t-on y parvenir, et à quel rythme ? C’est tout l’objet de la négociation qui s’ouvre aujourd’hui. David Leisterh, dans sa communication, évoque « des mesures d’économies structurelles sur les dépenses courantes et d’investissement, en veillant à optimiser les recettes fiscales, mais sans impôt nouveau sur les ménages et le tissu économique bruxellois ». Ces mesures toucheront-elles les allocations familiales, les titres-services, la politique du logement ? Rognera-t-on sur les enveloppes accordées à la Stib ou à Bruxelles-Propreté ? Reportera-t-on une fois encore les travaux d’entretien dans les tunnels ? Renoncera-t-on, ou au moins décalera-t-on, le projet d’extension du métro ? Toutes ces questions sont sur la table.

Et si on ne parle pas d’impôt nouveau, on parle bien d’« optimisation » des recettes fiscales. Cela peut se traduire par la suppression de certaines niches fiscales, un meilleur enrôlement des taxes régionales, des variations de taux, ou encore une remise à plat de la fiscalité automobile, aujourd’hui très avantageuse pour les véhicules électriques. Or, ces véhicules vont progressivement devenir la norme, tandis que les moteurs thermiques sont appelés à disparaître.

L’objectif d’un milliard en 4 ans n’est pas inatteignable. Il permet d‘éviter le débat sur le retour à l’équilibre (dans 7 ans ?  Dans 10 ans ?) et se limiter à ce qui sera fait pendant cette législature. Il figurait déjà dans plusieurs notes ou propositions de trajectoire déposées auparavant. MR, PS et Engagés en avaient discuté en juillet 2024. Il avait aussi été évoqué lors de la mission menée par Elke Van den Brandt et Christophe De Beukelaer, ou encore, il y a un mois, quand Yvan Verougstraete avait lancé des consultations en tant que facilitateur. Qu’est-ce qui a changé depuis ces épisodes ?

D’abord, le découplage entre la négociation budgétaire et l’installation d’un gouvernement. Cette question-là est renvoyée à plus tard. Ensuite, l’attelage proposé. Alors qu’Yvan Verougstraete proposait de travailler avec le CD&V et que Frédéric De Gucht avait refusé de le suivre, c’est aujourd’hui l’inverse qui a été mis sur la table par David Leisterh. Le CD&V est exclu de la négociation, alors que Frédéric De Gucht accepte d’y participer. On ne dira pas qu’il a changé d’avis, mais qu’il a été sensible aux arrangements de David Leisterh, qui a proposé un budget pluriannuel et mis comme condition un objectif de réduction d’un milliard.

« Faire un budget, c’est faire un gouvernement », a-t-on souvent entendu ces derniers mois. C’est vrai que si la négociation aboutit, on risque de se retrouver dans une situation étonnante : un budget sur trois ans, une majorité pour le voter, et son application par un gouvernement en affaires courantes qui ne l’aura pas préparé, et qui compte en son sein des ministres dont les partis auront voté contre.

Si on a découplé les deux discussions, vous le savez, c’est parce que, pour former un gouvernement, il faut une double majorité dans les collèges francophone et néerlandophone du Parlement régional. Si la négociation budgétaire aboutit, plusieurs hypothèses s’ouvriront. Soit on relance alors une autre négociation pour former une majorité – on pourrait alors rappeler le CD&V, ce qui serait un peu étrange puisqu’on aurait pu déjà l’associer, soit on privilégie d’autres formules.

L’une d’elles serait de ne pas installer de gouvernement, mais de remplacer les ministres un par un. Dans ce cas, il ne faut pas de double majorité, mais seulement une majorité dans le collège linguistique concerné. On pourrait donc remplacer les ministres francophones, faire monter David Leisterh et Ahmed Laaouej, faire sortir Alain Maron et Bernard Clerfayt, et laisser en place les ministres néerlandophones, faute de majorité dans leur collège.

Une autre option serait de trouver cette fameuse majorité. Ensemble Groen, Vooruit et l’Open VLD comptent 8 voix : il en manque une. On pourrait chercher le soutien de Team Fouad Ahidar ou du CD&V. Pas le plus élégant, ni le plus sûr, quand on a choisi d’exclure ces partis. Il reste encore une dernière option : le ralliement d’une députée indépendante néerlandophone. Elle s’appelle Sonja Hoeylaert. Élue sur la liste du Vlaams Belang, elle a quitté le parti pour siéger comme indépendante. Un nouveau gouvernement pourrait-il s’installer grâce au soutien d’une élue d’extrême-droite, même si celle-ci a rompu avec son parti ? Ou ce soutien encombrant reviendrait-il à briser le cordon sanitaire ?

Nous ne sommes pas au bout des débats en Région bruxelloise.

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