Interdiction des organisations radicales : la Ligue des droits humains s’inquiète du projet
La Ligue des Droits Humains (LDH) a exprimé vendredi son inquiétude devant le projet de loi qui vise à interdire et dissoudre les organisations radicales et extrémistes. A ses yeux, ce texte s’inscrit dans une tendance croissante à la criminalisation de la société civile.
Dans ses dernières décisions avant la trêve estivale, le gouvernement a approuvé l’avant-projet de loi du ministre de l’Intérieur, Bernard Quintin (MR), qui permet à l’exécutif d’interdire et de dissoudre des organisations qui “représentent une menace grave et actuelle pour la collectivité en mettant en péril la sécurité nationale ou les fondements de l’Etat de droit”. Le ministre pourra solliciter des analyses des services de sécurité et disposera d’un droit d’initiative d’une telle procédure. Les décisions seront prises au conseil des ministres sur la base d’un rapport du Comité de coordination du renseignement et de la sécurité et du Conseil national de sécurité. Les organisations concernées pourront être entendues et consulter leur dossier. “Le droit d’association est un droit fondamental, garanti par la Constitution et des conventions internationales. Toute restriction doit être de stricte interprétation et limitée. Une organisation ne peut être dissoute et interdite que s’il n’existe pas d’autre mesure qui serait moins attentatoire aux libertés fondamentales. Nous craignons qu’un tel dispositif soit ou bien inutile, car il y a déjà des sanctions possibles dans le droit pénal: incitation à la haine, au terrorisme, association de malfaiteurs, etc. ou bien abusif. Or, ici, le filet risque de pêcher bien plus de poissons que nécessaire”, a expliqué la présidente de la Ligue, Sibylle Gioe.
La LDH épingle notamment le “pouvoir exorbitant” confié à l’exécutif sans passer par un juge et l’absence de garanties d’un procès équitable. Une simple note des services de renseignement permettrait d’enclencher la procédure sans que soit constitué un dossier complet à charge et à décharge. Les comportements susceptibles de mener à une dissolution semblent également très larges, notamment “l’infiltration de structures démocratiques” qui pourrait s’appliquer à tout type de lobbying en vue de changer une loi. “Le projet s’inscrit dans un contexte de criminalisation croissante et de musèlement de la société civile, comme on le voit dans des régimes autoritaires du genre de la Hongrie, ou dans des pays comme la France qui criminalise des mouvements antifascistes et les Soulèvements de la terre par exemple. La société civile est essentielle dans une société et l’on remarque en Belgique une tension de plus en plus en forte sur les droits politiques. On l’a vu avec la loi, finalement repoussée, sur l’interdiction de manifester et l’insertion d’une disposition du Code pénal réprimant l’atteinte méchante à l’autorité. On le voit aujourd’hui avec ce texte”, a averti Mme Gioe.
Belga





