L’édito de Fabrice Grosfilley : autant en emporte l’auvent

Dans son édito de ce vendredi 13 juin 2025, Fabrice Grosfilley revient sur la demande de sous de la Région bruxelloise à l’Europe pour les travaux au rond-point Schuman.

“C’est une véritable honte, une humiliation totale.”  Ce sont les mots employés hier par Bart De Wever pour qualifier — ou plutôt disqualifier — la démarche du gouvernement bruxellois dans le cadre du réaménagement du rond-point Schuman. En cause : une lettre que le gouvernement bruxellois a adressée aux institutions européennes pour leur demander de participer au financement de ce nouveau rond-point situé à deux pas de leurs bâtiments.

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“La Région bruxelloise qui va quémander de l’argent pour aménager une place. J’ai dû m’excuser”, tempêtait Bart De Wever dans plusieurs interviews accordées à la presse. Avant d’ajouter que, si dans le futur la Région bruxelloise devait s’adresser à l’échelon fédéral pour solliciter un soutien financier, il se comporterait “comme le Fonds Monétaire International à l’égard des “États défaillants” et imposerait, je cite, des conditions très claires”Un Premier ministre qui surjoue la colère et se montre menaçant : l’avertissement à la Région bruxelloise est sans ambiguïté.

Pour bien comprendre ce dossier, il faut se plonger dans le projet de réaménagement actuellement en cours. Si vous passez de temps à autre par le rond-point Schuman, vous savez qu’il est en travaux. Le projet retenu prévoit de revoir complètement ce rond-point en y intégrant une place piétonne, une sorte d’agora, au centre. Autour, une seule bande de circulation pour les voitures. Au-dessus de la place piétonne, est prévu un auvent de forme circulaire. À l’origine, le projet devait coûter 25 millions d’euros. Il y a eu des surcoûts. Thomas Dufrane, dans notre journal de 18 heures ce jeudi soir, évoquait une facture finale désormais proche des 42 millions.

Qui peut payer ce surcoût ? C’est là que ça coince. La Région bruxelloise, avec un gouvernement en affaires courantes, estime qu’elle ne peut rien faire. Beliris, le programme fédéral qui aide au financement de grands travaux en Région bruxelloise, a fait savoir qu’il n’aidera pas davantage. Du coup, les ministres bruxellois ont envoyé ce courrier aux institutions européennes. Faute de financement, c’est donc l’auvent au-dessus de la place qui risque d’être sacrifié. Pour certains, ce ne serait qu’un moindre mal, car cet auvent ne faisait pas l’unanimité. Pour d’autres, c’était le geste architectural qui allait donner tout son cachet au nouvel espace. Y renoncer, ce serait se priver d’un aménagement censé protéger les piétons des intempéries et offrir au quartier européen un nouveau bâtiment symbolique, remarquable et instagrammable.

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Au-delà de ces considérations esthétiques, revenons aux propos de Bart De Wever.  Un Premier ministre qui dit aux dirigeants des instances européennes de ne surtout pas répondre positivement à la demande des autorités bruxelloises, ce n’est pas vraiment ce qu’on pourrait appeler du fédéralisme de coopération.  Cet épisode donne du grain à moudre à certains politiques bruxellois qui reprochent à la N-VA d’aller systématiquement à l’encontre des  intérêts de la Région bruxelloise. Une posture qui s’est manifestée dans la diminution des subsides de Beliris, dans la fusion imposée des zones de police, et désormais dans ce qu’on appellera la querelle du rond-point Schuman.

Là, on peut en tirer deux conclusions. Soit on estime que c’est un argument de plus pour considérer que la N-VA doit à tout prix faire partie de la majorité bruxelloise, afin d’éviter que la situation ne dégénère davantage. Parce que sans relais N-VA auprès de Bart De Wever, on peut s’attendre à ce que le Premier ministre et la coalition flamande continuent de chercher des noises à la Région bruxelloise.  Soit on tire la conclusion inverse : il ne sert à rien de chercher à intégrer la N-VA, puisque le Premier ministre vient de nous administrer la preuve du peu d’estime qu’il a pour la Région bruxelloise et ses gouvernants. Quoi qu’il arrive, il sera toujours, vis-à-vis de la capitale, dans une logique d’affrontement et de domination.

Sauf à imaginer que la Région bruxelloise devienne demain un appendice du gouvernement flamand et que la N-VA y joue un rôle central, la condescendance et le mépris avec lesquels Bart De Wever parle de Bruxelles ne risquent pas de disparaître par enchantement.

Fabrice Grosfilley

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