Procès des attentats de Bruxelles : des victimes, des familles de victimes et le directeur d’un hôtel ont témoigné ce lundi

Procès attentats du 22 mars 2016 Bruxelles - Vue d'ensemble - Belga Jonathan De Cesare

Ce lundi, à la cour d’assises de Bruxelles, les proches de quatre victimes des attentats du 22 mars 2016, du métro de Maelbeek, sont entendus.

Les témoignages des proches de David Dixon, Sabrina Esmael Fazal, Léopold Hecht et Loubna Lafquiri vont défiler ce lundi devant la cour d’assises. C’est la compagne de David Dixon qui sera auditionnée en premier. Elle vivait avec son mari à Watermael-Boitsfort avec leur fils. Le 22 mars, David Dixon se trouvait à l’aéroport de Zaventem au moment où les deux bombes ont explosé. Il a quitté le site en prenant le métro, et plus précisément, il s’est installé dans une rame où se trouvait Khalid El Bakraoui. Ce dernier a actionné la bombe au niveau de la station Maelbeek.

Puis, les proches de Sabrina Esmael Fazal témoigneront. La jeune mère de 24 ans vivait à Wavre avec son fils et son compagnon. Elle se rendait à la Haute École Galilée lorsqu’elle a perdu la vie à Maelbeek.

Dans l’après-midi, les témoignages des proches de Léopold Hecht, étudiant de 20 ans qui a succombé à ses blessures la nuit du 22 au 23 mars, suivront. Ainsi que ceux des proches de Loubna Lafquiri. Elle était âgée de 34 ans, mère de trois enfants et professeure de gymnastique à Schaerbeek. Elle se rendait au travail lorsque les bombes ont explosé à la station de métro.

Rappel des faits, profil des inculpés, témoignages des victimes : notre dossier sur le procès des attentats de Bruxelles


12h26 : “La bombe à Maelbeek a détruit un wagon mais aussi nos vies”, confie une victime

La veuve d’une victime de l’explosion dans la station de métro Maelbeek est venue témoigner lundi . Charlotte Sutcliffe a dressé un portrait plein d’amour pour son ex-mari, David Dixon, et pour l’enfant, Henry, qu’elle et lui ont eu ensemble, avant d’évoquer l’impact de ces attaques: “La bombe à Maelbeek a détruit un wagon mais aussi nos vies“, a-t-elle regretté.

David Dixon a pris le train puis le métro pour se rendre sur son lieu de travail. Durant son déplacement, il rassure sa tante, inquiète, qui lui avait envoyé un SMS après avoir entendu parler des explosions à l’aéroport. Il a un même échange de messages avec sa femme vers 8h45. Ce sera leur dernière communication.

Quelques minutes plus tard, l’homme, qui se trouvait juste à côté du kamikaze dans le métro, décède dans la déflagration. Il faudra cependant plusieurs jours pour avoir la certitude que le Britannique fait bien partie des victimes. Durant ce laps de temps, Henry, alors âgé de 7 ans, est accueilli chez des amis afin d’être “protégé” des mauvaises nouvelles.

Quand la maman finit par récupérer son fils, elle le ramène à leur maison. “Je lui ai alors annoncé la nouvelle et j’ai véritablement détruit son monde“, se souvient, avec douleur, Charlotte Sutcliffe.

Dans la suite de son témoignage, la veuve de David Dixon a évoqué les conséquences de ces attaques sur leur fils ainsi que sur elle-même.

Déjà confronté à quelques problèmes scolaires dès son plus jeune âge, l’enfant est diagnostiqué d’un trouble autistique après la mort de son père. En novembre 2016, on détecte également un syndrome d’Asperger puis, en 2017, des troubles et déficit de l’attention.

Henry a commencé l’école avec deux ans de retard par rapport aux enfants de son âge, dans un état de traumatisme profond. Il trouvait que ce qu’on lui demandait de faire à l’école était difficile. J’ai le sentiment que ses chances dans la vie ont été considérablement réduites en raison de ce traumatisme“, a raconté sa mère. Selon elle, le traumatisme dont il a souffert a eu un impact énorme sur son degré d’anxiété, l’empêche d’apprendre et de développer des réseaux sociaux autour de lui.

Charlotte Sutcliffe dit avoir le “cœur en miettes” depuis le 22 mars 2016. Gérer les avocats et les dossiers avec les assurances a eu un impact “énorme” sur son état mental et émotionnel. “Il m’a fallu cinq ans pour pouvoir boucler cette procédure et la charge mentale m’a fait me sentir très mal.” En 2020, on lui diagnostique une fatigue chronique. A ses yeux, c’est là une conséquence directe du traumatisme.

Je sais que nous nous trouvons dans un procès pénal, mais je dois vous dire que si nous avions reçu une réponse attentive et un soutien de l’État belge, certaines de ces souffrances auraient pu être atténuées“, a-t-elle encore témoigné.

Pendant cinq mois après les attaques, les liens avec les autorités belges étaient pratiquement nuls, a-t-elle dénoncé. Charlotte Sutcliffe ne savait pas comment obtenir de l’aide et un soutien pour son fils et elle. “J’avais un sentiment de crier dans le vide.

Étant donné le peu de soutien et sa faible connaissance de la manière de gérer les procédures, la veuve dit n’avoir pas eu d’autre choix que de retourner vivre au Royaume-Uni. Elle y créera une association de victimes d’attentats.

Quant à son mari, “il nous manque, nous l’aimons et sa perte nous a détruits. Il est très difficile de voir Henry grandir sans son papa.”

David Dixon, alias “Did”, “avait encore tant à vivre. Il a été privé de la vie d’une façon si cruelle que ça nous détruit chaque jour.

Les terroristes n’ont pas gagné ce jour-là“, a-t-elle toutefois insisté à la fin de son témoignage. “En dépit de mon état, je suis beaucoup plus forte aujourd’hui que je n’aurais pensé pouvoir l’être un jour.”


14h41 : “Aujourd’hui, c’est la foi qui me permet de tenir debout” (Rita, mère d’une victime)

Le matin du 22 mars, Sabrina Esmael Fazal avait quitté son domicile de Wavre pour se rendre à Bruxelles, où elle suivait des cours à la Haute École Galilée en soins infirmiers. “Il ne lui restait plus qu’un arrêt pour arriver à l’école” quand elle a été emportée par l’explosion du kamikaze, retrace sa mère Rita.

Cette dernière avait eu un pressentiment ce jour-là… “Je ne sais pas trop pourquoi, mais dès le réveil, j’ai été envahie par une drôle de sensation. Comme à mon habitude, j’ai allumé la télévision pour regarder les infos matinales et là, l’horreur, j’ai vu défiler les images des attentats…“, se rappelle-t-elle. “Très vite, j’ai tenté de joindre Sabrina, mais elle ne m’a pas répondu, les lignes étaient coupées ou saturées. C’est alors que les heures se sont enchaînées, dans une terrible angoisse“, poursuit-elle. Jusqu’à l’annonce du décès 5 jours plus tard.Le choc, je ne voulais pas y croire”.

Sept ans après, ces événements ont brisé le cercle familial dont l’existence est “à la dérive“, malgré la foi qui l’anime.

Je n’ai pas pu reprendre le rythme du travail“, illustre la mère”. Je suis tombée en dépression, j’ai perdu du poids et une partie de mes cheveux. La vie de mes enfants est à jamais marquée au fer rouge à cause de cette histoire“.

Ainsi, Jérémy, le frère de la victime, ne veut plus parler des attentats. Introverti, il garde en lui toute sa douleur et sa colère. “Il va parfois se recueillir au cimetière, il se couche sur la tombe de sa sœur pour lui faire un câlin. Son seul refuge, c’est la pierre froide où repose Sabrina“, évoque la mère dans un sanglot.

La sœur, Sarah, est elle aussi dévastée. “Elle avait une merveilleuse complicité avec Sabrina. Aujourd’hui, elle mène une vie à 300 à l’heure comme si elle vivait pour 2“.

Quant au fils de l’étudiante en infirmerie, Eden, il était âgé d’un an et demi, au moment où son destin a basculé. “Du jour au lendemain, il n’a plus vu sa mère, il a subi un traumatisme. Parfois, je le vois embrasser des photos d’elle“.

Nos vies sont définitivement brisées, nous ne serons plus jamais les mêmes, mon mari a sombré dans une dépression dont il ne se remet pas“, a encore ajouté la témoin, avant de terminer sur une notre plus souriante: “Sabrina adorait les boules de Berlin. Personnellement, j’ai toujours détesté ça, mais il m’arrive à présent d’en acheter et de croquer dans ces pâtisseries à la crème tout en me rappelant le plaisir qu’elle prenait à les manger. Ce sourire m’appartient et me liera à jamais à ma fille“.

Aujourd’hui, c’est la foi qui me permet de tenir debout“, a-t-elle ponctué.


14h46 : “Mon cerveau a été happé par la survie”, se souvient une survivante de Maelbeek

Le 22 mars 2016, comme tous les jours, elle prend place dans le métro à la station Hermann-Debroux, la première sur sa ligne, ce qui lui donne le choix de pouvoir choisir où s’installer dans le convoi. Elle opte toujours pour le 2e wagon, avec une place sur la gauche, à côté de la fenêtre. “C’est là ma première erreur, si je puis m’exprimer ainsi“. La seconde erreur, à ses yeux, elle la commet en étant un peu en avance pour se rendre au travail ce jour-là.

Le métro se met en branle, se remplit petit à petit jusqu’à arriver à la station Maelbeek. Quand il la quitte, c’est “1,2, boum!”, raconte la témoin. “1, 2 pour le temps qu’il met à entrer dans le tunnel, puis boum! pour le bruit puissant de l’explosion.

La déflagration “me soulève, je flotte. Il n’y avait aucun bruit, aucun cri, aucun mouvement avant l’explosion”, décrit Virginie Valentin. “Je me dis que je vais mourir. Je ne veux pas mourir. J’ai l’impression d’être hors de mon corps.

La victime retombe sur son siège et reprend conscience. A tour de rôle, elle vérifie que ses membres sont encore bien là. Le wagon est plein de fumée, la visibilité n’est pas bonne, se souvient-elle, évoquant également l’odeur, “une sale odeur qui va me coller aux cheveux et à la peau un certain temps“.

Au sol, il y a plein de débris matériaux et humains, les gens sont hagards. La fonctionnaire établit le contact avec sa voisine et se décide à sortir du wagon avec elle. “A ma droite, c’est l’enfer, à ma gauche, il y a les rails en sens inverse.” Toutes deux sortent par l’espace vide de la fenêtre et descendent sur les voies. L’adrénaline les aide à remonter sur le quai d’en face.

Virginie Valentin se trouve avec deux autres personnes à ce moment-là et tous cherchent à quitter la station. “Je me rends compte qu’ils sont à la traine, mais il est m’est impossible de faire demi-tour, mon corps est passé en mode automatique, mon cerveau mode survie. Il est happé par la survie.”

La trentenaire à l’époque des faits finit par retrouver l’air libre, à l’extérieur de la station. “Je m’assieds devant la sortie et la douleur m’envahit. Je tiens ma nuque, mes oreilles bourdonnent.

Dans les minutes qui suivent, la victime n’aura de cesse de se plaindre de sa nuque. Le trajet en ambulance vers l’hôpital ne sera ensuite qu’un long calvaire durant lequel chaque secousse est un supplice. La fonctionnaire a en effet eu la colonne vertébrale fracturée en plusieurs endroits, mais la moelle épinière n’a pas été touchée.

Après avoir passé une semaine aux soins intensifs et une autre en neurologie, Virginie Valentin doit attendre que les fractures se consolident avant de pouvoir s’occuper de la reconstruction de ses tympans, qui intervient en janvier et avril 2017.

La victime, qui dit avoir mis des années à récupérer son corps, souffre toujours de douleurs régulières aux cervicales et au dos, dort mal et a encore très souvent des ‘flashes‘. Elle a également des acouphènes bilatéraux et permanents. “C’est le pire“, fustige-t-elle, car cela l‘isole de ses amis ou des endroits bruyants.

Virginie Valentin a aussi confié devant la cour avoir senti une forme de culpabilité d’avoir laissé des gens derrière elle dans la station de métro après l’explosion. Elle n’en revient pas non plus d’avoir survécu malgré sa proximité avec la bombe, le souffle de celle-ci et les images du wagon qu’elle a vues.

Désormais, la fonctionnaire, qui a repris le travail après deux ans, ne prend plus le métro, sauf si elle n’a vraiment pas le choix. “Quand le métro passe à Maelbeek, mon corps pleure“, dit cette “survivante“, qui ne veut pas de la pitié des autres.

Le 22 mars 2016 a par ailleurs commencé un autre “calvaire“, celui de la reconnaissance, notamment vis-à-vis des assureurs, a-t-elle poursuivi. A ses yeux, par trois fois, l’Etat a échoué à la protéger: avant les attentats; le jour des faits en n’arrêtant pas le métro malgré la menace, et en laissant ensuite les victimes “en pâture” aux assureurs. La quadragénaire s’est sentie “humiliée, avec la complicité de l’Etat”.

La seule colère qu’elle porte désormais, c’est envers l’Etat “qui a failli“. “Les accusés, je suis presque désolée pour eux. C’est dommage de mettre tant d’énergie à détruire, quelle aurait été leur vie s’ils avaient mis autant d’énergie à construire?“, leur a-t-elle lancé.

Lorsqu’elle prend encore le métro, Virginie Valentin a repris son habitude de s’asseoir au même endroit dans le train, dans le 2e wagon. “Mais je ne suis plus jamais à l’avance.”


15h35 : le 22 mars, Léopold Hecht ne voulait pas céder à la peur, se souvient son père

Le 22 mars 2016, Léopold Hecht, étudiant en droit âgé de 20 ans, a refusé que sa mère le dépose en voiture à l’université Saint-Louis après qu’elle eut appris que deux bombes avaient explosé à l’aéroport de Zaventem. “Léopold a refusé disant qu’ils (les terroristes) auraient gagné si nous cédions à la peur“, a raconté lundi son père Bernard Hecht devant la cour d’assises chargée de juger les attentats. Le jeune homme n’a pas changé ses habitudes et s’est retrouvé dans le métro au moment de l’explosion à Maelbeek. Grièvement blessé, il est mort à l’hôpital quelques heures plus tard.

Dans les minutes et heures qui suivent les attaques, la famille de Léopold tente à maintes et maintes reprises de le contacter, sans succès. En fin d’après-midi, elle n’a toujours pas de nouvelles et l’étudiant n’est pas encore revenu à la maison. Le frère de Léopold, Adrien, était scolarisé en Angleterre à l’époque. Via les réseaux sociaux, il apprend que quelqu’un correspondant à sa description pourrait se trouver à l’hôpital Erasme. Ce dernier finit par contacter les parents de la victime, leur demandant de venir sur place. Ils y sont conduits au chevet de leur fils, aux soins intensifs.

Le jeune homme est inconscient, un drap recouvrant tout son corps, sauf sa tête, largement bandée. Il a été grièvement blessé dans l’explosion et a inhalé des vapeurs toxiques. Son pronostic vital est engagé. Très vite, les médecins informent la famille que Léopold ne passera pas la nuit.

Nous nous sommes relayés à son chevet, nous avons pu lui parler. Nous sommes convaincus qu’il a reçu nos paroles“, a raconté son père, aujourd’hui âgé de 57 ans. Adrien, lui, n’a pas pu rentrer d’Angleterre et a parlé avec son frère par téléphone. “Quelque temps après minuit, on nous a dit que c’était fini. Nous avons alors répondu positivement et sans hésiter au don d’organes“, a poursuivi Bernard Hecht. À ses yeux, il était important de “garder un peu d’humanité dans les ténèbres qui nous entourent. Ils (les terroristes, NDLR) ne pouvaient pas gagner car les autres pouvaient continuer à vivre.”

Sept années ont passé depuis le départ de Léopold et la douleur est toujours aussi vive pour sa famille, qui commence seulement à l’apprivoiser, a encore confié son père, dressant ensuite le portrait de son fils. La victime était une personne ouverte sur le monde, qui adorait les voyages, introvertie et dotée d’énormément d’humour.

En fin de témoignage, le quinquagénaire s’est finalement adressé aux accusés. Certaines victimes leur ont dit leur haine et leur incapacité à pardonner, d’autres ont fait le choix inverse, a-t-il relevé. Bernard Hecht s’est lui aussi inscrit dans une démarche de pardon. “Vous vous trouvez à un carrefour, où il faut faire un choix. Vous pouvez choisir de poursuivre sur le chemin de la haine ou bien chercher l’humanité au fond de vous. Si vous êtes courageux et que vous faites le choix de vous engager sur le chemin de la réconciliation, vous me trouverez sur votre chemin“, a-t-il lancé aux accusés.


17h36 : L’hôtel Thon, transformé en hôpital de fortune, a accueilli une cinquantaine de victimes

Zaventem venait d’être frappé par les explosions. Alors que nous étions en train d’offrir un support aux nombreux clients qui devaient prendre un avion ce jour-là, j’ai ressenti une secousse… les fenêtres de l’hôtel se sont mises à trembler“, déclare Hans van der Biesen, directeur du Thon Hotel. “J’ai tout de suite compris qu’il s’agissait d’une autre bombe, en faisant le lien avec l’aéroport.”

Réactif, le directeur mobilise son équipe de première intervention et prévient les militaires en poste à l’ambassade du Danemark, située à deux pas de là.

On s’est assuré qu’une bande de circulation restait libre pour les secours. Ensuite, on a sorti les kits de premiers soins, de l’eau et des essuies. Les premières victimes commençaient à sortir du métro…“, explique-t-il.

Plus tard, les professionnels (policiers, secouristes, médecins, etc, NDLR) sont arrivés. On a entendu dire qu’ils cherchaient un point de rassemblement. J’ai donc mis le lobby de l’hôtel à leur disposition“, poursuit-il.

Au total, l’établissement, transformé en hôpital de fortune pour l’occasion, a accueilli entre 40 et 50 victimes, le plus souvent des blessés légers. “Les quelques personnes gravement touchées ont directement été acheminées vers les hôpitaux, les autres ont été évacuées un peu plus tard.”

Des salles de réunion ont également été proposées aux forces de l’ordre, présentes en nombre sur les lieux.

Ce jour-là, j’étais en mode automatique“, analyse avec le recul le directeur de l’établissement. “On a aidé ceux qui étaient dans le besoin, on les a réconfortés.”

Les heures passant, l’agitation est retombée, l’hôtel s’est vidé et le personnel a pris conscience des événements qui venaient de se produire. “Nous avons organisé un suivi psychologique pour nos employés via des sessions de groupes et individuelles… Aujourd’hui encore, nous y pensons. Ces faits nous unissent. Et la solidarité qui est née de ce drame a créé un lien entre nous“, a-t-il conclu


17h39 : “La bombe a explosé chez nous, dans notre foyer”, raconte la sœur d’une victime

La mère et la sœur de Loubna Lafquiri sont venues raconter à quel point ces attentats avaient détruit leur vie. Ce jour-là, “la bombe a explosé chez nous, dans notre maison, dans notre foyer“, a ainsi regretté Amina Lafquiri, une informaticienne âgée aujourd’hui de 51 ans.

Sa sœur Loubna se rendait à son travail le jour des attentats quand elle a été fauchée par l’explosion de la bombe à la station de métro Maelbeek. Elle se trouvait à quelques mètres à peine du kamikaze.

Cela fait sept ans maintenant que cette tragédie a eu lieu. Comment vous dire l’impact et le choc que ça a été?“, a-t-elle ouvert son témoignage, disant souffrir encore de graves séquelles. “Nos vies ont été éclatées en mille morceaux, comme le corps de Loubna dans le métro.”

Les murs et parois de Maelbeek sont couverts du sang de ma sœur à cause d’une cause qui nous dépasse. Je n’ai jamais entendu parler de cet islam-là, qui justifie que des hommes confectionnent des bombes et tuent des innocents, dont ma sœur“, a-t-elle lancé aux accusés.

Amina et sa mère se trouvaient au Maroc au moment des attaques. Elles apprennent les informations au compte-gouttes, sans pouvoir déterminer si Loubna fait partie des victimes.Il a fallu attendre pour que je réalise la catastrophe. Loubna était dans le métro. Depuis, l’enfer a commencé, le compte à rebours aussi.

Les heures et jours passant, “l’étau du désespoir se resserrait de plus en plus sur nous“, se souvient-elle. “Nous avons vraiment espéré jusqu’à la dernière seconde, jusqu’à ce qu’une ministre lise la liste officielle des victimes.” Son monde s’est alors écroulé, a expliqué Amina Lafquiri.

Mais il ne fallait pas tomber par terre et rester debout pour les trois enfants de la victime, alors âgés de 2, 6 et 9 ans, a-t-elle raconté. “Nous étions une famille pleine d’éclats de rire, de joie de vivre. Nous avions encore tellement de projets à réaliser Loubna et moi. Depuis, la dépression ne nous quitte plus. Nous étions tous ambitieux, tout s’est effondré.

La sœur de Loubna dit ne pas avoir la grandeur d’âme de pardonner aux accuséscet acte de barbarie“. “Moi, je suis en colère pour toutes ces vies qu’ils ont délibérément ôtées, en colère qu’ils aient pu briser nos vies“, a-t-elle confié. Le temps ne l’a pas rendue plus forte mais l’a, au contraire, plongée dans un abîme dont il est difficile de sortir.

Évoquant les fouilles à nu avec génuflexions qu’ont dénoncées les accusés détenus, Amina Lafquiri s’est interrogée: “de quelle dignité parlent-ils? Que représentent ces fouilles par rapport aux meurtres qu’ils ont commis? Nous voulons réparation et que justice soit faite.”

La mère de Loubna, âgée de 67 ans, a alors rebondi sur le témoignage de sa fille, souhaitant demander aux accusés s’ils arrivaient à dormir. “Moi, je ne dors plus. Quand on a commis un péché pareil, peut-on encore dormir normalement? Regrettent-ils leurs gestes?” Qualifiant ce qu’il s’est passé d'”inimaginable” et la perte de sa fille de gâchis, Ghita Berraho a prévenu: “moi, je ne pardonnerai pas”.

Sept années ont passé depuis le 22 mars 2016 et le temps ne semble pas être réparateur pour le moment. “Je n’ai plus goût à rien, je ne vis plus. Ils ont foutu la vie de toute notre famille en l’air“, a conclu la mère de la victime.

Ca.Pa. et E.V. avec Belga / image : Belga