Une oeuvre d’art “cachée” depuis 30 ans va finalement quitter les stocks du ZARA de la rue Neuve

Le relief “La danse”, du sculpteur Ossip Zadkine, quittera bientôt les stocks de la grande enseigne commerciale ZARA située rue Neuve à Bruxelles pour le Musée juif de Belgique, où il sera mis en valeur dans un espace repensé pour l’artiste français. Cachée aux regards pendant 30 ans, cette œuvre monumentale pourra à nouveau être admirée vers 2025, année qui commémore le centenaire de l’Art Déco.

Entre tringles et caisses de vêtements, la pièce de 12,5 mètres de long sur 3,5 de haut a été dévoilée lundi à la presse. Réalisée en plâtre et recouverte d’une patine bronze doré, cette allégorie représente trois personnages dansant avec des rubans. Des accessoires qui ne sont pas sans rappeler la pellicule cinématographique et l’ancienne affectation des lieux. Fermé en 1991 puis transformé en magasin de prêt-à-porter, le luxueux cinéma Métropole et ses huit niveaux s’élançaient en effet au numéro 30 de la rue Neuve. Dès l’ouverture de ce complexe en octobre 1932, “La danse” couronne la scène de la grande salle de projection qui comptait 2.900 places. L’idée était alors de connecter l’hôtel Métropole, installé place De Brouckère, à un haut lieu du 7e art, loisir en vogue dans les années ’30.

“Très peu de Bruxellois savent que cette œuvre gigantesque se cache ici”, explique la secrétaire d’État bruxelloise à l’Urbanisme et au Patrimoine, Ans Persoons. “Nous avons d’abord tenté de négocier un accès in situ” avec le groupe Zara “mais c’était compliqué. Un accord a finalement été trouvé pour que ‘La danse’ soit donnée à la Région.” Une délicate opération de découpage et de remontage attend à présent le relief.

“Une incroyable plus-value pour le nouveau musée”

La pièce de deux tonnes rejoindra l’espace actuellement dédié aux expositions temporaires, au rez-de-chaussée du Musée juif. Dans ce “loft” de seize mètres sur sept, les visiteurs pourront admirer de près cette œuvre monumentale d’Ossip Zadkine (1888-1967). Le sculpteur est issu d’une famille juive de Vitebsk, dans l’actuel Bélarus. Il fut ensuite naturalisé français en 1921. L’artiste installa son atelier dans sa maison de la rue d’Assas, à deux pas du jardin du Luxembourg dans la capitale française.

À Bruxelles, “l’idée est de recréer l’atmosphère de travail de son atelier”, relève la directrice du musée, Barbara Cuglietta. “Grâce à une collaboration avec le musée Zadkine à Paris, nous allons certainement récupérer des archives, par exemple la correspondance entre Adrien Blomme (l’architecte du cinéma Métropole, NDLR) et Ossip Zadkine.” Ce dernier entretenait un lien spécial avec Bruxelles, puisque sa première grande rétrospective eut lieu au Palais des Beaux-Arts en 1933. Plusieurs Belges collectionnaient également ses œuvres, tandis qu’Adrien Blomme avait déjà fait appel aux talents du Français pour son habitation personnelle, située avenue Franklin Roosevelt.

L’arrivée prochaine de cet ouvrage d’exception, le plus grand jamais réalisé par Zadkine, “constitue une incroyable plus-value pour le nouveau musée, qui ouvrira ses portes en 2028”, s’enthousiasme Barbara Cuglietta. “Alors qu’il aurait pu être perdu, il permettra de mettre en valeur le patrimoine belge.” La chronologie du déménagement doit encore être précisée. L’objectif est cependant de rendre le relief accessible dans son nouvel écrin dès 2025, année dédiée à l’Art Déco dans la capitale belge. La salle “Zadkine” devrait ainsi être accessible avant la fin des travaux de rénovation du Musée juif de Belgique.

■ Reportage d’Ameline Delvaux et Yannick Vangansbeek

Avec Belga