Procès des attentats de Bruxelles : un médecin confirme les blessures d’un accusé, tous quittent le box

La présidente a suspendu un temps l’audience pour désigner un médecin légiste afin d’ausculter Ali El Haddad Asufi, victime, selon lui, de violences policières. Le procès a finalement repris vers midi.

L’accusé Ali El Haddad Asufi, par la voix de son avocat Jonathan De Taye, a dénoncé jeudi, en début d’audience, avoir été violenté par la police lors de son extraction de la prison de Haren. Il affirme avoir été étranglé et avoir ensuite perdu connaissance.

L’heure est grave!“, a débuté l’avocat. “J’hallucine totalement! Je n’ai jamais assisté à un procès qui se déroule dans ces conditions!“, a-t-il dénoncé, évoquant un traitement “digne d’un Etat totalitaire” à l’encontre de son client.

Une médecin légiste confirme les lésions

Jonathan De Taye a dès lors demandé à la présidente de suspendre l’audience afin qu’il puisse être examiné par un médecin légiste. L’audience a ainsi été suspendue.

Quelques heures après, la médecin légiste a remis son rapport à la cour. L’experte a constaté que ses blessures correspondaient à sa version des faits, soit qu’il a été étranglé après avoir subi une clé de bras par un policier.

Néanmoins, elle a conclu qu’il n’y avait pas de contre-indication médicale à ce que l’accusé comparaisse à l’audience publique. Ce dernier a toutefois émis le souhait de quitter la salle d’audience. Les 6 autres accusés du box lui ont emboité le pas. Le box des accusés s’est donc retrouvé complètement vide. Seuls les frères Farisi, qui comparaissent libres, restent présents.

Depuis le début du procès lundi 5 décembre, certains accusés se plaignent des conditions de transfert entre la prison de Haren et le Justitia, où se tient le procès.

► Reportage : Procès des attentats de Bruxelles : 5 accusés protestent, le SPF Justice poussé à agir

Reportage de Bernard Denuit, Nicolas Scheenaerts et Pierre Delmée.


09h45 – Nouvelle défection d’un juré

L’audience du 4ème jour du procès a aussi été marquée par une nouvelle défection dans le jury. Cette fois, c’est un juré suppléant qui a fait défaut, pour cause de maladie. Il s’agit du 4ème juré que la cour perd en moins d’une semaine… Il reste, à ce jour, 20 jurés suppléants.


10h00 – Ali El Haddad Asufi se dit victime de violences policières

L’accusé Ali El Haddad Asufi a ensuite dénoncé avoir été victime de violences policières lors de son extraction de la prison de Haren en vue de son transfert vers le bâtiment Justitia.  L’audience a alors été suspendue, le temps qu’une experte légiste examine l’accusé.

Elle a constaté qu’il souffrait bien de blessures et de lésions. Néanmoins, la médecin a conclu qu’il n’y avait pas de contre-indication médicale à ce que l’accusé comparaisse à l’audience publique. Ali El Haddad Asufi ainsi que tous les accusés présents dans le box ont décidé de quitter l’audience.


12h00 – La présidente de la cour appelle “au dialogue”

Après l’incident avec Ali EL Haddad Asufi, la présidente de la cour a lancé un appel “urgent” au dialogue au sujet du transfert des accusés détenus. “Je souhaite que le dialogue revienne pour que ce procès puisse se poursuivre dans de bonnes conditions“, a insisté Laurence Massart.

Les personnes se reconnaîtront“, a-t-elle ajouté, citant ensuite le parquet fédéral, la police et les autorités politiques responsables de la justice et de la police.  Elle a répété qu’elle n’était pas maître des mesures de sécurité qui sont en vigueur pour ce procès, mais qu’elle avait uniquement parmi ses compétences la police de l’audience.

Toutefois, comme elle s’y était engagée mercredi, la présidente de la cour a écrit une lettre au ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne pour relayer les doléances formulées par plusieurs accusés.


12h15 – Reprise de la lecture de l’acte d’accusation

La lecture de l’acte d’accusation a pu reprendre peu après 12h15, jusque vers 13h00. Elle devrait se poursuivre durant l’après-midi et probablement se prolonger lundi voire mardi prochains, alors qu’elle était initialement censée se terminer ce jeudi après-midi.

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15h37 – Salah Abdeslam, de la Syrie à son arrestation

Salah Abdeslam est le prochain accusé à être décrit ce jeudi après-midi. L’accusé, qui a grandi à Molenbeek-Saint-Jean, a notamment fréquenté dans sa jeunesse Abdel Hamid Abaaoud (qui deviendra le coordinateur des attentats du 13 novembre 2015 à Paris, NDLR). En 2011, lui et Abaaoud sont condamnés à un an de prison avec sursis pour tentative de vol qualifié.

En 2013-2014, Salah Abdeslam se rapproche de son frère Brahim (l’un des kamikazes des attentats de Paris, NDLR). Il fréquente le café tenu par son frère. À cette époque, de nombreux jeunes partent en Syrie. Salah Abdeslam évoque une seule fois la possibilité de s’y rendre, auprès de sa fiancée. Son entourage remarque peu son intérêt croissant pour la religion. Le 7 février 2015, il va chercher son frère Brahim, de retour de la zone irako-syrienne, à l’aéroport d’Amsterdam.

Le ministère public reproche à Salah Abdeslam son rôle dans le rapatriement de terroristes venus de Syrie (Mohamed Belkaïd, Najim Laachraoui, Osama Krayem, Sofien Ayari…). Il aurait participé à la location de véhicules et d’appartements qui ont servi dans le cadre des attentats de Paris.

Il a notamment déposé trois membres du commando au stade de France le 13 novembre 2015 avant de rejoindre la planque de la rue Henri Bergé à Schaerbeek, le 14 novembre, pour y retrouver les frères El Bakraoui, Najim Laachraoui, Belkaïd, Osama Krayem et Sofien Ayari. Dans une lettre à son “émir”, Salah Abdeslam déclare que sa ceinture n’a pas fonctionné et qu’il va donc “finir le travail ici”.

Salah Abdeslam est finalement arrêté trois jours après avoir fui la fusillade de la rue du Dries à Forest, le 18 mars 2016. Une fusillade pour laquelle il sera condamné à 20 ans de prison.

Interrogé le 19 mars par les enquêteurs, Abdeslam évite de parler de ce qui pourrait permettre d’identifier des complices ou de faire avancer l’enquête. Il invoquera ensuite le droit au silence, malgré les tentatives répétées des enquêteurs de l’amener à parler.

Salah Abdeslam sur l’avis de recherche lancé par la police française après les attentats du 13 novembre 2015

 


15h50 – Les lettres de Salah Abdeslam

Dans des lettres d’adieu découvertes dans la planque rue du Dries à Forest et attribuées à Salah Abdeslam, il écrit sa détermination à suivre le chemin de son frère Brahim, l’un des kamikazes des attentats de Paris.

Selon le ministère public, ces lettres attestent un “endoctrinement certain” de l’accusé. Son frère Brahim ne s’est pas suicidé, mais a “combattu” et est un “héros de l’islam”, écrit-il à sa mère. Il explique vouloir “combattre les ennemis d’Allah de toutes mes forces, afin qu’ils cessent de bombarder nos frères et nos sœurs dans les pays musulmans”. Abdeslam dit avoir fait le choix du combat pour mériter le paradis. Il termine la lettre par ces mots : “Sache que tes deux enfants ont combattu pour Allah”.

Dans un courrier à sa soeur, il développe le même argumentaire basé sur “l’endoctrinement habituel des membres du groupe terroriste État islamique”, selon l’acte d’accusation. Y transparaît une vision binaire du monde, avec d’un côté les “mécréants” et de l’autre, les “vrais musulmans”.


16h50 – Ali El Haddad Asufi, l’ami d’Ibrahim El Bakraoui

Ali El Haddad Asufi, âgé de 39 ans, a toujours vécu à Bruxelles. C’est sur les bancs de l’école qu’il a fait connaissance avec deux autres accusés du dossier, Smail Farisi et Ibrahim El Bakraoui, ainsi qu’avec Youssef El Ajmi, qui a été condamné dans le dossier “Paris bis”.

“En 2012, il décroche un contrat d’intérimaire à LSG Sky et y est embauché définitivement en 2014 comme chauffeur-livreur à l’aéroport de Zaventem. Son rôle consiste à amener les repas préparés dans l’entrepôt jusqu’aux avions”, a exposé l’acte d’accusation. “Son ami Youssef El Ajmi travaille également à Zaventem pour la même société”.

L’accusé présente un casier judiciaire vierge en Belgique, mais il a été condamné, en juin dernier, à une peine de 10 ans de prison devant la cour d’assises de Paris, dans le dossier relatif aux attentats du 13 novembre 2015. Il était un ami proche d’Ibrahim El Bakraoui, qu’il a continué de fréquenter même après l’incarcération de ce dernier, condamné pour des braquages.


17h21 – Arrêté à deux reprises

Ali El Haddad Asufi a été arrêté une première fois  le 24 mars 2016, soit deux jours après les attentats. Les enquêteurs, qui étaient déjà sur la piste des frères El Bakraoui avant les attaques, ont remarqué des contacts entre le numéro d’El Haddad Asufi et ceux des frères. De plus, cet homme se trouvait à Zaventem le 22 mars, où il travaillait comme chauffeur-livreur.

Une perquisition a été réalisée au domicile d’Ali El Haddad Asufi, dans la foulée de son arrestation. “Il se montre collaborant durant sa première audition”, mentionne l’acte d’accusation. Il se dit aussi contre l’État Islamique (EI) et ajoute qu’il ne connaît personne, dans son cercle d’amis proches, qui soit d’accord avec les principes d’un tel groupe extrémiste. Concernant son proche ami Ibrahim El Bakraoui, El Haddad Asufi déclare qu’il ne l’a plus vu depuis l’été 2015, avant d’admettre qu’il l’a encore vu en septembre. Il a raconté que son ami avait changé au contact de son cousin, l’accusé Oussama Atar.

Après cette première arrestation le 24 mars 2016 et après avoir été auditionné, El Haddad Asufi est remis en liberté. Mais l’enquête évoluera et aboutira à une nouvelle interpellation de l’intéressé en juin 2016. Les policiers, qui ont entretemps avancé sur l’enquête de téléphonie dans le dossier des attentats à Bruxelles, remarquent qu’El Haddad Asufi a eu plusieurs contacts téléphoniques avec Khalid El Bakraoui, le kamikaze du métro, alors qu’il avait affirmé le 24 mars n’avoir jamais échangé par téléphone avec celui-ci.

Également, les enquêteurs ont découvert, dans l’ordinateur abandonné par la cellule près de sa planque de la rue Max Roos à Schaerbeek, un message d’Ibrahim El Bakraoui, l’un des deux kamikazes de l’aéroport, datant du 21 mars 2016, disant ceci : “un frère nous a donné comme information qu’en matinée il y a des vols américains, des vols russes, des vols israéliens”. Or, il s’avère qu’Ali El Haddad Asufi est un ami proche d’Ibrahim El Bakraoui et qu’il travaille comme chauffeur-livreur à l’aéroport de Zaventem.

Entretemps également, les enquêteurs ont découvert la planque de l’avenue des Casernes à Etterbeek, d’où sont partis le 22 mars au matin Khalid El Bakraoui et Osama Krayem. Sur les images des caméras de vidéo-surveillance de l’immeuble, ils distinguent qu’Ali El Haddad Asufi s’y rend régulièrement entre fin 2015 et la survenance des attentats en mars 2016, notamment les bras chargés de pizzas. L’accusé a expliqué qu’il s’agissait de “visites amicales” et qu’ils parlaient “de tout et de rien”.


17h35 – La lecture de l’acte d’accusation reprend lundi

La présidente de la cour d’assises Laurence Massart a décidé de mettre un terme à l’audience du jour vers 17h30. La lecture de l’acte d’accusation se poursuivra lundi, malgré le retard sur l’agenda initialement prévu. Les procureurs fédéraux en sont à un peu plus de la moitié de la lecture.

C.TQ avec Belga