Procès des attentats à Bruxelles : retour sur l’intervention des services de secours à Maelbeek
Les sept accusés détenus étaient cette fois bien présents dans leur box, à la reprise du procès des attentats de Bruxelles devant la cour d’assises vendredi matin. Deux ont toutefois souhaité ne pas assister aux débats, soit Salah Abdeslam et Osama Krayem.
Depuis le début du procès, la présence des accusés détenus à leur procès devant la cour d’assises de Bruxelles reste incertaine. Salah Abdeslam, Mohamed Abrini, Osama Krayem, Sofien Ayari, Bilal El Makhoukhi, Ali El Haddad Asufi et Hervé Bayingana Muhirwa dénoncent les conditions dans lesquelles ils sont transférés depuis la prison de Haren vers le Justitia, où se tient le procès. Ces conditions de transfert ont été longuement débattues depuis mardi, les avocats de la défense s’offusquant que des fouilles à nu systématiques soient encore opérées malgré une ordonnance du tribunal civil de Bruxelles siégeant en référé les interdisant de manière systématique et non motivées par un danger précis. La journée de jeudi avait été consacrée aux motivations des fouilles à nu – qui avaient dû être traduites du néerlandais vers le français, langue de la procédure. Ce vendredi, les justifications ont une nouvelle fois été transmises en néerlandais et ont été envoyées en traduction.
La présidente de la cour d’assises a précisé qu‘à partir de lundi, elles seraient communiquées en français directement. Si les sept accusés détenus étaient bien présents à l’entame de l’audience, deux ont cependant décidé de ne pas assister aux débats, à savoir Osama Krayem et Salah Abdeslam. Ce dernier a d’abord sollicité la parole à la présidente de la cour, pour évoquer les conditions de transfert. Laurence Massart lui a assuré qu’elle lui donnerait la parole à la suite de l’exposé des pompiers, qui doivent retracer leur intervention à Maelbeek le 22 mars 2016. L’accusé a ensuite décidé de ne pas assister à l’audience.
Revivez le direct de cette journée ci-dessous :
10h07 – Les sept accusés détenus sont présents
Les sept accusés détenus étaient cette fois bien présents dans leur box, à la reprise du procès des attentats de Bruxelles devant la cour d’assises vendredi matin. Deux ont toutefois souhaité ne pas assister aux débats, soit Salah Abdeslam et Osama Krayem.
11h13 – Les pompiers de Bruxelles sont arrivés à Maelbeek moins de 15 minutes après l’explosion
“Nous apprenons, par notre haut-parleur, qu’il y a une explosion à la station de métro Maelbeek. Je prends alors la coordination d’une seconde colonne de secours“, a relaté le major Nicolas Jalet des pompiers de Bruxelles, vendredi matin, devant la cour d’assises de Bruxelles qui juge le dossier des attentats du 22 mars 2016. Après avoir envoyé une partie de leurs effectifs à l’aéroport de Zaventem peu après 08h00 le 22 mars, où deux explosions ont eu lieu à l’aéroport, les pompiers de Bruxelles sont donc intervenus, dès 09h20 environ, à Maelbeek.
Un poste médical avancé a été installé chaussée d’Etterbeek, avec un inconvénient. “Nous n’avons pas eu de visuel sur les blessés, encore mobiles, qui étaient sortis de la station du côté de la rue de la Loi. L’avantage est qu’un pré-tri s’est effectué sur le trottoir rue de la Loi.” La première mission des pompiers a été d’extraire les victimes de la rame de métro sinistrée, ensuite trier et évacuer les blessés puis faire appel au service de déminage et évacuer totalement la station. “Une odeur âcre planait et un silence absolu“, a décrit le major Jalet.
12h11 – Les pompiers avaient dressé un bilan de 141 blessés à Zaventem et de 154 à Maelbeek
Le major Nicolas Jalet a brièvement abordé, vendredi matin devant la cour d’assises de Bruxelles, l’intervention des pompiers bruxellois après les explosions à l’aéroport de Zaventem le 22 mars 2016, avant de concentrer son exposé sur l’intervention des secouristes après l’explosion dans la station de métro Maelbeek, qu’il a lui-même commandée. L’officier a tenu à préciser que les pompiers de Bruxelles étaient intervenus en grand nombre à Zaventem, en soutien de leurs collègues de la zone de secours du Brabant flamand Ouest.
Le témoin a indiqué que le bilan dressé à la fin des opérations de secours le 22 mars faisait état de 141 blessés à l’aéroport de Zaventem et de 154 blessés à la station de métro Maelbeek. Par ailleurs, 16 personnes ont perdu la vie à Zaventem et 16 autres à Maelbeek.
14h37 – Les victimes souffraient de traumatismes crâniens et abdominaux, mais aussi de brûlures
Le docteur Olivier Vermylen du CHU Brugmann était directeur des secours médicaux à la station de métro Maelbeek le 22 mars 2016. Il est venu témoigner, vendredi, devant la cour d’assises de Bruxelles, de la coordination des services de secours et de son intervention sur place. Il a notamment relevé les types de blessures dont souffraient les nombreuses victimes, à commencer par des traumatismes crâniens et abdominaux, et des brûlures sévères.
Le médecin urgentiste a tout d’abord expliqué être arrivé sur place “dans un chaos d’informations”. Sa tâche a également été rendue compliquée en raison de l’existence de deux postes médicaux avancés. “On a l’habitude de travailler avec un seul PMA (poste médical avancé). On a alors décidé de fermer celui du bas (chaussée d’Etterbeek, NDLR), d’envoyer tous les blessés graves qui s’y trouvaient vers les hôpitaux, et de conserver le PMA installé à l’hôtel Thon (rue de la Loi, NDLR). Tous les ‘U2’ (urgences 2) et les ‘U3’ (urgences 3) du PMA du bas y ont été rapatriées”, a-t-il expliqué. Par ailleurs, les services de secours ont été confrontés à des fausses informations mentionnant d’autres explosions, ce qui a également entravé leur travail.
Les blessés ont été triés en fonction de la gravité de leurs blessures, “à l’aide de macarons, mis autour du cou”, a détaillé le médecin, “rouges pour les cas graves, jaunes pour les moins graves et noirs pour les victimes décédées”. Au total, 154 victimes ont été prises en charge, soit 35 “U1” – les plus critiques -, 33 “U2” et 86 “U3”. Selon le médecin, elles souffraient de traumatismes crâniens sévères dus aux projectiles, de plaies thoraciques sévères, parfois avec éviscérations, de traumatismes abdominaux, de traumatismes des membres (fractures, plaies, etc.), de brûlures de 2e degré et de 3e degré, de lésions tympaniques, mais aussi de troubles psychiques et de stress post-traumatiques.
Plusieurs personnes parmi les intervenants de première ligne ont également souffert de ce dernier type de traumatismes. Le docteur Olivier Vermylen a par contre souligné, comme aspects positifs de cette vaste opération de secours, les “bons échanges multidisciplinaires”, soit la communication entre les différents services (pompiers, équipes médicales et policiers). “Tout le monde sur le terrain se connaissait déjà”, a-t-il commenté. Ensuite, l’arrivée des blessés dans les hôpitaux s’est révélée chaotique, selon lui. “Nous n’avions aucune information sur les capacités d’accueil des hôpitaux et sur où envoyer quels blessés, car chaque hôpital a ses spécificités. Chaque patient est envoyé vers l’hôpital adéquat, pas de manière aléatoire”, a expliqué le professionnel.
16h 20 – “Nous avons reçu l’ordre de trouver d’éventuelles dernières victimes”
“Nous, notre but, c’était de désincarcérer l’un des wagons pour pouvoir trouver d’autres victimes. Ma première réaction était de vouloir faire demi-tour. Mais on est obligé d’avancer”, a relaté un pompier, vendredi après-midi, devant la cour d’assises de Bruxelles, au procès des attentats du 22 mars 2016. Le témoin faisait partie d’une équipe qui est intervenue dans la station de métro Maelbeek après l’attentat.
“Quand nous sommes descendus du camion, notre officier nous a demandé de prendre du matériel de désincarcération. Nous sommes descendus en station, c’était très très dur car évidemment, on ne se rendait pas compte de ce qu’on allait voir. Il y avait tout d’abord les odeurs”, a relaté le pompier. “Nous, notre but, c’était de désincarcérer l’un des wagons pour pouvoir trouver d’autres victimes. Ma première réaction était de vouloir faire demi-tour. Mais on est obligé d’avancer. Mes premières images d’arrivée sur le quai, c’était la tête d’une personne avec une lacération diagonale sur le visage. Je me rappelle du tronc d’une personne…”, a poursuivi le pompier, la gorge serrée.
“On a entendu sur notre radio portable le message d’évacuation. Je me suis dit, en voyant les cadavres et les restes humains, peut-être qu’il y a encore un risque d’explosion, tout en avançant, tout en ayant peur. J’avais l’impression d’être dans un mauvais rêve, un cauchemar”, a-t-il dit.
“L’intérieur de la rame, je crois que je ne dois pas vous expliquer”, a enchaîné son collègue. “Faire des recherches dans ces conditions, en ayant reçu un message d’alerte qu’il fallait évacuer, ça n’était pas facile. Cela fait 24 ans que je suis pompier, c’était la première fois que je voyais ça.” Le premier pompier a repris son récit. “C’est alors qu’on a trouvé encore une victime. Les collègues ont pu l’aider. Je pense que c’est une des dernières victimes qu’il y avait à sauver”, a-t-il relaté.
“Nous sommes encore allés à la station Arts-Loi, pour remonter vers Maelbeek sur les voies et tenté d’y trouver des personnes qui s’étaient cachées ou des victimes potentielles. Deux autres victimes ont effectivement été trouvées, elles avaient été éjectées sur le quai d’en face”, a-t-il dit. “On est ensuite remonté sur la voie publique et on a été remplacés par une autre équipe. On est resté plus ou moins trois heures sur place.”
16h43 – Un des premiers policiers intervenus à la station Maelbeek livre un témoignage poignant
Un policier, qui en mars 2016 faisait partie de la police des chemins de fer, en charge de la gestion des plans catastrophe pour le métro à Bruxelles, a livré vendredi après-midi devant la cour d’assises de Bruxelles un témoignage poignant de son intervention à la station Maelbeek, peu après l’explosion qui a coûté la vie à 16 personnes le 22 mars 2016.
Très ému, le témoin a dû interrompre à plusieurs reprises son récit, coupé par ses larmes. Le policier reste très marqué par son intervention dans la station de métro Maelbeek, expliquant à la cour bénéficier d’un suivi psychologique. “Malheureusement, tout le suivi du monde n’enlève pas les images, n’enlève pas les odeurs”, a-t-il confié.
Ce policier, qui est désormais affecté à la circulation car “le métro, c’était plus pour moi”, a expliqué que le 22 mars 2016, il est dépêché, avec un collègue, vers l’aéroport de Zaventem où deux explosions avaient retenti. Sur le chemin, alors qu’ils se trouvaient à hauteur de l’avenue du Trône, les agents reçoivent cependant un appel les avertissant d’une explosion à Maelbeek. “On a fait demi-tour.”
Dans la station, “la fumée était très dense, je ne voyais pas mes mains”, a raconté le policier. “Sur la mezzanine, j’entendais des voix, des gens pleuraient, hurlaient.”
Après avoir évacué plusieurs personnes, le policier s’enfonce dans la station et arrive sur le quai. Il explique être confronté directement à des blessés graves, dont une femme, propulsée contre le mur de la station. “Elle était consciente, elle essayait de ramper, elle gémissait. J’ai vu son état et je savais que je ne pourrais pas faire grand-chose.”
Très ému, le policier explique que sa mission était de sécuriser les lieux et de prodiguer des informations aux services de secours. “Je voulais être sûr qu’il n’y avait pas d’autres objets explosifs, pour permettre aux pompiers de travailler.”
Le témoin a terminé son intervention en confiant qu’il s’agissait de “la plus grande catastrophe que je vivais, de loin la pire (…). Tous les policiers et les pompiers, on est régulièrement amenés à voir des accidents, des meurtres. Mais des choses comme ça, c’est exceptionnel. Et pourvu que ça reste exceptionnel”.
Rédaction – avec Belga – Photo de couverture : Belga/Benoit Dopagne
■ Reportage d’Arnaud Bruckner, Morganne Van Hoobrouck et Pierre Delmée.