L’édito de Fabrice Grosfilley : l’aiguillon de la démocratie participative

Installer une commission délibérative pour débattre de la politique de mobilité en Région bruxelloise. Ce point sera à l’ordre du jour du bureau du Parlement bruxellois ce mercredi. C’est la conséquence d’une pétition lancée en fin de semaine dernière, et qui a réuni très rapidement les 1000 signatures nécessaires pour forcer le Parlement à organiser un débat sur… l’opportunité d’ouvrir ou pas le débat.

Que dit-elle, cette pétition lancée par David Van Reybrouck, historien néerlandophone, connu pour ses écrits sur le Congo, mais aussi sur les questions de démocratie, et qui fut déjà l’un des initiateurs du G1000 il y a quelques années ? Elle dit que face à l’immobilisme politique, c’est aux citoyens de trouver des solutions. Qu’on ne peut pas se satisfaire du blocage actuel des négociations. Que face au risque d’un gouvernement qui resterait en affaires courantes toute la législature, il faut traiter les dossiers les plus urgents.

« Parmi ceux qui divisent les partis, écrit David Van Reybrouck, le sujet de la mobilité et de la voiture est l’un des plus explosifs. Les pros et les anti-voitures se déchirent. Ce spectacle n’est pas digne de nos démocraties. D’autant que la question des transports est fondamentale. »

Alors évidemment, en demandant une commission délibérative sur ce thème, les signataires de cet appel appuient là où ça fait mal — et ils le savent. La question de la mobilité a été au cœur de la dernière campagne électorale. Un sujet clivant, qui a donné lieu à des positionnements antagonistes. La proposition des signataires, c’est donc de confier ce dossier à une commission délibérative, composée de citoyens tirés au sort et de parlementaires, qui avancerait à son propre rythme sur la question de la mobilité. Autrement dit : sortir carrément ce chapitre des négociations gouvernementales.

« Si ce travail permettait de traiter la question de la mobilité et de créer les conditions pour qu’un gouvernement soit formé, ce serait extraordinaire ! », écrit encore David Van Reybrouck.

Bon, on verra ce qu’en dira le bureau du Parlement ce mercredi. Il nous paraît quand même peu probable que le monde politique décide de se dessaisir d’une matière aussi importante et aussi structurante que la mobilité. Importante, d’abord, sur le plan budgétaire : décider de construire une ligne de tram coûte cher — une ligne de métro, encore plus. Savoir si on garde la gratuité des transports en commun pour les jeunes ou les seniors, c’est un clivage droite-gauche. Instaurer une taxation au kilomètre, cela pourrait améliorer le budget. Et puis, la mobilité est une question structurante. Relier les quartiers de la périphérie au centre-ville est un enjeu majeur en termes de mobilité, bien sûr, mais aussi de qualité de l’air, de qualité de vie, d’urbanisme, de développement économique.

Bref, on n’est pas du tout sûrs que les élus voient cette initiative d’un bon œil. Et pourtant, elle s’impose à eux. Puisque nos hommes et femmes politiques sont englués dans une crise qui n’en finit pas, ce serait un comble qu’ils bloquent par ailleurs une initiative citoyenne qui veut prendre les choses en main. Il faut prendre cette proposition pour ce qu’elle est : une sorte d’aiguillon. Un coup-de-poing à l’estomac d’un monde politique qui se complaît à tergiverser.

Vous ne voulez pas gouverner ? Eh bien nous, nous sommes prêts à le faire, disent ces citoyens.

Quand on sait à quel point les questions de mobilité sont passionnelles, et politiquement instrumentalisées, l’idée qu’une commission fonctionnant au consensus, entendant des experts et dépassant les clivages pour trouver des réponses mesurées à un problème complexe… l’idée que cette commission puisse faire aussi bien qu’un accord de majorité négocié par des états-majors n’est pas forcément absurde.  En tout cas, elle ne peut pas produire un pire résultat  que ces mêmes états-majors qui, faute de pouvoir se parler et négocier, décident de ne régler aucun des problèmes auxquels la Région bruxelloise doit désormais faire face.

Fabrice Grosfilley 

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