L’édito de Fabrice Grosfilley : gare à l’effet de gare à Bruxelles Midi
L’Edito de Fabrice Grosfilley est consacré à l’insécurité à la gare du Midi.
C’était donc l’un des feuilletons de l’été : qui est responsable de l’insécurité grandissante qu’on peut constater à la gare du Midi ? Dans la torpeur d’août, la sortie en mode “c’est la catastrophe” de la patronne de la SNCB, Sophie Dutordoir, a mis le feu aux poudres. En particulier aux journaux néerlandophones, particulièrement inflammables dès qu’on parle de sécurité et de défaillance bruxelloise. Quand les articles, les lettres ouvertes et les reportages s’enchainent, les ministres ne peuvent pas rester sur leur transat à ne rien faire. Prise de position, appel à la mobilisation, concertation, négociation, et pour finir, action.
Ce samedi, une centaine de policiers a donc été déployé sur le terrain. Opération muscles en avant et interpellations en grande nombre : une soixantaine de personnes ont été embarquées, essentiellement des personnes en séjour illégal. C’est un premier pas. Il s’agissait de marquer les esprits, de montrer qu’on a reçu le message de la presse et de l’opinion et qu’on ne reste pas inactif. A ces stade on parle beaucoup de coordination, pas vraiment de nouveaux moyens ou d’approche réellement innovante. Comme si le dossier est en gare de triage, histoire de temporiser et d’éviter le déraillement.
Est-ce que cela va changer vraiment les choses à la gare du Midi ? Probablement pas. Le sentiment d’insécurité doit se combattre sur la durée. Il est évident que les personnes sans papiers reviendront dans quelques jours (la plupart d’entre eux ne seront pas expulsables). Si on veut changer le visage de la gare, il va falloir agir aussi sur la propreté, sur la toxicomanie et sur la santé mentale. Il y a, c’est vrai, des problèmes de délinquances spécifiques à la gare du Midi, qui, comme toutes les grandes gares d’Europe, attire la misère et les trafics. Mais il y a aussi une toile de fond générale qui concerne tout Bruxelles et même une grande partie de la Belgique : la montée en puissance du trafic de drogue et de la précarité.
Dans ce dossier, on a vu, lu ou entendu beaucoup d’échanges pour savoir qui est responsable de cette situation. On a pointé du doigt l’habituel morcellement des compétences sur le mode : “ce n’est pas moi, c’est l’autre”, la faute aux communes qui ne font pas le boulot, la faute à la région qui ne prend pas ses responsabilités en matière de sécurité ou la faute au fédéral qui n’investit pas assez.
Soyons objectifs. La première responsabilité incombe bien au fédéral, et, en particulier, à la police des chemins de fer si on parle de sécurité au sens strict (en tout cas à l’intérieur des gares). Et on ne peut pas reprocher aux bourgmestres de ne pas avoir tenté d’attirer l’attention sur l’urgence, tant à la gare du Midi qu’à la gare du Nord.
Cela n’exonère pas les communes et la région d’avoir une part de responsabilité. Aux abords de la gare notamment, qui n’est plus de la compétence directe de la police fédérale, mais des polices locales. Elle est également responsable en matière de prévention ou de propreté. Dans les compétences qui lui sont propres, le gouvernement régional a pu donner l’impression d’être aux abonnés absents ces derniers jours. Alors que le fédéral jouait de la trompette pour annoncer pas grand-chose au final, mais quand même donner l’impression qu’il prenait le dossier à bras-le-corps. Lorsqu’on est à 18 mois d’une élection, ce n’est probablement pas une bonne idée. Même si l’essentiel maintenant ne va plus être de faire de grandes déclarations, mais de résoudre les problèmes sur le long terme.
Fabrice Grosfilley