L’édito de Fabrice Grosfilley : chaud devant

Il va faire chaud. Très chaud. Trop chaud. Bruxelles, comme la quasi-totalité du pays, est placée en alerte orange par l’Institut royal météorologique. On s’attend pour aujourd’hui à des températures qui pourraient dépasser les 35 degrés. Même la nuit ne nous offre qu’un répit tout relatif, avec des températures qui ne descendent plus sous les 23 degrés. On appelle ça une vague de chaleur. Et cette fois, elle ne concerne pas que le sud de l’Europe. Elle s’installe chez nous.

Alors bien sûr, on vous dira de boire de l’eau, de rester à l’ombre, d’éviter les efforts. Des recommandations que vous avez sans doute déjà entendues mille fois, mais qui méritent d’être répétées. Parce que derrière cette chaleur, il y a des risques très concrets, très réels. Pour les personnes âgées, pour les bébés, pour les personnes isolées ou précaires. Pour tous ceux qui vivent dans des logements mal isolés, sans ventilation, et parfois sans accès à de l’eau fraîche. À Bruxelles, il fait en moyenne 3 degrés de plus qu’en dehors de la ville, et ces îlots de chaleur sont encore amplifiés dans les quartiers les plus densément peuplés.

Il faut le dire clairement : ces deux jours ne sont pas juste des journées d’été un peu plus chaudes que d’habitude. Ce sont des journées à risque. Pour les tout-petits, qui ne savent pas encore réguler leur température corporelle. Pour les aînés, dont l’organisme est plus fragile. Pour les sans-abris, dont l’accès à l’eau potable est déjà un combat quotidien. Pour eux, cette canicule n’a rien de plaisant, elle est une urgence sanitaire.

C’est aussi une occasion de rappeler que la vie en ville ne nous condamne pas à l’isolement. Que nous pouvons nous intéresser aux autres. Vous avez un voisin âgé ? Passez voir s’il va bien. Vous êtes parent d’un nourrisson ? Aérez sa chambre aux heures fraîches, donnez lui à boire plus souvent, oubliez les couvertures. Vous avez des enfants dans une plaine ou un camp ? Imposer le chapeau, le t-shirt, la crème solaire, ce n’est pas un caprice, c’est vital. Vous croisez une personne vulnérable ou à la rue ? Proposez de l’eau et prévenez les services d’urgence si nécessaire.

Mais la solidarité, ce n’est pas seulement une affaire individuelle. Lutter contre les vagues de chaleur à répétition, c’est aussi une problématique très politique. Un enjeu d’aménagement urbain. De planification. À Lyon ou à Paris, les villes publient des cartes de lieux frais : bibliothèques, églises, musées, parcs, fontaines… À Athènes, une application mobile permet de localiser ces refuges climatiques.

À Bruxelles ? On a quelques initiatives, quelques recensements, quelques idées. La commune de Woluwe-Saint-Lambert va fermer ses crèches cet après-midi. Celle de Woluwe-Saint-Pierre ouvre une pièce fraîcheur avec fauteuils et rafraîchissements dans le hall du centre culturel, à côté de la maison communale. Mais rien de systématique. Rien de généralisé. Rien qui permette de dire à chaque Bruxellois : « À moins de 500 mètres de chez vous, voilà un endroit où vous pourrez vous réfugier. »

Bien sûr, nous n’avons pas de gouvernement. Et lutter contre la chaleur ne sera peut-être pas perçu comme la première des priorités par les négociateurs qui finiront, peut-être, un jour ou l’autre, par se retrouver autour d’une table. Pourtant, ce travail ne doit pas être négligé. Prévoir des lieux d’accueil, négocier avec les commerçants, les institutions culturelles, les cultes, l’accès à leurs locaux. Ouvrir les parcs la nuit si besoin. Déployer des fontaines. Mettre en place des dispositifs mobiles pour rafraîchir l’espace public. Offrir des alternatives à la climatisation individuelle : tout cela doit être envisagé.

Et ça l’est d’ailleurs, dans certaines administrations à la Région ou dans les communes. Mais ça ne se sait pas assez. Parce que ce que nous vivons aujourd’hui, ce n’est pas un événement exceptionnel. C’est le nouveau normal. Les épisodes de chaleur extrême vont se multiplier. Et dans une ville comme Bruxelles, il faudra s’y préparer sérieusement.

Fabrice Grosfilley

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