Friche Josaphat : “Il faut repartir d’une page blanche, abandonner le PAD”

Le dossier de la friche Josaphat est de retour sur le devant de la scène politique bruxelloise et ravive les tensions entre Ecolo et PS. Alors que les Verts ont réaffirmé leur opposition à la construction de logements sur le terrain, il semblerait que les socialistes comptent bien avancer sur ce dossier, malgré le blocage au gouvernement bruxellois. Entre ces tensions politiques : les riverains et associations.

Pour rappel, un PAD (plan d’aménagement directeur) prévoit la construction de 509 logements sur une partie de la friche Josaphat, à cheval entre les communes de Schaerbeek et Evere. Le gouvernement bruxellois l’a approuvé en 1ère lecture en juillet 2021. Mais après l’enquête publique – qui a suscité beaucoup de réactions – le dossier bloque à nouveau entre les socialistes et les ecolos, alors que nous apprenions cette semaine que les OIP (organismes d’intérêt public) que sont Citydev, la SAU et la SRLB doivent choisir avant le 9 mars le consortium qui construira les logements.

“Deux positions problématiques”

Thyl Van Gyzegem de l’association Inter-Environnement Bruxelles était interrogé sur ce sujet ce mercredi au micro du 12h30. Selon lui, il faut bien comprendre les deux positions qui se jouent aujourd’hui.

La position du parti socialiste qui veut urbaniser une partie de la friche pose une série de problèmes. Démocratique d’abord, car elle repose sur un dialogue compétitif qui a été lancé avant même les enquêtes publiques sur le PAD, cela veut dire que l’on a bétonné avant même de les mettre en débat avec la population. Programmatique ensuite, car on veut construire 509 logements, mais seuls 50% sont publics. Or, aujourd’hui ce dont nous avons besoin, c’est du logement abordable et du logement social. Enfin, cela représente un problème au niveau de la biodiversité, car là où le parti socialiste entend construire, il s’agit d’une d’une des zones les plus intéressantes à ce niveau-là.

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En face, Thyl Van Gyzegem résume la position d’Ecolo et Groen comme tel : “construire la ville sur la ville et le vert sur le vert”. “Pour nous, cette position est aussi problématique tant au niveau régional qu’au niveau local“, explique-t-il. “Cela veut dire densifier la ville où elle est déjà dense. Principalement en première couronne, dans les quartiers déjà défavorisés, avec toutes les conséquences que cela implique et non pas densifier les quartiers de deuxième couronne qui sont des quartiers plus aisés avec des terrains disponibles. Cela revient donc à laisser un statu quo des inégalités, voire renforcer les inégalités existantes. Ce n’est pas une politique acceptable d’un point de vue de justice environnementale.” Cette position aurait également un impact sur les industries urbaines situées dans cette zone “dont nous avons besoin”, estime ce représentant.

“Repartir d’une page blanche”

Face à cette situation dualiste, Inter-Environnement Bruxelles demande de “repartir d’une page blanche, abandonner ce dialogue compétitif et d’abandonner le PAD“. “Plutôt que de mettre en concurrence différentes fonctions faibles que sont le logement social, les zones d’industrie en milieu urbain et la biodiversité, il faudrait voir comment repenser un programme qui met tout ça en valeur. On pourrait tout à fait imaginer de construire du logement social sur le pourtour de la friche et garder les principes de biodiversité intacts tout en construisant du logement de qualité social. Pour nous, c’est ça la solution.”

De son côté, le collectif “Sauvons la Friche Josaphat” – regroupant des naturalistes et passionnés de la nature – a également tenu à réagir à “la volonté du PS de passer en force”. “Il s’agit bien d’exécuter le PAD Josaphat avant son approbation, faisant fi de la participation citoyenne et de ses partenaires gouvernementaux, sans cadre urbanistique clair“, dénoncent-ils par voie de communiqué. “Nous ne pouvons qu’exprimer notre consternation et notre colère face à un tel déni de démocratie. Nous nous opposons fermement à ce passage en force et demandons au PS de revenir sur sa décision.

“On nous fait croire qu’il n’existe pas d’autres solutions que de détruire les derniers espaces verts de Bruxelles pour construire rapidement des logements abordables. C’est faux ! Sur le site Josaphat il est possible de construire sur la zone déjà urbanisée mais sous-exploitée du site. C’est ce que proposent le monde associatif et des collectifs citoyens dans le manifeste PlanB pour Josaphat depuis plus de 2 ans“, ajoutent-ils.

■ Une interview de Thyl Van Gyzegem, de l’association Inter-Environnement Bruxelles, au micro de Fanny Rochez et Vanessa Lhuillier dans le 12h30