Fête du travail : que retenir des discours politiques de ce 1er mai ?
Les traditionnels discours du premier mai sont prononcés ce dimanche.
En cette Fête du travail, les partis ont prononcé leurs traditionnels discours du premier mai. Que retenir des prises de parole de cette année ?
► Cet article sera complété à mesure des discours
Au PS, Ahmed Laaouej veut un blocage des prix et un accès gratuit à la médecine de première ligne
Le président de la Fédération bruxelloise du PS, Ahmed Laaouej, a plaidé dimanche pour l’instauration d’un bouclier social contre les effets de la crise observée dans les domaines de l’énergie et des denrées alimentaires. Celui-ci doit être assorti du maintien de l’indexation automatique des salaires et des allocations, d’une hausse des salaires, d’un blocage des prix et d’un accès gratuit à une médecine de première ligne.
“Nous vivons à nouveau une crise libérale. Les prix de l’énergie et des produits alimentaires flambent parce que l’on nous dit qu’il y a un problème d’offre et de demande sur le marché alors même qu’on apprend que les profits et surprofits de certaines multinationales de ces secteurs battent tous les records. Voilà ce qui se passe quand on laisse faire l’économie de marché, a dit le chef de file des socialistes bruxellois réunis dimanche, à Laeken, à l’occasion d’un rassemblement des militants organisé en action commune avec les représentants de la FGTB et des Mutualités socialistes à l’occasion de la Fête du travail.
M. Laaouej a rappelé que les socialistes avaient déposé une proposition de loi visant à bloquer les prix, au parlement. Il a également fait part du souhait du PS de taxer les “surprofits” pour les redistribuer à la population.
“Une médecine gratuite de première ligne est la base d’un dispositif qui doit être plus large, notamment pour réduire les délais d’attente pour un rendez-vous chez les spécialistes dans le cadre d’un trajet public de la médecine générale à la médecine spécialisée“, a-t-il ajouté. A ses yeux, comme les hôpitaux publics, cette médecine de première ligne doit être renforcée. Elle doit l’être à travers un maillage au plus près des gens pour avoir un premier rempart face à de grands problèmes de santé publique tels qu’une épidémie.
Au passage, le président des socialistes bruxellois a mis en doute la sincérité du discours social de certains écologistes dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique. “C’est pour ces raisons que nous voulons construire des logements sociaux dans les zones moins densément peuplées, comme au Chant des Cailles“, a-t-il dit, s’en prenant aux écologistes locaux qui tiennent un discours “social en façade, mais anti-social quand il s’agit de logements” chez eux. M. Laaouej demandé à la régionale bruxelloise d’Ecolo de prendre position dans ce dossier.
Il s’est par ailleurs demandé à quel jeu jouait le MR en voulant “faire croire que c’est en donnant une résonance et en banalisant l’extrême droite en l’élevant au rang d’interlocuteur que l’on va la faire reculer“.
Il n’a pas épargné non plus le président des socialistes flamands, Conner Rousseau, qui a récemment affirmé qu’il avait l’impression de ne pas être en Belgique lorsqu’il se déplaçait à Molenbeek. “Nous ne laisserons personne s’essuyer les pieds sur nous, sur l’autel de calculs électoraux médiocres. Que les choses soient claires: ton discours ne passera jamais avec nous“, a encore dit Ahmed Laaouej l’attention du président de Vooruit.
► Article | Conner Rousseau : “Quand je roule à Molenbeek, je ne me sens pas en Belgique” (26/04/2022)
Au MR, Georges-Louis Bouchez veut faire baisser la fiscalité sur le travail pour doper l’emploi
Le MR a plaidé dimanche à l’occasion de la fête du 1er Mai pour une baisse de la fiscalité sur le travail afin de stimuler le taux d’emploi, que le MR veut voir atteindre 80% d’ici 2030. “La Belgique étouffe sous la fiscalité!“, a dénoncé dimanche le président des libéraux francophones, Georges-Louis Bouchez, devant plusieurs centaines de mandataires et de militants libéraux réunis à Herstal (Liège), sur l’ancien site des usines des ACEC.
“Quand j’entends ceux qui veulent augmenter les taxes, je me demande s’ils savent réellement dans quel pays ils vivent“, a lancé le Montois en pointant les différences de taux d’imposition pratiqués entre la Belgique, la France ou l’Allemagne.
M. Bouchez a à nouveau repoussé les appels (de la gauche) à augmenter la fiscalité sur les hauts patrimoines. “Ne vous leurrez pas! La taxation de prétendus +riches+, c’est en réalité la taxation des classes moyennes! C’est la taxation de ceux qui, à force d’avoir travaillé toute leur vie, ont pu s’acheter un deuxième appartement, voire, sacrilège!, un troisième!“, a-t-il averti sous les applaudissements.
Après deux ans d’interruption pour cause de crise sanitaire, le MR renouait dimanche avec son habituelle fête du 1er Mai organisée cette fois, non plus à Jodoigne (Brabant wallon) comme le parti en avait souvent l’habitude, mais à Herstal, dans l’ancien bassin industriel liégeois acquis de longue date à la gauche. “En tant que formation politique, je pense que nous devons aller là où nous n’avons pas assez convaincu“, s’est justifié Georges-Louis Bouchez. “Ces territoires ont besoin de libéralisme. Les solutions libérales sont celles qui les sortiront de la précarité et des difficultés”, a-t-il assuré.
► Reportage | Dans les coulisses du discours du 1er mai au MR (01/05/2020)
Pour Ecolo, il faut protéger les ménages contre la vie chère
Ecolo a plaidé dimanche pour des mesures qui soulagent les ménages face au coût de la vie. Il réclame notamment une contribution des plus riches et une taxation des profits excessifs des entreprises.
Les Verts n’avaient pas organisé de meeting de 1er mai mais étaient présents à Liège, Charleroi et Bruxelles où ils avaient installé un stand dans le cadre de la Fête du travail organisée par les Mutualités socialistes et la FGTB au Mont des Arts.”On est dans une situation de crise et une grande partie de la population est en grande difficulté. Parfois, les factures de régularisation de consommation d’énergie représentent pas loin d’un mois de salaire. A situation exceptionnelle, il faut une réponse exceptionnelle. Notre proposition de contribution vise les 4-5% les plus riches pour une redistribution vers 95-96% de la population“, a expliqué le co-président d’Ecolo Jean-Marc Nollet.
La mesure est comparable à celle proposée par d’autres partis à gauche, soit un prélèvement d’1% ou 1,5% sur les patrimoines de plus d’un million d’euros. A droite, le MR y est opposé car, affirme-t-il, c’est la classe moyenne qui serait touchée. “Je me réjouis que le CD&V ait fait un pas dans cette direction et je ne comprends pas que le MR bloque alors que c’est une mesure qui va aider les classes moyennes. Le MR devient-il le parti qui protège les plus riches?” s’est demandé Jean-Marc Nollet.
Les revendications écologistes visent également à augmenter les salaires et les allocations sociales. Ecolo cible la loi de 1996 qui, telle qu’elle a été réformée en 2017, bloque une augmentation des salaires hors indexation. Là encore, les partis libéraux mais également le CD&V n’y sont pas favorables même si ce dernier n’exclut pas une approche secteur par secteur. “Il faut revenir à la loi de 1996 et supprimer celle de 2017, et permettre une négociation dans les secteurs. Là où il y a des moyens -les banques, les Gafa, l’énergie, etc.- il y a une marge de négociation. Il n’y a pas d’obligation. Je ne comprends pas pourquoi les libéraux s’opposent à la liberté de négocier“, a souligné M. Nollet.
Les Verts réclament encore une revalorisation des pensions, entre autres, en assimilant le temps partiel au temps plein pour prendre en compte la situation de nombreuses femmes, ou de faire reculer les inégalités de genre en particulier sur le plan salarial.
Au PTB, Raoul Hedebouw appelle aussi à un blocage des prix des biens de première nécessité
Le PTB a réclamé dimanche un blocage des prix des produits de première nécessité, comme la farine, le riz, les pâtes, le pain, la semoule, etc. ainsi que de celui du carburant. Il préconise la suppression des 60 centimes d’accises prélevés sur l’essence et le diesel afin d’en ramener le prix autour d’1,40 euro. Il a aussi fustigé le manque de réponse du gouvernement face à la flambée de certains prix.
Le coût de la vie a occupé une grande partie des interventions à l’occasion du 1er mai célébré cette année par le PTB place Anneessens à Bruxelles. “Nous vivons dans un des pays les plus riches du monde et aujourd’hui, il y a des travailleurs qui préfèrent dormir dans leur voiture pour économiser du carburant. Tout le monde vient me trouver pour me dire: Raoul, on a déjà connu des moments difficiles mais, là, on n’en peut vraiment plus. S’il ne se passe rien, on va plonger“, a expliqué le président, Raoul Hedebouw. “Et que fait le gouvernement? Il désigne un groupe d’experts. Des ministres qui gagnent 11.000 euros par mois vivent tellement dans leur bulle qu’ils ont besoin d’experts pour savoir ce qui se passe dans la vie des gens… Le blocage des prix, c’est la solution!”
Le parti communiste s’est par ailleurs réjoui de voir que de plus en plus de partis souscrivaient à l’idée d’une taxe sur les gros patrimoines, notamment le CD&V qui est représenté au gouvernement fédéral. Depuis longtemps, le PTB milite pour une “taxe des millionnaires”, là où d’autres partis de gauche parlent d’un impôt sur la fortune. “Le PTB pousse aujourd’hui l’ensemble des formations politique vers la gauche, même le CD&V de M. (Joachim) Coens. Beaucoup de choses ont l’air possible mais attention, avec nos propositions, pas de copyright, que du copyleft‘”, a lancé le président à l’occasion de la Fête du travail.
Chez Vooruit, Conner Rousseau s’en prend frontalement au Vlaams Belang
Le président de Vooruit, Conner Rousseau, s’en est pris dimanche frontalement au Vlaams Belang, accusant le parti d’extrême droite d’être un “loup déguisé en mouton“, une formation qui prétend défendre les travailleurs, mais “défend en réalité les intérêts des élites”.
Le président des socialistes flamands a, dans son discours tenu dans sa ville, Saint-Nicolas (Flandre orientale), évoqué des thèmes chers aux socialistes, comme la lutte pour la solidarité ou la défense de l’index. Mais il s’est aussi livré à une charge frontale contre le Vlaams Belang – dont le président, Tom Van Grieken, doit lui aussi prononcer un discours à l’occasion de la Fête du travail, dimanche après-midi, également à Saint-Nicolas. Le Vlaams Belang tente ainsi de “détourner” le 1er mai, qui est traditionnellement une fête socialiste. “Nous n’allons pas laisser cela se produire. Le 1er mai reste le nôtre“, a déclaré M. Rousseau.
Selon lui, le Vlaams Belang a voté contre l’augmentation des salaires minimums, contre une taxe équitable visant les multinationales alors que le parti veut économiser quatre milliards d’euros sur les soins de santé.
Pour M. Rousseau, la Hongrie du Premier ministre nationaliste Viktor Orban – le “petit ami de Poutine (le président russe Vladimir Poutine)” – montre les dangers d’une politique d’extrême droite. “Il n’y a pas un seul pays au monde, pas un seul pays dans l’histoire, où la prospérité et la liberté des gens ordinaires se sont améliorées lorsque les extrêmes sont au pouvoir. Aucun pays. Jamais“, a-t-il dit devant les militants socialistes.
Le président de Vooruit s’est déclaré conforté par la hausse de son parti dans les sondages et envisage les élections générales de 2024. “Ensemble, nous grandissons chaque jour en un immense mouvement progressiste qui battra les extrêmes en (20)24“, a-t-il indiqué.
Du côté des syndicats
FGTB et Mutualités Socialistes
Comme le président des Mutualités Socialistes, Jean-Pascal Labille, reprochant au ténor socialiste flamand de recourir à une communication de caniveau, la secrétaire générale de la FGTB de Bruxelles, Estelle Ceulemans, s’est montrée encore plus dure à l’égard du président de Vooruit. “Les propos tenus par Conner Rousseau ne sont pas seulement problématiques pour Molenbeek et les actions qui sont menées sur le terrain en faveur du vivre ensemble, ni parce qu’ils alimentent le Brussels bashing. Ils le sont parce qu’ils relèvent du racisme“, a-t-elle dit.
Estelle Ceulemans a promis un automne social chaud car après avoir largement soutenu le secteur économique face à la crise liée à la pandémie, il est temps, selon elle d’augmenter le soutien aux travailleurs. La FGTB continuera d’exiger la révision de la loi de 1996 qui fixe la marge salariale et bloque en l’état toute hausse significative des salaires, a-t-elle encore dit.
Belga – Photo : Belga