Décret sur le décrochage scolaire: “C’est du jamais-vu: il faut de l’humain, pas des procédures”
Le collectif “Faut l’dire”, regroupant une dizaine de directions de Centres psycho-médico-sociaux (CPMS) en Wallonie et à Bruxelles, se dit surpris et déçu de l’adoption du décret sur le décrochage scolaire par le Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles vendredi matin. Ce décret “avait reçu un avis défavorable de tous les pouvoirs organisateurs et syndicats et va à l’encontre des missions premières et des règles déontologiques de la majorité des services concernés par la réforme.” Explications avec Isabelle Moreau, invitée de Fabrice Grosfilley.
Le texte, voté aux petites heures vendredi matin, dans la foulée de la réforme du décret paysage, s’inscrit dans le cadre du Pacte pour un enseignement d’excellence qui a pour objectif de réduire de moitié le décrochage scolaire en Wallonie et à Bruxelles. Effectif dès 2025, le décret envisage notamment le recours à une nouvelle application informatique commune au sein de laquelle les absences non-justifiées seront encodées ainsi qu’une communication plus efficace avec les parents. Il réforme également le pilotage des services d’accrochage scolaire (SAS), lesquels bénéficieront de moyens budgétaires additionnels pour pouvoir renforcer leur pluridisciplinarité. Le texte a été approuvé par les élus PS, MR et Ecolo. Le PTB et Les Engagés se sont abstenus. “Le décret devrait permettre de s’attaquer réellement aux racines du décrochage. Il n’en est rien”, déplore le collectif qui regroupe des directions de CPMS du réseau libre et officiel.
“Le décret est essentiellement constitué de procédures administratives mises en place quand l’absence est avérée et donc, quand le décrochage a commencé”, déplore Sandra Conti, directrice du CPMS du réseau Wallonie Bruxelles Enseignement à Verviers. “Il n’y a pas de réflexion sur la cause, sur le mal-être des élèves, leur santé mentale.” Le collectif déplore, en outre, que le décret “oublie” que les CPMS offrent des services non contraignants aux jeunes en difficulté. Une fois mandaté par l’école pour piloter la situation des élèves, les Centres psycho-médico-sociaux ne seront en effet plus tenus de demander l’autorisation des parents dans le cadre d’un suivi. Une décision qui s’oppose également au principe d’indépendance entre les établissements scolaires et les CPMS, estime “Faut l’dire”.
“Faut l’dire” plaide de son côté pour un “véritable plan de lutte contre le décrochage scolaire”, comprenant des moyens financiers et humains supplémentaires. “Depuis quatre ans, les acteurs psycho-médico-sociaux crient l’urgence d’octroyer des moyens pour faire face aux problèmes de santé mentale des jeunes. Nous ne pouvons que constater, une fois de plus, que le terrain n’est pas entendu et que les jeunes ne sont pas une vraie priorité”, conclut le collectif. Les professionnels de l’aide à la jeunesse estiment ne plus être en mesure de faire face à la demande d’aide sur le terrain et sont confrontés à des situations où il est nécessaire de faire des choix entre les élèves à soutenir. Aucune action de grogne n’est pour le moment prévue au sein des CPMS.