Comment combattre la malpropreté ? Une enquête menée à Cureghem propose des pistes de solution
La malpropreté dans l’espace public suscite régulièrement le mécontentement des habitants. Une équipe pluridisciplinaire, menée par le chercheur en études urbaines Andrea Bortolotti, (ULB), a passé au crible une partie de la chaussée de Mons, dans le quartier de Cureghem, à Anderlecht, particulièrement concernée par l’accumulation de déchets. Objectif : tenter de comprendre l’origine du problème et proposer des solutions. Les enseignements de cette enquête de terrain sont à lire dans la dernière publication de la revue en ligne Brussels Studies.
Les rues de Cureghem sont confrontées à l’accumulation de déchets et de détritus. Le manque de propreté et d’entretien de l’espace public, s’il est l’un des principaux sujets de colère des habitants, est souvent attribué à un manque de civisme des citoyens et à un manque de volontarisme des autorités.
Ancien quartier ouvrier, Cureghem accueille une population dense, avec un taux de chômage des jeunes supérieur à la moyenne, des logements de petites tailles, et beaucoup de commerces. C’est une zone de passage, les habitants démangent souvent, ce qui limite le sentiment d’appartenance au quartier. Autant d’éléments qui peuvent favoriser la malpropreté, relève Andrea Bortolotti du Laboratoire Urbanisme, Infrastructures, Ecologies et Paysage (LOUISE-ULB), qui signe un article sur le sujet dans la revue en ligne Brussels Studies.
(Photo : Vital Marage/Brussels Studies)
Manque de place
Pour mieux comprendre l’origine de la saleté dans le quartier et tenter quelques pistes de solution, Andrea Bortolotti a mené avec une équipe de recherche pluridisciplinaire une enquête de terrain, pendant un an, entre novembre 2019 et décembre 2020. Elle s’est concentrée sur une zone très spécifique : un tronçon de la Chaussée de Mons, grande artère commerçante de la commune, entre la Porte d’Anderlecht et la station de métro Clémenceau. Les nombreux bars, restaurants, magasins de primeur, génèrent une quantité importante de déchets, qui s’accumulent surtout là où la densité de population et de commerces est la plus forte, ce qui ne permet pas toujours d’en déterminer l’origine (Commerçants ? Clients ? Habitants ?).
Pour la commune, c’est l’absence de contrat régulier entre les commerçants et Bruxelles Propreté pour le ramassage des déchets qui explique la situation. Ces contrats existent pourtant bel et bien, montrent les entretiens menés par l’équipe de recherche avec plusieurs commerçants, mais ils ne prévoient qu’un service de collecte deux fois par semaine. Insuffisant, sans doute, vu le manque de place pour entreposer les détritus en attendant le prochain ramassage. Conséquence : entre deux collectes, les déchets se retrouvent souvent dans des conteneurs roulant, abandonné sur le trottoir, ou sur l’espace public.
Autre problème : le défaut de tri. Côté commerçants, il est attribué à un manque de suivi, d’information et de communication, de la part de l’Agence Bruxelles Propreté. Celle-ci répond qu’il s’agit là d’une compétence de Bruxelles Environnement.
Au final, tout le monde se plaint du manque de propreté, à commencer par les commerçants eux-mêmes qui reprochent aux autorités publiques leur manque d’engagement.
(Photo : Vital Marage/Brussels Studies)
Des solutions existent
Au terme de son enquête, les chercheurs proposent deux pistes de réflexion.
D’abord, l’aménagement d’un point de collecte collectif, pour favoriser le tri sélectif et répondre au problème de manque de place. Autrement dit, un local de service aménagé en un point de collecte unique, dans un espace fermé et sécurisé. Cette solution déjà appliquée ailleurs a permis une collectivisation des contrats individuels avec Bruxelles Propreté, affirment les chercheurs.
L’équipe de recherche propose aussi de nommer un « gestionnaire de quartier », qui jouerait les intermédiaires entre citoyens et autorités publiques et prendrait en charge notamment les aspects de communication, sensibilisation, et information de la population, notamment les personnes de passage. Objectif : mieux répondre aux besoins et renforcer la participation des usagers à la gestion des déchets.
Mais ces propositions supposent un accord de la commune, avec un engagement financier. Aux autorités publiques, dès lors, de se positionner.
S.R.