Bruxelles-Propreté bientôt réformée : que contient le plan d’Alain Maron ?
L’agence Bruxelles-Propreté changera bientôt ses plans, avec des réformes notamment au niveau de sa direction générale, et des collectes.
On la savait gangrenée par de multiples problèmes structurels. Plusieurs audits externes y avaient notamment été menés, ce dernier mois, pour tenter de jeter les bases d’une agence mieux dans son temps. Bientôt, l’agence Bruxelles-Propreté, en charge de la gestion des déchets et de la propreté de la capitale, devrait être réformée, dans le cadre du plan de redéploiement UP!, présenté ce mercredi au Parlement bruxellois par Alain Maron (Ecolo), ministre bruxellois de la Propreté.
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Ce plan de redéploiement, il comprend sept grands objectifs, “un premier pas qui en appelle d’autre […] [pour] retrouver cette dynamique positive qui a tant manqué à Bruxelles-Propreté ces dernières années“, commente Alain Maron.
Un plan en sept points
Ainsi, le plan UP! entend revoir la gouvernance au sein de l’agence, en mettant fin aux nominations à vie. Désormais, ce système laisse la place à celui des mandats. Le directeur général actuel voit son contrat prendre fin, et il devra repostuler pour son poste, aux côtés de probables autres candidats, qui seront départagés par un jury indépendant, puis sélectionné par le gouvernement. “La direction générale aura un mandat de cinq ans. Elle sera évaluée à mi-parcours et après cinq ans. Elle ne pourra repostuler pour une deuxième période que si l’évaluation est positive“, indique le cabinet d’Alain Maron.
Second point : le bien-être et la sécurité des travailleurs, ainsi que “la diversité et la féminisation de son personnel, y compris dans les fonctions de management“. Le ministre souhaite également améliorer les résultats de la propreté urbaine, main dans la main avec les usagers, les communes et les autres partenariats, et notamment un balayage plus ciblé sur certaines zones, comme Flagey ou la Gare du Midi, selon nos confrères du Soir.
Le plan de redéploiement prévoit aussi une optimisation du système de collectes de service public. Si on est aujourd’hui à deux collectes par semaine pour les sacs blancs, et une pour les autres, Bruxelles Propreté doit désormais réfléchir à une optimisation, notamment au regard de la morphologie des quartiers. Impossible, à ce stade, de savoir si les collectes seront diminuées. Néanmoins, dans ce cadre, la Région ouvrira bientôt quatre nouveaux recyparks.
Cinquième point : les activités commerciales de l’agence. À côté de la collecte de service public, Bruxelles-Propreté a également des activités commerciales, auprès d’entreprises par exemple. “Le gouvernement s’est accordé en mars sur une note de réorganisation des activités commerciales de l’ABP. L’objectif est de garantir la soutenabilité et l’efficience de ces missions, exercées dans un cadre de concurrence, mais aussi d’améliorer la qualité de service et le fonctionnement“, explique le cabinet Maron.
Le ministre bruxellois de la Propreté souhaite aussi, via UP!, valoriser l’économie circulaire pour les déchets, comprenez transformer les déchets en ressources “pour réduire l’utilisation des ressources naturelles et réduire l’incinération, importante source d’émission de gaz à effet de serre à Bruxelles“. Dans ce cadre, Bruxelles Propreté devra réduire globalement son empreinte environnementale, ce qui constitue le septième point de ce plan de redéploiement.
Quant au fini-fini, système qui a fait couler beaucoup d’encre, rien n’est sûr pour l’instant. Pour rappel, cet acquis permet aux ouvriers de collecte, lorsque 2/3 des collectes du jour ont été effectuées, de rentrer chez eux avant l’heure. Le ministre souhaite un dialogue en interne à ce propos, puisque d’un côté ce système cause, selon lui, plus d’accidents de travail et un service de moins bonne qualité, mais que d’un autre côté, “il y a des limites : les agents portent beaucoup de poids et font beaucoup de kilomètres à pied, on ne peut pas faire ça huit heures par jour“, écrit-il dans le Soir.
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Les craintes des syndicats
Le plan du ministre a été présenté ce mardi aux travailleurs de l’agence. Du côté des syndicats, on reconnaît qu'”il était nécessaire de faire quelque chose pour l’agence, tout partenaire social en était conscient, car ici on mettait toujours des emplâtres sur des jambes de bois“. Néanmoins, il existe pour l’heure certains questionnements sur le plan présenté. On estime notamment que la disparition du principe de fini-fini “aura un impact négatif : il faut savoir qu’à l’heure actuelle, si les agents doivent respecter toutes les normes, les règlements de collecte, etc, ils ne finissent pas les tournées. Donc cela arrange quelque part cette direction qu’il y ait encore ce fini-fini“, explique Stéphane Vercauteren, “On n’est pas fermé à la discussion, le laisser totalement n’est pas faisable non plus, on peut le comprendre, mais il faut trouver un juste accord“.
La réforme des collectes, elle, est globalement mal accueillie. “En l’espace de quelques années, on a déjà eu plusieurs réformes des collectes, donc aussi bien pour les ouvriers que pour les citoyens c’est pénible. Le citoyen va de nouveau devoir changer ses habitudes. C’est mal accueilli, nous espérons que la direction aura pris le temps de réfléchir, qu’elle aura écouté l’avis des ouvriers qui sont le plus à même de dire ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas“, ajoute le syndicaliste.
Ils estiment également que certains objectifs sont irréalisables, comme celui de réduire l’empreinte environnementale. “Il faut savoir qu’aujourd’hui l’agence a un parc automobile de 830 véhicules à moteur thermique. Et les infrastructures sont très vétustes, donc je ne sais pas comment ils vont pouvoir atteindre cet objectif sans mettre un budget supplémentaire au sein de l’agence“, ajoute le secrétaire permanent.
Des mouvements de grève ne sont pas à exclure, selon lui, “connaissant le terrain, je peux vous dire qu’en 2017 il y avait déjà eu des mouvements de grogne… Ici aussi, car c’est un changement de cap radical […] Ca risque d’être mal accueilli“.
Interview de Stéphane Vercauteren, secrétaire permanent CSC
Viviane Teitelbaum : “Une agence du passé qui doit rentrer dans la modernité“
Ce mercredi matin, Alain Maron a présenté son plan UP! en commission Environnement du Parlement bruxellois. Au cours de cette présentation d’une heure, de nombreuses points ont été soulevés, notamment du côté de l’opposition.
Pour les députés libéraux francophones, qui demandaient depuis longtemps des changements au sein de l’agence, “on salue l’initiative du ministre, c’était important qu’il y ait cette reprise en main de l’agence, qu’on aille vers le changement, car les précédents gouvernements ne l’ont pas fait“, commente Viviane Teitelbaum (MR), députée bruxelloise, “c’est important aussi d’avoir les différents éléments indissociables qui déterminent la qualité du service public : la gouvernance, la gestion, le mode de financement, les procédés de collecte“.
Néanmoins, la députée souligne certains manquements, selon elle, notamment l’absence de communication quant à des innovations au sein du conseil d’administration et au contrat de gestion, ou encore que “par rapport au développement durable, on n’a pas, dans ce plan tel que présenté, parlé de l’agence de bio-méthanisation. Tout ce qui est bio-méthanisation part dans des camions vers Liège, et depuis qu’on a le nouveau sac bleu, ils partent vers Gand, donc en terme d’empreinte carbone l’agence est aujourd’hui dans le négatif. Améliorer et électrifier la flotte, oui, mais il faut aussi penser à moderniser et faire des investissements beaucoup plus durables“.
Interview de Viviane Teitelbaum, députée bruxelloise MR
Arnaud Bruckner – Photo : Belga (archives)