Attentats du 13-Novembre : tensions lors de l’interrogatoire de Salah Abdeslam, la défense quitte l’audience

Du “no comment” au “changez de métier!”, les réponses de Salah Abdeslam ont irrité mardi les parties civiles et provoqué de vives tensions dans la salle d’audience. Le président de la cour d’assise spéciale de Paris a décidé de suspendre les débats, en espérant retrouver du calme le lendemain. 

Il est environ 18h quand une nuée de robes noires se lève d’un coup: les avocats de la défense quittent la salle. “La sérénité des débats est compromise“, justifie l’un des avocats de Salah Abdeslam, Me Olivia Ronen.

Elle venait de demander, en vain, que la série d’incidents qui avait causé une première interruption d’audience soit formellement actée. Au fil de plusieurs heures d’interrogatoire de son client, des questions parfois agressives des parties civiles, des évitements puis des réponses de plus en plus provocantes de l’accusé, l’ambiance s’est chargée d’électricité.

Salah Abdeslam est le seul membre encore en vie des commandos qui ont mené les attentats ayant fait 130 morts à Paris et à Saint-Denis, en banlieue, le 13 novembre 2015. Me Sylvie Topaloff, avocate de parties civiles, juge par exemple étrange que Salah Abdeslam ne reconnaisse pas les allers-retours pour récupérer des membres de la cellule djihadiste en Europe: les kamikazes.

Salah Abdeslam reconnait deux voyages

La location des voitures, Salah Abdeslam ne les nie pas. Avec aisance, parfois à la limite de l’insolence, il reconnaît uniquement deux allers-retours (sur les cinq qui lui sont imputés) pour aller chercher des “frères en islam“. “Ils vivaient en zone de guerre“, justifie-t-il, un peu comme avec “aujourd’hui la guerre en Ukraine“.

Mais concernant l’identité des voyageurs, Salah Abdeslam ne dit rien. “Je ne balance pas“, répond-il. Aux questions précises de la cour, l’accusé répond par des “no comment” obstinés et répète qu’il ne savait rien de la “mission” de ceux qu’il allait chercher.

“Vous avez accouché?”

C’est une façon de réduire votre implication. Il ne sera pas dit que vous êtes allé chercher des gens qui se sont fait sauter dans les attentats”, lance-t-elle. Silence. “Vous avez accouché?“, lâche Salah Abdeslam.

Le président s’insurge, l’accusé invective l’avocate: “Ce que vous dites là, si ça rentre dans la tête de la cour, je suis dans la merde!“. Me Topaloff crie à son tour, brouhaha général. Dans la salle, les applaudissements ironiques fusent. “130 morts!“, hurle une partie civile.

Le président de la cour d’assises spéciale de Paris, Jean-Louis Périès, demande à l’accusé de “redescendre un peu“.

Micro coupé

Plus tard, nouvelle question offensive d’avocats des parties civiles. La défense s’époumone pour réclamer le micro qui reste coupé. Nouvelle clameur collective. Le président a suspendu l’audience.

A la reprise, vingt minutes plus tard, Jean-Louis Périès tente de calmer le jeu et rappelle que les manifestations du public “ne sont pas admissibles“. Pas assez, cependant, pour contenter la défense.

La tension monte. Salab Abdeslam continue: “Aujourd’hui, vous m’avez bousillé ma vie, la France, son gouvernement“. L’assesseure le coupe: ce ne sont pas “les réponses qu’attendent les parties civiles“. Une réponse qui n’a pas plus à la défense de l’accusé. Le but du procès, “c’est la manifestation de la vérité“, rétorque un de ses avocats.

Tous les avocats de la défense ont fini par se lever et quitter la salle. Le président a donc préféré suspendre l’audience. Elle a repris ce mercredi aux alentours de 13h.

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Rédaction avec Belga