Attentats de Bruxelles : Salah Abdeslam affirme avoir été frappé durant son transfert
Les premiers devoirs d’enquête à la suite de l’attentat dans la station de métro Maelbeek du 22 mars 2016 seront présentés ce mercredi devant la cour d’assises de Bruxelles.
Les enquêteurs expliqueront notamment l’analyse des vidéos Stib et l’identification du kamikaze et d’un suspect en fuite. L’après-midi devrait être consacrée a la découverte de la planque avenue des Casernes.
10h00 – Salah Abdeslam affirme avoir été frappé
Me Delphine Paci a pris la parole à l’ouverture de l’audience pour dénoncer des violences policières durant le transfert de son client, Salah Abdeslam, depuis la prison de Haren.
Salah Abdeslam a indiqué à la cour avoir été tenu par trois policiers et avoir reçu un coup de poing au visage de la part d’un policier qui procédait à sa fouille à nu. “M. Abdeslam a été frappé à la lèvre. Ce n’est plus possible!“, a lancé la pénaliste. “On a un souci de violence majeur avec les personnes encagoulées dans le box“, en référence aux policiers qui encadrent les accusés dans la cour d’assises.
Le procureur fédéral Bernard Michel a pour sa part expliqué s’être adressé à l’accusé pour lui demander s’il allait bien. “Il a dit oui et je n’ai pas constaté de traces.” Ce à quoi la défense a répondu que son client présentait une blessure à l’intérieur de la bouche, qui n’était donc pas visible. Salah Abdeslam s’est ensuite excusé auprès des victimes, qui ne sont “pas venues ici pour entendre ce genre de choses, mais il faut les dire“. “Je n’ai d’abord pas voulu aborder cet incident par pudeur, pour ne pas interrompre l’audience et par respect pour les victimes.” Mais “les incidents ne cessent de se répéter, si ce n’est pas avec moi c’est avec un autre.“
Nouveaux incidents au procès du #22mars. Abdeslam dit avoir reçu un coup de poing d'un policier, la discussion est tendue entre son avocate et le procureur, El Haddad Asufi s'emporte aussi. Il parle de "clés de bras"…
— Gaelle Ponselet (@GPonselet) January 18, 2023
11h30 – Première photo du kamikaze de Maelbeek le 22 mars à 21h28
Le premier chef d’enquête désigné pour investiguer sur l’attentat à Maelbeek a raconté, mercredi matin, que la première photo de Khalid El Bakraoui, kamikaze de Maelbeek, lui était parvenue à 21h28, le 22 mars. L’image a été extraite des caméras de vidéo-surveillance de la station de métro, que le chef d’enquête avait demandé à la Stib de “bloquer” dès 10h50, pour la période de temps entre 07h00 et 09h00.
“A 21h28, voici la première photo du suspect qu’on me montre“, a exposé le chef d’enquête, indiquant une image projetée sur le grand écran de la salle d’audience. Le témoin a ensuite précisé qu’il n’apprendra que plus tard qu’il s’agit de Khalid El Bakraoui. La photo est un arrêt sur image provenant des enregistrements vidéos de la station Maelbeek.
Pourquoi cet individu, dont on ne connaît pas encore l’identité, est-il suspecté à ce moment-là? “Parce que l’on voit que, quelques minutes avant l’explosion, il sort de la troisième voiture de la rame de métro, à 09h09, pour s’engouffrer directement dans la deuxième“, a expliqué le policier. “Mais également parce qu’il porte un sac à dos visiblement lourd et parce que son visage correspond à la tête d’un homme qui a été découverte sur le quai, près d’une poubelle“, a-t-il ajouté. “On se dit alors qu’on a peut-être à faire à un kamikaze.”
Khalid El Bakraoui a été identifié dès le lendemain des attentats en début de nuit, grâce aux empreintes digitales des restes de son corps.
13h00 – Le périple de Khalid El Bakraoui et l’explosion
Le matin des attentats, le périple de Khalid El Bakraoui dans le métro débute à 08h48 à la station Pétillon, sur la ligne 5. Les images des caméras de surveillance le montrent en train d’acheter un ticket. Il discute brièvement avec un inconnu devant les automates. Il franchit ensuite les portiques et embarque dans une rame en direction de Hermann-Debroux, dans le sens inverse de Maelbeek.
Arrivé à Hankar, la station suivante, il sort de la rame, avance sur le quai et s’engouffre à nouveau dans le véhicule par une autre porte. Un geste étrange puisque, pour avancer dans la rame, il lui aurait suffi de se déplacer à l’intérieur, le métro étant de type “boa”, soit non compartimenté.
“Nous n’avons pas de réponse définitive quant à ce geste, qui reste inexplicable. Peut-être Khalid El Bakraoui se rend-il compte à ce moment-là qu’il va dans la mauvaise direction“, a avancé le juge d’instruction Olivier Leroux. Le trajet du kamikaze se poursuit jusqu’à la Beaulieu, qu’il quitte à 08h56 avant de réapparaître une minute plus tard sur les images de vidéo-surveillance de la station.
L’homme prend alors la ligne vers Érasme, et donc Maelbeek. Les images dévoilent ensuite Khalid El Bakraoui pénétrant dans la 3e voiture de la rame de métro. Ce modèle est, lui, compartimenté. Le kamikaze passera tout le trajet debout au même endroit, réajustant les sangles de son sac à dos. “C’est une indication sur le poids important de ce sac“, a commenté l’enquêteur.
Une fois arrivé à Maelbeek, le kamikaze sort de la 3e voiture pour rentrer dans la 2e. Il veut pénétrer dans la voiture par la première porte, se ravise et entre finalement par la deuxième. Il se fera exploser à 09h10 dans la 2e voiture lors du redémarrage de la rame, tuant 16 personnes et en blessant de nombreuses autres. “Ce sont les dernières images” du trajet.
“Nous avons compté le nombre de passagers dans chaque voiture: il y en avait 55 dans la troisième et environ 70 dans la deuxième. Mais je ne m’avancerai pas sur la raison qui a poussé Khalid El Bakraoui à passer de l’une à l’autre”, a déclaré le chef d’enquête. “Cette rame de métro étant compartimentée, il lui était impossible de voir le nombre de personnes dans les autres voitures“, a souligné le juge d’instruction Olivier Leroux.
14h00 – Découverte d’un second suspect
Les enquêteurs poursuivent leur récit. Les images de vidéo de surveillance ont donc permis d’identifier le kamikaze mais également un deuxième suspect.
Les policiers se concentrent sur une séquence filmée à la station de métro Pétillon. El Bakraoui est vu en train d’acheter un ticket et de discuter avec un inconnu. Cet homme sera identifié plus tard comme étant l’accusé Osama Krayem. “Sur les images, on distingue que cet homme porte le même sac de marque Karrimor – un sac de randonnée de grand volume – que Khalid El Bakraoui. Ils ont une très courte discussion et l’on voit cet homme regarder Khalid El Bakraoui entrer. Il part, puis se retourne encore une fois pour regarder Khalid El Bakraoui, et disparait définitivement à 08h49“, a détaillé le premier chef d’enquête.
Les policiers sont alors inquiets, car ils pensent que cet homme pourrait être un second kamikaze. “Ce sac est toujours dans la nature et il peut contenir du matériel explosif. On va alors se demander où l’on peut acheter ce sac et il apparaît qu’il ne pouvait provenir que de chez Sports Direct. En 2016, il y a trois magasins de cette enseigne en région bruxelloise : à Anderlecht, Drogenbos et à la galerie commerciale City 2 dans le centre de Bruxelles. On commence par celui du City 2, tout simplement parce que c’est le plus proche de nos bureaux. Ce sera le bon“, a relaté la cheffe d’enquête.
Les policiers vont alors découvrir que deux sacs qui correspondent au signalement y ont été achetés la veille des attentats, le 21 mars, à 16h53. Ils obtiennent les images de l’acheteur, qui sera identifié plus tard comme étant Osama Krayem. Et ils vont tenter de retracer son trajet.
> Notre dossier sur les attentats de Bruxelles
avec Belga/Dessin Belga