Supprimer l’indexation automatique des salaires rendra la Belgique plus forte, selon la FEB
La Fédération des entreprises de Belgique a présenté son mémorandum électoral en vue des différents scrutins prévus en 2024. L’objectif est de rendre le pays “plus fort” et de le ramener dans le peloton de tête européen grâce à un plan global et holistique de mesures, regroupées en dix priorités. Parmi celles-ci figure notamment la suppression de l’indexation automatique des salaires et de la norme salariale.
Cette proposition n’est pas neuve dans le chef de la FEB, qui l’avait déjà formulée l’an dernier encore. Son plan face aux coûts salariaux, à l’indexation et au problème de la compétitivité de l’économie belge consiste en trois étapes d’ici, donc, à 2030. Il s’agit d’abord de réduire les cotisations patronales à l’Office national de sécurité sociale (ONSS) de 25% à 20%. Une fois que l’handicap salarial absolu aura été éliminé, la loi sur la norme salariale de 1996, qui fixe l’évolution des salaires, et toutes les conventions collectives de travail sectorielles prévoyant une indexation pourront être abrogées, préconise la Fédération.
La Belgique pourra alors basculer vers un système dans lequel les négociations salariales et sur les conditions de travail se déroulent librement, comme dans les autres pays, sur les plans interprofessionnel, sectoriel et d’entreprise, espère-t-elle. À ses yeux, la Belgique est actuellement toujours en avance en matière d’adaptation des salaires à l’inflation, ce qui est “néfaste” pour la compétitivité. Le système salarial doit plutôt davantage suivre la conjoncture, comme cela se fait à l’étranger, avec des adaptations des salaires qui se font graduellement, estime la Fédération. L’administrateur délégué de la FEB, Pieter Timmermans, a justifié cette proposition de supprimer l’indexation automatique des salaires en prenant l’image d’un iceberg, dont il voit des fissures dans la partie immergée.
Reboot ou crash
La croissance économique de la Belgique est bonne, et même meilleure qu’ailleurs, l’inflation est en baisse (“mais on oublie souvent l’inflation sous-jacente”), a-t-il reconnu. “Mais il y a tout ce qu’on ne voit pas de l’iceberg. Et, un jour, on aura vraiment un problème”, a-t-il prévenu. Le patron de la FEB constate ainsi que, tous les 10 à 15 ans, une intervention politique est nécessaire face à la situation économique de la Belgique, à l’image du saut d’index décidé par le gouvernement Michel en 2015. Le handicap salarial de la Belgique par rapport aux pays voisins était alors de 16% en 2014. Il était retombé, pour désormais à nouveau avoisiner les 15%.
“On peut reporter le problème ad vitam aeternam. Mais, moi, je veux à tout prix éviter que les marchés financiers prennent la Belgique dans leur collimateur. Si l’Italie devait y passer, après ce serait nous. Et une intervention des marchés, ce serait la pire des choses. Tout le monde en serait la victime”, prévient-il. Parmi les fissures dans la base de l’iceberg, Pieter Timmermans a notamment cité une balance commerciale du pays qui diminue, des entreprises qui investissent davantage à l’étranger qu’en Belgique ou encore des investissements d’entreprises qu’il perçoit comme plus compliqués qu’il y a un an. Les syndicats n’ont jamais caché leur opposition à une telle suppression de l’indexation automatique, tout comme certains partis politiques, dont le PS, actuellement le principal parti francophone au niveau fédéral.
“Énième provocation du patronat”
Pas de quoi effrayer la FEB, qui n’entend pas aujourd’hui discuter de la difficulté politique d’une proposition ou l’autre mais qui insiste plutôt sur la globalité de son plan, qui se veut holistique, et de ses objectifs à l’horizon 2030. “Il y a des bugs dans notre système”, a illustré le patron de la FEB. “Soit on fait un reboot et on le redémarre, soit on ne le fait pas et le système se crashe.”
La proposition de la FEB concernant l’indexation automatique des salaires est “indécente” et économiquement contre-productive, a affirmé lundi le chef du groupe PS à la Chambre, Ahmed Laaouej, à l’agence Belga. “Je tiens à fustiger cette énième provocation du patronat par rapport au pouvoir d’achat des ménages, en particulier des plus faibles. La FEB revient avec son discours archaïque sur cette question”, a réagi lundi après-midi le chef de file socialiste à la Chambre. “À entendre la Fédération des Entreprises de Belgique, il faudrait donc diminuer la demande intérieure en plus de prendre une mesure injuste socialement, alors que la Banque nationale et le Bureau du Plan ont salué l’impact économique du maintien de l’indexation des salaires dans le contexte de la crise”, a-t-il ajouté. Selon Ahmed Laaouej, l’indexation salariale a certes des conséquences sur les finances publiques, mais il existe des moyens de les compenser par de nouvelles recettes fiscales sans porter atteinte à l’économie. “Mais bizarrement, la FEB s’oppose à toute mesure de justice fiscale”, a-t-il encore dit.
Belga – photo : Belga