Marche, transports publics et voiture : les Bruxellois bougent “à parts presque égales”
Dans la capitale belge, les habitudes de déplacement continuent d’évoluer lentement mais de manière significative. Selon le dernier panorama socio-économique 2025 publié par l’Institut Bruxellois de Statistique et d’Analyse (IBSA), les Bruxellois répartissent désormais leurs déplacements à parts presque égales entre la marche, la voiture et les transports publics.
■ Explications de Bryan Mommart
En 2024, 31,1 % des déplacements étaient réalisés à pied, 8,5 % à vélo, 29,1 % en voiture et 29,0 % en transports publics. À ces chiffres s’ajoutent de petites parts modales pour les cyclomoteurs, motos, taxis ou trottinettes. L’IBSA insiste toutefois sur la prudence : les comparaisons avec l’enquête de 2022 sont limitées par des changements méthodologiques, en particulier pour le recensement des trajets très courts, qui sont en grande partie réalisés à pied. Le léger recul apparent de la marche et la progression de la voiture entre 2022 et 2024 doivent donc être interprétés avec prudence.
La marche, un pilier du quotidien bruxellois
À Bruxelles, marcher reste le réflexe de déplacement le plus ancré. Près des deux tiers des habitants (64 %) se déplacent à pied chaque jour, et près de neuf sur dix (88 %) au moins une fois par semaine. Sur les trajets de moins d’un kilomètre, la marche domine très largement : 83 % des déplacements y sont effectués à pied, contre 43 % pour ceux compris entre un et deux kilomètres. Le piéton est également incontournable dans les trajets combinés : 87,2 % des usagers marchent avant d’emprunter un autre moyen de transport, et 86,5 % à leur arrivée.
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Mais cette pratique massive souligne aussi un enjeu majeur : l’accessibilité. Sur les quelque 2.200 arrêts de surface de la STIB, seuls 20 % sont aujourd’hui accessibles à tous les publics, soit 400 arrêts de bus (25 %) et 60 arrêts de tram (10 %). Quant au réseau des “magistrales piétonnes”, destiné à relier les principaux pôles d’activité, il reste en construction : 3,1 km ont été réalisés sur les 16,1 km prévus, dont 3,1 km doivent encore être améliorés et 9,9 km entièrement aménagés.
Le boom des vélos partagés… Sauf les Villo!
Le vélo s’impose peu à peu dans le paysage urbain bruxellois, représentant aujourd’hui 8,5 % des déplacements internes à la région. Si cette part modale reste stable depuis 2022, les pratiques, elles, se diversifient. Plus d’un tiers des habitants (36 %) enfourchent un vélo au moins une fois par mois, 22 % le font chaque semaine, et 9 % quotidiennement. La moitié des ménages dispose d’au moins un vélo pour adulte.
Les vélos électriques sont présent dans 13% des ménages bruxellois. Les vélos-cargos, en plein essor, représente désormais 14 % du parc cyclable des Bruxellois. Côté infrastructures, le réseau cyclable régional s’étend sur 565 kilomètres, dont 38 % respectent les standards de qualité, 27 % nécessitent des améliorations et 35 % restent à construire.
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Du côté des services partagés, les tendances s’inversent. Le système Villo!, basé sur des stations fixes, poursuit sa baisse entamée en 2018 : les locations ont chuté de 40 % sur la période 2018-2024. L’année passée, l’opérateur a enregistré en moyenne 2.565 trajets quotidiens pour une flotte de 3.828 vélos, soit une nouvelle baisse de 3,5 % sur un an.
En revanche, les vélos électriques en libre-service connaissent une véritable explosion. En 2024, ils totalisent 5 422 trajets par jour en moyenne, soit une hausse spectaculaire de 61,1 % par rapport à 2023, pour une flotte de 3 698 vélos.
Trottinettes électriques : usage régulé mais toujours important
Malgré un encadrement plus strict, les trottinettes électriques en libre-service continuent de séduire les Bruxellois. Depuis février 2024, la Région a durci la réglementation : seuls deux opérateurs sont désormais autorisés à exploiter une flotte maximale de 8 000 engins, et le stationnement est limité aux “drop zones” dédiées.
Cette régulation a entraîné un recul de l’usage, sans pour autant freiner l’attrait du service. En 2024, les trottinettes ont enregistré en moyenne 24.789 trajets quotidiens, pour 13.528 engins disponibles. Un volume d’utilisation qui reste supérieur à celui des vélos partagés traditionnels.
Bruxelles comptait, en mars 2025, 2.082 drop zones actives.
La Stib retrouve presque le niveau de fréquentation d’avant-Covid
Après plusieurs années de reprise progressive, la Stib retrouve des chiffres de fréquentation proches de ceux d’avant la pandémie. En 2024, 402 millions de voyages ont été enregistrés, soit une hausse de 7 % par rapport à 2023, et un niveau qui se rapproche du record de 433 millions de trajets en 2019.
La dynamique n’est toutefois pas uniforme selon les modes. Le bus affiche la meilleure progression, avec une fréquentation supérieure de 11 % depuis la reprise post-Covid. À l’inverse, le tram reste en retrait (-8 %) et le métro accuse encore une baisse plus marquée (-15 %).
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Sur le plan de l’offre, la Stib a doublé sa capacité depuis 2004, mesurée en places-kilomètres. Cette évolution s’explique par l’introduction de véhicules plus spacieux et par une augmentation des fréquences sur les lignes les plus fréquentées. Mais des points de tension subsistent : certains terminus et tronçons communs demeurent saturés, tandis que la vitesse commerciale reste stable : 15,8 km/h pour le bus, 16,2 km/h pour le tram et 27,9 km/h pour le métro.
La voiture : un usage stable, mais un recul dans l’équipement des ménages
La voiture conserve une place importante dans les déplacements des Bruxellois, représentant 29,1 % des trajets, qu’ils soient intra- ou extrarégionaux. Toutefois, la tendance de fond reste au recul de l’équipement : en 2024, seuls 43,6 % des ménages disposent d’au moins un véhicule, contre 48,3 % en 2017. En parallèle, les voitures de société poursuivent une légère progression, concernant désormais 8,6 % des ménages.
Si l’usage individuel se stabilise, l’autopartage connaît une croissance importante. Les services en flotte libre, exploités par deux opérateurs en 2024, totalisent 94.143 membres et 4.751 réservations quotidiennes, contre seulement 22.512 membres et 482 réservations trois ans plus tôt.
Embouteillages et stationnement : des défis toujours bien présents
La circulation bruxelloise reste sous tension, notamment aux heures de pointe. En 2024, les automobilistes enregistrent un retard moyen de 2,73 minutes pour 10 minutes de trajet le soir, soit une hausse de 9 % par rapport à 2022.
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Parallèlement, le nombre de places de stationnement en voirie poursuit une légère baisse, accentuée par la diminution marquée des zones non réglementées. Hors voirie, Bruxelles dispose d’environ 620.500 emplacements, dont près de la moitié sont réservés à un usage résidentiel. Un équilibre délicat à maintenir, entre besoins des habitants, réaffectation de l’espace public et politiques de mobilité durable.
B.M.





