L’édito de de Fabrice Grosfilley : bras de fer sur le budget

Retenir son souffle. Guetter les signes. Décoder les petites phrases sibyllines. Analyser ce qui se cache derrière les postures. Ce mardi matin, les observateurs de la vie politique bruxelloise sont dans l’attente.

Dans l’attente d’une réunion qui, d’après nos informations, devrait rassembler aujourd’hui les états-majors bruxellois du MR, du PS et des Engagés. Une réunion à trois, entre francophones donc, qui serait un préalable à une réunion à six avec les partis néerlandophones, dans le but de lancer cette fameuse négociation sur le budget. À défaut de pouvoir aboutir à un gouvernement de plein exercice, l’idée est désormais de confectionner un budget pour l’année prochaine, afin de sortir enfin de ce système des douzièmes provisoires qui fait fonctionner la Région au ralenti, empêche les projets d’avancer et n’arrange rien sur le plan budgétaire.

Pourquoi négocier un budget et pas un gouvernement, me demanderez vous ? Parce qu’un budget peut être adopté à la majorité simple, alors que l’installation d’un gouvernement doit bénéficier d’une double majorité, dans le collège francophone et dans le collège néerlandophone du parlement bruxellois. MR-PS-Engagés totalisent à eux seuls 45 sièges. Ils atteignent tout juste cette majorité simple. Si on ajoute Groen, Vooruit et le CD&V, les partis néerlandophones concernés par cette négociation à six, on arrive à 52 députés.

La majorité pour le budget, donc, numériquement, elle existe. Reste maintenant à trouver la volonté de la concrétiser. PS et Engagés s’y sont ouvertement dits favorables. Groen, Vooruit et le CD&V sont également prêts à y participer. Reste le Mouvement réformateur qui, depuis quelques semaines, souffle le chaud et le froid sur la question. Lundi dernier, à mon micro, David Leisterh y était ouvert le matin, puis il faisait machine arrière en soirée. On sent les libéraux mal à l’aise sur la question. Le MR tergiverse et rechigne à entrer dans ce schéma auquel ni l’Open VLD ni la N-VA ne participent. Crainte affichée des dirigeants libéraux : que la coalition qui se dessine ne soit trop au centre-gauche, et qu’ils ne puissent pas suffisamment imprimer leur marque.

Pour rappel, le MR, avec 20 sièges, est incontestablement le premier parti et a donc les moyens de peser dans cette négociation. Il ne doit toutefois pas perdre de vue qu’avec 17 sièges, le PS n’est pas devenu un petit partenaire, et que, globalement, le Parlement bruxellois penche plus à gauche qu’à droite. Mathématiquement, d’autres majorités, plus à gauche encore, sont également possibles. Concilier les intérêts des uns et des autres, c’est l’exercice habituel de ce genre de négociation : il faut trouver le bon point d’équilibre entre les recettes libérales et les lignes rouges des différents partenaires. Dans ce bras de fer, Yvan Verougstraete se retrouve donc en position d’arbitre.

Hier, en prélude à cette réunion à trois, le MR a fait monter la pression avec un communiqué qui évoquait à la fois la discussion sur la dernière tranche des douzièmes provisoires, dont on débat cette semaine au parlement bruxellois, et la direction à prendre pour 2026. « La reprise en main du budget est une nécessité absolue », disait ce communiqué qui demandait qu’on adresse un signal clair pour l’année à venir. L’appel libéral est donc lancé. On verra dans les prochaines heures si la réponse des partenaires potentiels correspond aux attentes des réformateurs ou si les visions budgétaires sont inconciliables.

Les libéraux francophones ont malgré tout une marge de manœuvre limitée aujourd’hui. Refuser d’entrer dans une négociation budgétaire déjà souhaitée par cinq autres formations politiques, c’est prendre le risque de récupérer le « valet noir » et d’être tenu pour responsable d’un nouveau blocage. Cela alors que les autres options (avec la N-VA et l’Open VLD) semblent aujourd’hui définitivement écartées. La réunion programmée hier soir par Frédéric De Gucht a d’ailleurs été annulée in extremis, faute de participants.

Fabrice Grosfilley 

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