Enquête ouverte après l’intervention violente d’agents Securail: “Les trois victimes sont complètement traumatisées”

Le parquet de Bruxelles a ouvert une enquête à la suite d’un incident survenu le 8 août en gare de Bruxelles-Nord, au cours duquel des agents de Securail auraient violemment maîtrisé une femme. De nouvelles plaintes sont annoncées.

Des images diffusées sur les réseaux sociaux montrent une femme maintenue au sol par plusieurs agents. Selon le parquet, des coups auraient été portés tant par l’un des agents de Securail que par l’autre personne impliquée dans l’incident. Une vidéo plus longue de l’incident est à voir ci-dessus.

“On va demander que le PV pour rébellion soit classée sans suite. Elle n’a donné aucun coup“, nous précise l’avocate des plaignantes, Selma Benkhelifa. “Les trois victimes sont complètement traumatisées. La dame était parfaitement en ordre et a subi cette agression illégitime et injustifiée, qu’elle ne comprend pas jusque maintenant“.

Rémy Rucquoi a rencontré l’avocate de la famille:

 

La circonstance aggravante de motivation raciste sera ajoutée

De nouvelles plaintes vont être formulées par Grace T., la victime d’une intervention violente de Securail le 8 août à la gare de Bruxelles-Nord, en complément de celle déposée vendredi pour coups et blessures visant l’agent de Securail, a annoncé son avocate,. Cette dernière précise qu’elles viseront également un deuxième agent présent et le contrôleur du train dont des propos racistes auraient alimenté l’agressivité des agents. La circonstance aggravante de motivation raciste sera ajoutée. La plainte d’une deuxième femme, rentrée en Norvège, est encore en cours d’acheminement.

L’avocate réclame aussi une médiation avec la SNCB pour clarifier les faits et demander la mise en place de formations de prévention contre le racisme et la violence. Brenda Odimba, porte-parole du collectif citoyen de soutien aux victimes, insiste sur la nécessité de protéger Grace T. face à la médiatisation de l’affaire et au traumatisme psychologique subi. La victime n’a pas pu participer à la conférence de presse organisée mercredi, ayant fait une crise d’angoisse avant d’intervenir. Elle reste profondément affectée par ce qu’elle a vécu et par la diffusion de contenus haineux sur les réseaux sociaux.

C’est donc son avocate qui a relaté la version de sa cliente concernant l’incident. Le 8 août à 14h01, Grace T. et sa sœur, accompagnées de leur nièce, ont pris le train à Vilvorde. Le distributeur de billets étant hors service, elles ont photographié l’appareil et informé le contrôleur de leur intention d’acheter les tickets à bord. Celui-ci aurait répondu : “C’est toujours comme cela avec des gens comme vous“, “premier contact à caractère raciste“, insiste l’avocate. Finalement, elles ont acheté les tickets en ligne. Grace T. disposait également d’un abonnement annuel valide.

Passeports et titres de séjour

À la gare de Bruxelles-Nord, trois agents de Securail sont montés à bord. Le ton est monté rapidement avec deux d’entre eux. Le troisième, constatant la validité des titres de transport, a demandé que la situation soit réglée calmement. Un des agents a néanmoins exigé de voir les passeports et titres de séjour, “ce qui ne relève pas de ses attributions“, précise Selma Benkhelifa, et a remis en cause l’identité des deux femmes norvégiennes, “comme s’il était impossible que deux personnes d’origine congolaise soient norvégiennes. De nouveau, une réaction raciste“, tonne l’avocate. Il a saisi les passeports et ordonné aux trois femmes de descendre du train.

Sur le quai, l’un des agents a poussé violemment une des Norvégiennes, une dame de 55 ans, comme on peut le voir sur une vidéo filmée par GraceT. “En tentant d’intervenir, elle a été projetée au sol, maintenue face contre terre, son bras tordu dans le dos, et menacée de se voir arracher le bras“, raconte l’avocate. Selon Selma Benkhelifa, la victime a hurlé, craignant pour sa vie, évoquant à cet instant la mort de George Floyd. L’agent a ensuite menotté Grace T., les mains dans le dos, jusqu’à l’arrivée de la police.

Un agent de Securail présent a reconnu que la violence provenait de son collègue, relate encore l’avocate. L’identité des femmes a été vérifiée auprès de l’ambassade de Norvège, confirmant la validité de leurs documents. Elles sont reparties en Norvège le jour même. Une première plainte pour coups et blessures a été enregistrée.

Deux dossiers

Le parquet de Bruxelles a confirmé l’ouverture de deux enquêtes distinctes. L’une concerne les coups et blessures volontaires imputables à l’agent de Securail, l’autre vise des faits similaires commis par une autre personne impliquée. “Lors de cette intervention, des coups auraient été portés tant par l’agent que par la personne impliquée”, indique le parquet. Dans l’intérêt de l’enquête, aucune autre information n’est communiquée pour l’instant. “Ma cliente n’a fait que de tenter de se défendre, à aucun moment, elle n’a essayé de porter un coup à l’agent de Securail“, répond Selma Benkhelifa.

La SNCB déclare ce mercredi soir qu’elle “regrette vivement cet incident” et qu’elle “le prend très au sérieux”. Elle a lancé une enquête interne quant aux faits et circonstances exacts. En fonction des résultats de cette enquête, les mesures appropriées seront prises, assure l’entreprise. Une manifestation citoyenne est prévue vendredi devant la gare centrale de Bruxelles pour dénoncer une intervention jugée violente et raciste d’agents Securail à l’encontre de Grace T. L’action est organisée par un collectif citoyen de soutien à la victime, qui réclame la suspension immédiate des agents concernés, l’ouverture d’une enquête indépendante, ainsi que des excuses publiques de la SNCB.

 

BX1 avec Belga