Rue de la Loi : les pistes royales sont toutes semées d’embûches
Il n’aura fallu que quelques dizaines de minutes ce vendredi matin pour siffler la fin du match. Une vingtaine de minutes selon les uns, une quarantaine selon les autres : c’est le temps qu’aura duré l’entretien, glacial, entre les libéraux et les chargés de mission. Egbert Lachaert et Georges-Louis Bouchez d’un coté, Paul Magnette et Bart De Wever de l’autre. Aucune discussion de fond. Pour les libéraux cela n’était pas possible puisque le duo de chargés de mission remettait sur la table une note qui n’avait pas bougée et qu’ils avaient déjà refusé. Pour Paul Magnette et Bart De Wever les libéraux exigeaient de connaitre la coalition par avance (avec eux ou avec les verts) et refusaient d’entamer des discussions tant que ce choix n’était pas posé. Dialogue de sourd. Autant ne pas s’éterniser et place à l’étape suivante. Paul Magnette et Bart De Wever ont donc pris acte que leur bulle des 5 ne pouvait pas être élargie et que l’équilibre qu’ils cherchaient à bâtir ne pouvait pas être atteint. Lundi ils demanderont donc à être déchargés de leur mission, la suite dépend du Palais royal.
Signe de nervosité, des rumeurs annonçaient même que le Roi Philippe allait rentrer de l’étranger pour pouvoir acter leur démission dans la journée. Rumeurs démenties : l’entretien aura bien lundi matin comme convenu. Le souverain n’a aucune raison de se précipiter comme je l’expliquais dans mon article précédent, la situation est tout, sauf simple. Les plus optimistes voudraient que la piste NVA soient désormais réellement écartée. Cela permettrait une coalition de type Vivaldi (ou “4 saisons ” parce qu’elle associe les 4 familles : libérales social-chrétienne – avec ou sans CDH-, socialiste et écologiste, c’est la même chose qu’une coalition arc-en ciel (bleu-rouge-vert) élargie au CD&V, mais qu’en des termes choisis il faut que ces choses-là soit dites). Jusqu’à présent ce scénario était recalé par les partis néerlandophones qui ne voulaient pas se couper de la N-VA. On a compris qu’Egbert Lachaert y serait désormais favorable (un énorme paradoxe puisqu’il avait combattu cette hypothèse quand Gwendoline Rutten l’avait défendue et qu’il s’est fait élire à la présidence de l’Open VLD en faisant campagne sur sa proximité avec la N-VA…). On demande à voir si le CD&V accepterait de jouer dans la pièce. Et il faudrait surtout se mettre d’accord sur un programme. Les affirmations des libéraux selon lesquelles la note sur la table était trop sociale pour eux ne laisse pas augurer de négociations faciles avec le socialistes… On vous passe les questions de personnes… mais revenir à l’équilibre budgétaire ou annoncer des budgets limités en soins de santé ne semblent pas être un programme destiné à séduire PS et SPA… ou même les sociaux-chrétiens. L’autre scénario qui voudrait qu’on se passe du Cd&V pour garder le CDH (la coalition 80) ne semble pas beaucoup plus crédible. Dans les deux cas les partis flamands qui y participeraient devraient expliquer pourquoi ils ont exigé pendant plus d’un an que la future coalition puisse bénéficier d’une majorité dans le camp flamand, pour finalement faire l’inverse.
Puisque nous avons désormais affaire à un groupe des 4 face à une bulle des 5, certains suggèrent de confier la prochaine mission à un président de parti écologiste… ou à un duo vert-bleu. Cela sent bon le retour de manivelle : vous faites les malins en nous bloquant ? essayez de faire mieux maintenant. L’ampleur des tensions interpersonnelles est telle, que celui qui recevra une mission sera de toutes façons dans une mauvaise posture. A tel point que l’intérêt du palais ne sera probablement pas de relancer une mission trop rapidement. Certes la date du 17 septembre agit comme une date butoir et pourrait provoquer un emballement pour faciliter les compromis. Mais on y est pas encore. Le roi pourrait prendre le temps d’écouter tout le monde. De manifester son agacement auprès de l’un ou de l’autre. Voire de faire pression… et pourquoi pas, de revenir à un moment ou l’autre vers Paul Magnette et Bart De Wever s’il estime que c’est, malgré tout, la meilleure solution.