Saint-Josse : le règlement anti-prostitution est annulé par le conseil d’Etat

Le conseil d’Etat a annulé le règlement de Saint-Josse sur la prostitution suite au recours introduit par les associations de défense des prostituées. Selon le conseil d’Etat, la commune ne peut pas interdire les carrées au motif qu’elle souhaite ouvrir une crèche au bout de la rue.

Le recours avait été introduit durant l’été par les travailleuses du sexe. Elles s’opposaient au règlement qui devait entrer en vigueur au 1er janvier de cette année. Le texte prévoyait de limiter les carrées à la rue Linné et de les interdire totalement rue de la Prairie et rue des Plantes, au cœur du quartier Nord, lieu historique de prostitution. La commune a justifié son interdiction par le fait qu’elle souhaitait ouvrir une crèche au coin de la rue Linné, la création de nouveaux logements ainsi que des rapports de police faisant état de nombreux délits dans le quartier concerné.

Pour le conseil d’Etat, ces arguments ne tiennent pas. “(…) en décidant d’ouvrir une nouvelle crèche communale à l’angle de deux de ces rues, les autorités communales ne pouvaient ignorer qu’il s’agissait du seul endroit où la prostitution pouvait encore s’exercer. Dans ces conditions, il est contradictoire, après avoir pris une telle décision, de considérer comme le fait (le règlement), qu’il existerait une incompatibilité complète, fondée sur la moralité publique, entre cette nouvelle implantation et l’activité professionnelle préexistante, même en dehors des heures d’ouverture de la crèche.” 

Pour l’avocat des travailleuses, le conseil d’Etat empêche le bourgmestre Emir Kir (PS) d’introduire un nouveau règlement. “Je ne vois pas comment il pourrait justifier une nouvelle interdiction de la prostitution sur son territoire, explique Maître Letellier. En 2011, un premier texte avait été annulé. C’est donc le second qui est annulé par le conseil d’Etat. Avec ce texte, on serait passé de 67 carrées autorisées à 26. Or, une commune ne peut pas utiliser ses règlements pour abolir la prostitution qui est une activité légale dans les carrées.”

Le conseil rappelle également qu’une commune n’a pas les compétences pour lutter contre le trafic d’êtres humains, argument qu’Emir Kir utilise régulièrement pour justifier sa lutte contre la prostitution dans le quartier. “Cela est de la compétence de l’Etat fédéral. Le bourgmestre peut simplement fermer les lieux concernés.”

Une nouvelle bien accueillie

Evidemment, du côté des travailleuses du sexe, on se réjouit de l’annonce. “Le conseil d’Etat a même été plus loin que l’avis de l’auditeur, se réjouit Marie. Nous avons gagné tous nos recours contre les règlements de Saint-Josse. Il faudrait qu’Emir Kir accepte enfin de nous recevoir et que nous nous mettions tous autour de la table. Mais il refuse cette option. Je suis certaine qu’il va utiliser son droit de préemption.”

Effectivement, depuis un mois, la commune a voté un droit de préemption pour la zone du quartier Nord afin de pouvoir racheter les maisons où se trouvent des carrées. “Pour le moment, le collège a racheté une quinzaine de maisons, explique la conseillère communale Zoé Genot (Ecolo). Certaines ont été rachetés à des prix trop élevés et nous voyons que la commune n’en fait rien. Nous espérons qu’à présent, un vrai projet va pouvoir voir le jour.”

Vanessa Lhuillier – Photo: BX1

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02 avril 2019 - 18h14
Modifié le 02 avril 2019 - 18h14