Top managers engagés à la Cocom : plus de 10 millions d’euros de frais de consultance
Plus de 10 millions d’euros de consultance avec des contrats toujours en cours pour des missions légitimes, commencées au cœur de la crise, pour gérer l’urgence. Toutefois, n’est-il pas temps d’avoir une réflexion en profondeur au lieu de les reconduire de mois en mois ? Est-on toujours dans l’urgence ? Et est-ce la bonne manière de la gérer avec les deniers publics ?
Mardi BX1 dévoilait « dans les dossiers de la rédaction » l’existence de nombreux consultants indépendants engagés par la Cocom pour la gestion de la crise covid.
Pour rappel, aux mois de mars-avril 2020, d’ordinaire composée d’un médecin-inspecteur d’hygiène et de 3 infirmières, la Cellule « hygiène » des Services du Collège réuni a été étoffée par des ressources internes (collègues d’autres services et directions de l’Administration), ainsi que par plusieurs prestataires de service externes.
Devant cette urgence sanitaire, en effet, la Cocom, le gouvernement et les cabinets ministériels, suivant leur compétence et leur niveau d’intervention dans ce dossier, ont acté l’obligation de s’entourer de gens compétents et réactifs : « Des consultants indispensables pour aider les autorités sanitaires face à cette crise » confirme une source proche du dossier. « Cela concerne des tops managers de crise mais aussi du personnel pour les call-centers évidemment. Les uns et les autres ne touchent pas nécessairement le même salaire...»
Quel type de marché ?
Ces différentes personnes ont été engagées au fur et à mesure de la crise, pour une durée déterminée. « Les procédures suivies étaient des procédures négociées sans publication préalable, conformément à l’article 42, §1er, 1°, a) et/ou b), de la loi du 17 juin 2016 relative aux marchés publics. En effet, pour certains contrats, la valeur n’excédait pas 139.000 euros. Par contre, l’objet de tous ces contrats consistait – et consiste toujours, en une activité exceptionnelle des Services du Collège réuni rendue nécessaire par la pandémie. » peut-on lire dans une note provenant des membres du Collège réuni de la commission communautaire commune.
Il a été décidé de faire confiance à deux sociétés de consultance réputées venant de la région de Boom et Malines, en Flandre, Maerten & Partners et aussi Quanteus, et Möbius notamment.
Les montants
Les contrats entamés en mars ont donc été prolongés depuis :
- Le Contrat avec Maerten & Partners
Un coordinateur de crise a été engagé début avril 2020 pour assurer le pilotage en interne du dispositif de lutte contre le Covid-19. Le contrat, conclu à l’origine pour une durée de 2 mois, a été prolongé.
Une note de mi-2020 évoque « un renouvellement de ce contrat pour couvrir la période allant jusqu’à la fin de l’année 2020 (montant supplémentaire maximal estimé à 175 000 euros). »
- Quatre autres contrats : Maerten & Partners et Quanteus
D’autres tâches devaient être menées en urgence sur le terrain et demandaient une réelle expertise :
- Assurer la coordination opérationnelle avec le call-center dans le cadre du contact-tracing (Maerten & Partners)
- Assurer l’accompagnement et le soutien technique et IT dans l’utilisation et le développement de l’outil informatique, ainsi qu’assurer le soutien à la coordination générale du dispositif (Maerten & Partners)
- Gérer et coordonner les relations avec les collectivités et les partenaires (Maerten & Partners)
- Assurer le développement, l’organisation et la coordination de la cellule hygiène des Services du Collège réuni dans le cadre de la crise, en inscrivant ces évolutions dans une perspective structurelle (Quanteus)
Une note évoque de « renouveler l’engagement de ces quatre consultants pour une période supplémentaire de 3 mois (du 2 août au 31 octobre 2020 inclus) et pour un montant supplémentaire maximal estimé de 530.000 euros. » Depuis, les contrats ont été renouvelés.
- Contrat avec Möbius
Un infirmier chef régional avait été engagé en avril, pour une période d’un mois, renouvelable une fois. « Il a été renouvelé une première fois jusqu’au 31 octobre 2020 inclus » selon une note. « Un budget supplémentaire de 85.000 euros doit être prévu. »
D’autres contrats « Call center »
À cela s’ajoute des contrats avec des organismes assureurs (via le Groupement autonome de Personnes Intermutualistes (GAP Intermut) notamment pour les personnes actives au sein du call center. On parle de centaines de personnes suivant les besoins de terrains.
« Compte tenu des prévisions permises à ce jour, le budget initial de 6.735.000 euros devrait suffire pour couvrir l’ensemble les coûts relatifs à l’exécution de ce contrat jusqu’au 31 octobre 2020 » précise une note.
Un contrat pour le développement technologique
La SMALS développe un outil IT (plateforme web) destiné à encoder les données des personnes testées et contactées, à assurer le suivi de leurs dossiers et à permettre les flux et échanges de données. Une note « évoque au moins un montant de 500.000 euros »
Est-on toujours dans l’urgence ?
Si les montants peuvent paraître excessifs, il s’agit de prix du marché pour des experts de haut niveau dans le cadre d’une réaction rapide à une situation d’urgence…. Le problème, c’est que cette pandémie « installe l’urgence dans le temps. »
Aujourd’hui, certaines voix s’élèvent sur la question de la poursuite de cette activité externe « urgente » sans remettre en doute la compétence des personnes.
Un an plus tard, le moment est venu de s’interroger sur l’application ou non d’une procédure de mise en concurrence… À court ou moyen terme, le gouvernement doit-il craindre que d’autres adjudicataires se sentent lésés au regard de la loi sur les marchés publics ? Ne faut-il pas renforcer en parallèle l’administration en moyen humain et surtout lui permettre garder en son sein le « know-how » de cette pandémie pour mieux gérer les suivantes. Ce serait en effet dommage de devoir payer à nouveau des consultants dans quelques années…
V.Li. – Photo : Belga/Benoit Doppagne