Vers une hausse du prix des garages à Bruxelles ?

Les récents choix des autorités publiques en matière de coûts de stationnement pourraient amener à une augmentation des prix des garages ou des emplacements privés. Au détriment des personnes les moins favorisées ? Va-t-on vers une mobilité à deux vitesses ? 

À quelle sauce vont être mangés les automobilistes dans les prochaines années à Bruxelles ? En tout cas, ceux qui ne seront pas passés au vélo électrique, à la trottinette ou à la marche devront trouver un moyen de ranger leur voiture dans un parking « moins visible ».

Il s’agit de ce qui ressort du contenu d’un avant-projet d’ordonnance bruxelloise dévoilé par le journal L’Echo : «L’objectif est de reporter le stationnement de rue vers les parkings publics pour réduire le stationnement sur l’espace public » selon une note de la ministre bruxelloise de la Mobilité Elke Van den Brandt (Groen). Concrètement, en rue, les habitants verraient apparaître des zones grises où le stationnement hors voirie serait fortement incité. En effet, le prix d’un stationnement dans cette zone deviendrait plus élevé que le prix d’une offre de parking public. » Un prix dissuasif. En outre, les communes devront s’inscrire dans cette réflexion du futur plan régional de stationnement… sans quoi elles pourraient être sanctionnées !

Toujours moins de place

Si tout cela s’inscrit dans la volonté du gouvernement bruxellois de s’attaquer au stationnement le long des trottoirs (pour rappel, la Région ambitionne une réduction de 65.000 places d’ici 2030), dans le cadre de sa déclaration de politique générale, cela pourrait avoir un impact indirect sur le prix des parkings privés (emplacement, box…).

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Un impact social et financier

Face à cette problématique, Eric Verlinden, CEO de Trevi, (agence immobilière) s’interroge : « La première chose, c’est qu’il faut rester dans une logique administrativo-urbanistique. Très clairement, les autorités mettent en place une politique stricte avec des mesures contraignantes pour ne plus faire rentrer les voitures en Région bruxelloise. »
Il rappelle l’importance de faire la différence entre les habitants et les navetteurs : « Toujours dans cette logique, le gouvernement réduit aussi la possibilité de construire des parkings pour les bureaux. Aujourd’hui, même pour la construction des appartements, nous ne sommes plus à « un pour un » (un appartement=un garage). On constate à présent que l’on est à 60 ou à 70% de parkings pour un ensemble d’appartements. »

De 20.000 à 70.000 euros

Pour lui, un équilibre en la matière va s’installer pour les habitants de la Capitale… mais « on ne peut pas interdire aux gens de garer leur voiture dans les rues si des parkings ne sont pas prévus. Il faut de la cohérence. Sans quoi, il va inévitablement avoir une augmentation des prix de parkings et les gens les plus fortunés vont pouvoir continuer à garer leur voiture en ville et les moins fortunés… Je ne sais pas très bien ce qu’ils vont faire. »Pour lui, « les personnes âgées moins favorisées notamment vont être touchées par ce type de mesure. »

Il rappelle qu’« aujourd’hui, les prix des emplacements neufs se situent entre 20.000 et 40.000 euros et pour les boxs, entre 25.000 et 60.000, voire 70.000 euros. Ce prix va encore augmenter et ce sera au détriment de la politique sociale voulue par les responsables bruxellois. Il ne faut pas aller trop vite dans ce genre de projet et surtout mener une analyse globale de la situation. Il faut réfléchir de manière consensuelle. »

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Les commerçants seront touchés

Tous les commerçants à Bruxelles ne pourront pas s’acheter un garage et ne seront pas prêts à payer des centaines d’euros par mois de loyer. Quentin Huet, Manager de Shopera, l’association des commerçants qui entend redynamiser la zone entre la Bourse et la place Rogier, est surpris par cette annonce : « Actuellement, pour les gens qui viennent à Bruxelles dans le centre-ville, il n’y a toujours pas de parking de dissuasion. On bannit chaque jour un peu plus la voiture et il n’y a toujours pas de RER. Il faut des voies alternatives. Une journée de parking coûte 20 euros, cela me paraît excessif. Mon objectif est de voir les gens revenir à Bruxelles. Il faut aussi mettre en place des solutions comme des voitures partagées à des prix abordables. »

Le point de vue de l’architecte

Du côté des architectes, on confirme aussi ces changements de philosophie : « Tous les plans que nous rentrons actuellement pour les projets immobiliers sont systématiquement adaptés avec une réduction des places de parking en surface… voire une réduction des garages. Nous nous y conformons, mais cela pose quand même deux types de question : avec cette hausse, les logements sans parkings seront-ils aussi attractifs ? Et surtout, nous constatons une inflation, dans certains quartiers, des prix à la vente de garages ou de places de parking couverts, parce qu’il n’y a que 6 places pour 10 logements par exemple… » nous explique cet architecte bruxellois qui a préféré rester anonyme.

Cette modification de l’espace public ne permettra sans doute pas à tout le monde d’avoir une mobilité adaptée à son budget… Les autorités publiques ne doivent pas l’oublier. Enfin, les autorités vont-elles prévoir un tarif social du parking public pour les personnes moins favorisées qui auraient besoin d’un véhicule pour aller travailler…

V.Li. – Photo : Belga/Siska Gremmelprez