Quand les unités Covid se vident dans les hôpitaux bruxellois
Depuis trois semaines, les hôpitaux bruxellois reprennent tout doucement leur souffle. Les unités covid se vident et le personnel soignant peut se reposer un peu même si des séquelles subsistent.
“Cela fait trois semaines que cela n’est plus aussi fort, explique Michel Dewever,médecin-chef de l’hôpital Chirec à Delta. Nous reprenons une activité normale avec des procédures exceptionnelles.”
Au plus fort de la crise, le Chirec disposait 50 lits pour les patients Covid plus le service gériatrie ainsi que de 18 lits en soins intensifs avec la possibilité de doubler si nécessaire. Aujourd’hui, le groupe hospitalier privé a une vingtaine de patients Covid. Neuf sont en soins intensifs dont un sous assistance respiratoire. “Par contre, nous sommes toujours avec le plan hospitalier d’urgence du fédéral. Nous devons donc avoir 32 lits disponibles et 4 lits pour les soins intensifs Covid.”
Le Chirec a aussi mené des tests à large échelle pour son personnel comme les autres hôpitaux. Ce dépistage se fait partout sur base volontaire. Au vu des tests sérologiques effectués, le personnel qui était dans les unités covid a été moins contaminés que les autres. Au niveau de l’hôpital environ 5% du personnel a été infectés.
A Saint-Luc, l’hôpital retrouve aussi progressivement son activité normale même si les visites ne peuvent se faire qu’en respectant des conditions strictes. Mais aujourd’hui, l’institution ne compte plus que 15 personnes diagnostiquées positives au Covid-19 en soins intensifs dont 9 sous assistance respiratoire. Et cela baisse de jour en jour.
Aux cliniques Saint-Jean, 22 patients sont positifs au Covid-19 dont 5 en soins intensifs, 4 sous ventilation et un sous Ecmo (oxygénation par membrane extracorporelle). Trois patients sont suspectés et le résultat des tests sont attendus. “Nous avons eu un stress le 19 mai où nous avons eu 7 admissions en une nuit, explique Kenneth Coenye, médecin-chef aux cliniques Saint-Jean. Nous ne l’expliquons pas mais cela ne s’est pas reproduit. Après, nous conservons toujours un certain nombre de lits dans le cadre du plan fédéral d’urgence.”
Ici aussi on a testé le personnel soignant. Grâce aux tests sérologiques, les cliniques se sont aperçues que 20% du personnel qui a été testé avaient des anticorps. “Par contre, à ma grande surprise, des personnes qui avaient fait une petite forme de covid mais testées positives avec un test PCR, n’ont pas d’anticorps. Peut-être qu’un jour nous publierons une étude à ce propos.”
Dans les hôpitaux Iris, on compte toujours une centaine de personnes positives au Covid ou suspectées mais qui restent hospitalisées jusqu’à la réception des résultats de leur test PCR. Une vingtaine est toujours en soins intensifs.“Ces séjours sont à présent très long, explique Francis de Drée, représentant des hôpitaux Iris. Du coup, nous avons un plateau depuis quelque temps concernant le nombre d’hospitalisations en soins intensifs.”
Ici aussi, le personnel peut bénéficier s’il le souhaite d’un test sérologique. “Cela vient de débuter donc nos chiffres sont encore peu fiables mais peu de membres du personnel ont été contaminés. Nous pensons environ 10% seulement.”
Un personnel soignant fatigué mais toujours présent
Dans les différents hôpitaux bruxellois, le personnel soignant a été mis à rude épreuve pendant deux mois. Le stress a été présent, des infirmiers et infirmières ont dû quitter leur service pour travailler en soins intensifs ou aux urgences. “Les conditions ont été complexes, reconnait Kenneth Coenye. Nous avions mis en place des cellules avec des psychologues pour notre personnel mais peu y sont allés.” Aux cliniques Saint-Jean, l’absentéisme est même moins important aujourd’hui que durant la crise sanitaire. 5% du personnel manque à l’appel contre 10% en mars.
“Le taux d’absentéisme a été important au début de la crise sanitaire, confirme Francis de Drée du réseau Iris. Nous craignons à présent la problématique du choc post-traumatique avec du personnel qui a parfois choisi de quitter sa famille de peur de les contaminer. Nous avons mis des espaces de parole à leur disposition mais il est encore un peu tôt pour se prononcer.”
Au Chirec, on fait le même constat. ” Cela a été très compliqué avec un état émotionnel intense, raconte Isabelle Cambier, cheffe du département infirmier du Chirec. La peur d’être contaminé était là. Depuis quelques temps, cela se calme et nous avons eu une dizaine de jours sans que l’hôpital reprenne pleinement ses activités. Cela a permis au personnel infirmier de se reposer un peu. La plupart sont aussi contents de pouvoir retrouver leur service et donc leur métier.”
Par contre, Isabelle Cambier et Michel Dewever restent prudents pour l’avenir. Tous deux craignent une hausse des contaminations et auraient aimé que le masque soit obligatoire même dans les parcs.
Vanessa Lhuillier – Photo: Belga