Incendie de véhicules électriques : quelles mesures de prévention ?

Début février, deux véhicules électriques ont pris feu coup sur coup à deux jours d’intervalle. Un scooter d’abord, ensuite une voiture, garée dans un parking souterrain. Les interventions lors d’incendie de véhicules électriques nécessitent des procédures spécifiques de sécurité. Les pompiers demandent une législation adaptée.

Le 10 février dernier un scooter garé dans une rue d’Etterbeek partait en fumée. C’est une réaction déclenchée au niveau de la batterie qui est à l’origine du sinistre. Pour en venir à bout, les pompiers bruxellois ont dû s’y prendre à plusieurs reprises. Une voiture située à proximité a été endommagée. Deux jours plus tard, c’est une voiture électrique qui prenait feu dans un parking, rue Ravenstein, où elle était garée. Selon les premiers éléments, aucun des deux véhicules concernés n’étaient en charge au moment de l’incendie. Et pour ce qui est de la voiture, le feu n’aurait pas pris a niveau de la batterie. Mais les résultats d’analyse définitifs doivent encore être communiqués. Quoiqu’il en soit …

« Le problème, c’est l’extinction de ces incendies », relève Walter Derieuw, le porte-parole des pompiers de Bruxelles. Une procédure particulière doit en effet être suivie dans le cas de véhicules électriques : ils sont plongés dans une cuve d’eau pendant 24 à 48h, afin d’être refroidis. Une intervention qui suppose un matériel spécifique. « Pour les scooters et vélos, on a des conteneurs ad hoc. Pour les voitures, il faut prévoir des conteneurs de grande capacité. Si on en a besoin, n’importe quel conteneur recouvert d’une bâche hermétique peut faire l’affaire. » Ensuite il faut évacuer l’eau et le véhicule. Celui de la rue Ravenstein, a été stocké sur le terrain du dépanneur, précise Walter Derieuw.

Les voitures électriques plus « inflammables » que les thermiques ? Rien ne permet de le dire aujourd’hui. « Il est trop tôt, nous ne disposons pas encore de chiffres. », répond Benoit Godard. Il arrive aussi que des véhicules thermiques prennent feu, en raison de courts circuits, par exemple.

Sécurisation des parkings

Mais l’opération de mise en charge peut présenter certains risques spécifiques : « Le problème d’emballement thermique a plus de chance de se déclarer lors des opérations de charge car le rechargement engendre une hausse de température notable dans la batterie. D’autant plus si le rechargement s’effectue à l’aide de super chargeurs, rapides à ultra rapides. », explique Pierre-Yves Lescalier, ingénieur en prévention collectivités et entreprises chez Ethias. La température critique de la batterie est de 70°C. Au-delà, la réaction chimique exothermique démarre et il y a un risque d’incendie ou d’explosion, continue-t-il.

L’usage de l’électrique étant appelé à prendre de l’ampleur, il est important d’être attentif aux mesures de sécurité et préventions qui s’appliquent à ces technologies. Sur 27.000 voitures neuves immatriculées à Bruxelles, 5500 sont électriques, selon Bruxelles Environnement. A ce stade c’est la sécurisation des parkings qui occupe l’administration. Avec les pompiers, celle-ci travaille sur cette question. « Car les approches sont différentes entre l’électrique et le thermique, même s’il y a une grande variété d’électriques, et qu’il est difficile de catégoriser les véhicules de manière binaire. », relève Benoît Willocx, directeur général adjoint de Bruxelles Environnement.

En attendant l’élaboration d’un texte réglementaire, que les pompiers demandent avec force, un document a été envoyé à tous les exploitants de parkings, privés et publics. Une série de mesures de prévention y est listée afin de réduire les risques :

► Avoir recours à un mode de ‘recharge de type 3’, qui présente des garanties de sécurité en cas de déclenchement d’incendie

► Installer les bornes de recharge si possible à l’extérieur ou, pour les parkings couverts, à proximité d’une sortie

► Vérifier auprès de Sibelga que l’installation est bien conçue pour accueillir une borne

► Prévoir un bouton d’arrêt d’urgence (qui stoppe l’alimentation)

► Eviter de stationner les voitures électriques en-dessous du niveau – 1

► Protéger la borne avec des barrières physiques pour éviter les accrocs, qui peuvent causer des courts-circuits

► Faire contrôler les bornes par un organisme agréé

Plus polluantes?

Plus polluantes, les électriques? Dans tout incendie, il y a des échappements de gaz toxiques et polluants, qu’il s’agisse de voitures électriques ou non, recadre Benoît Willocx. Les véhicules thermiques contiennent d’avantage d’hydrocarbures, les électriques plus d’oxydes métalliques, qui sont évidemment toxiques, les pompiers appelés à intervenir en sont conscients. « Les fumées produites lors d’un incendie de batterie d’un véhicule électrique sont hautement inflammables et très toxiques (fluorure d’hydrogène, oxyde et dioxyde de carbone, aldéhyde, …). Les températures atteintes en cas d’incendie sont supérieures à celles atteintes lorsqu’un véhicule thermique prend feu. », prévient de son côté Pierre-Yves Lescalier. Respirer ces fumées peut avoir des conséquences irréversibles sur la santé, insiste-t-il. Il faut éviter tout contact avec le liquide contenu dans la batterie avec les yeux et la peau. Les pompiers en sont conscients.

Quant aux eaux d’extinction, elles doivent suivre un protocole particulier également, assure Walter Derieuw. Dans la cas de la voiture de la rue Ravenstein, l’eau de la cuve de refroidissement a été récupérée par une société spécialisée dans le traitement des eaux polluées. « Pour bien faire ces eaux devraient être récupérées et envoyées en centre spécialisé afin d’être traitées ce qui n’est malheureusement pas possible dans la majorité des cas. », estime Pierre-Yves Lescalier. A Bruxelles Environnement, Benoït Willocx, est toutefois moins alarmiste. Les voies d’évacuation de l’eau une fois la voiture refroidie dépendra de son taux de pollution. « L’eau est rapidement analysée, et ensuite traitée en fonction des résultats. Mais au moins l’eau est canalisée. »

S.R. – Photos : Pompiers de Bruxelles