Procès des attentats : dernière semaine de débats, la défense de Smail Farisi plaide l’acquittement total de son client

Place ensuite à la défense de son frère Ibrahim. Enfin, le dernier mot sera donné aux accusés avant que les jurés ne partent s’enfermer dans un endroit tenu secret pour délibérer sur la culpabilité des dix hommes.

Me Cassandra Steegmans est la première des avocats de Smail Farisi à avoir pris la parole pour le défendre lundi matin, au procès des attentats du 22 mars 2016, devant la cour d’assises de Bruxelles. La jeune pénaliste a annoncé que ses deux confrères et elle demandaient au jury d’acquitter Smail Farisi sur toute la ligne, donc de le déclarer non coupable pour les préventions d’assassinats et de tentatives d’assassinat dans un contexte terroriste, ainsi que pour celle de participation aux activités d’un groupe terroriste.

Le parquet fédéral, pour rappel, a requis l’acquittement de cet accusé pour les deux premières préventions, mais pas pour la dernière. Pour les procureurs, il est impossible que Smail Farisi n’ait pas pris conscience, au fil de ses nombreuses visites dans son appartement de l’avenue des Casernes à Etterbeek, qu’il sous-louait au kamikaze de Zaventem Ibrahim El Bakraoui, du caractère terroriste de cet homme. Les magistrats avaient également avancé que Smail Farisi avait tenté de compliquer l’enquête en maintenant le flou sur la destination de certains objets qu’il avait évacués de son appartement, dès le lendemain des attentats.

L’audience de mardi sera consacrée à la défense de son frère, Ibrahim Farisi. Celui-ci doit aussi répondre de participation aux activités d’un groupe terroriste mais les procureurs ont déjà demandé son acquittement.

Après cela viendra le temps des répliques durant lesquelles toutes les parties pourront répondre a ce qui a été avancé durant le réquisitoire et les plaidoiries. Enfin, le dernier mot sera donné aux accusés avant que les jurés ne partent s’enfermer dans un endroit tenu secret pour délibérer sur la culpabilité des dix hommes, dont un fait défaut.

Pas de téléphone, de wifi ni de visite : comment va se dérouler la délibération du jury au procès des attentats

Belga, image Belga : Smail Farisi et Michel Degrève

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14H54 Me Degrève demande aux jurés de “mettre fin au supplice de Smail Farisi”

Smail Farisi n’est pas radicalisé et il n’a pas de mobile“, a plaidé ce lundi Me Michel Degrève, réclamant fermement l’acquittement de son client, au procès des attentats du 22 mars 2016 devant la cour d’assises de Bruxelles.

L’avocat a demandé aux jurés de “mettre fin au supplice de Smail Farisi” en rejoignant les mêmes “conclusions d’innocence” que plusieurs acteurs judiciaires, notamment les trois juges du tribunal correctionnel de Bruxelles qui ont acquitté Farisi dans le dossier “Paris bis”. Me Degrève a cité à plusieurs reprises ce jugement relatif à l’enquête belge sur les attentats à Paris, qui a acquitté Smail Farisi pour participation aux activités d’un groupe terroriste. “Trois juges professionnels spécialisés disent qu’il n’est pas prouvé qu’il connaissait l’implication d’Ibrahim El Bakraoui dans les attentats à Paris“, a rappelé le pénaliste.

Smail Farisi avait été inculpé dans ce dossier “Paris bis” parce qu’il avait prêté son appartement de l’avenue des Casernes à Etterbeek à Ibrahim El Bakraoui dès début octobre 2015. Ce dernier était alors actif dans le projet des attentats à Paris, qui auront lieu un mois et demi plus tard. Cet appartement abritera ensuite Khalid El Bakraoui, l’un des kamikazes des attentats du 22 mars 2016 à Bruxelles, et Osama Krayem, qui devait lui aussi se faire exploser mais qui a renoncé.

“Ce n’est pas à lui qu’on demande de cacher les armes.

Pour le parquet fédéral, s’il est établi que Smail Farisi n’a pas fourni d’aide à la cellule terroriste pour la préparation des attentats à Paris, il en a bien fourni une pour la préparation des attentats à Bruxelles. Me Degrève a affirmé en douter sérieusement. “Les membres de la cellule auraient tout à coup mis Farisi dans la confidence? On lui aurait tout à coup donné une formation expresse après les attentats à Paris? On voit que Smail Farisi n’est jamais à l’appartement de l’avenue des Casernes dans les moments-clés, comme lorsque les sacs d’explosifs arrivent le 21 mars 2016. Ce n’est pas non plus à lui qu’on demande de cacher les armes. On remarque qu’il n’est jamais sollicité, quand bien même il peut peut-être aider“.

Le ministère public avait fait grand cas du fait que Smail Farisi avait été vu à 26 reprises entrant ou sortant de l’appartement de l’avenue des Casernes, entre le 16 mars, date à laquelle la photo des frères El Bakraoui est publiée dans la presse, et le 22 mars. “Smail Farisi l’a expliqué. Après avoir vu la photo dans le journal, il a décidé d’aller à l’appartement en se disant : ‘s’ils sont là c’est que ce ne sont pas eux [les terroristes recherchés]”.

Un accusé “naïf” selon les experts

Khalid El Bakraoui l’a ensuite baratiné. Oui, il a gobé ce que lui a raconté El Bakraoui et n’a pas cru qu’ils pouvaient être des terroristes. Smail c’est quelqu’un de naïf, quatre experts vous l’ont dit. Il a donc gobé, mais il les a suppliés de partir”, a exposé Me Degrève. “S’il y va à 26 reprises, c’est pour leur mettre la pression, pas pour les ravitailler. Il vient une seule fois avec une pizza et une seule fois avec un sac Delhaize. Les terroristes n’avaient pas besoin de Smail pour faire les courses, ils sortaient eux-mêmes et les images des caméras le montrent“, a-t-il souligné. “Même si Smail Farisi avait fait des courses pour ces personnes, rien ne prouve que c’était dans le but d’appuyer leur projet terroriste“, dont il n’avait aucune connaissance selon le pénaliste. “Smail Farisi n’a jamais voulu participer de près ou de loin à pareille entreprise de barbarie.

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17H26 – Sept éléments “décisifs” doivent mener le jury à acquitter Smail Farisi, liste sa défense

“Que reste-t-il de preuves?” C’est par ce leitmotiv que Me Fabian Lauvaux a conclu la défense de Smail Farisi au procès des attentats du 22 mars 2016. L’avocat a présenté au jury sept éléments “décisifs” qui doivent, selon lui, mener à acquitter l’Anderlechtois d’assassinats et tentatives d’assassinat dans un contexte terroriste ainsi que participation aux activités d’un groupe terroriste.

Au terme du réquisitoire du parquet fédéral, je n’ai pas entendu à une seule reprise le mot ‘preuve’. Sauf quand il a fallu reconnaître qu’il n’y en avait pas en ce qui concerne la complicité d’assassinats“, a tonné le pénaliste.

Il a alors déroulé sept éléments du dossier disculpant, selon lui, son client. Il est d’abord revenu sur la personnalité de l’accusé, “capable de résister à toutes les tentations” d’une enfance populaire et dont le casier ne mentionne aucune condamnation judiciaire. Il est ensuite revenu sur ses déclarations “constantes et sincères” tout au long de l’enquête. “Il n’a jamais été pris en flagrant délit de mensonge. Tous ses déplacements ont été confirmés par la téléphonie. Il s’est rendu et a collaboré. Il a livré des explications sans y être obligés…“, a rappelé le plaideur. Aucune déclaration de témoin ne le prend non plus à défaut. Le ministère public “n’avance aucune preuve testimoniale contre lui, pas même un témoin anonyme“, a-t-il martelé.

Quant aux déclarations de ses co-accusés, pourquoi Osama Krayem serait-il crédible pour accuser les autres individus dans le box mais pas pour disculper Smail?, s’est interrogé Me Lauvaux. ADN, empreintes, armes, cartes SIM, faux documents, détonateurs ou téléphonie… Aucun élément matériel ne permet de relier Smail Farisi au projet des attentats, a poursuivi l’avocat. Enfin, “il reste ce malheureux audio ‘Fumier’“, enregistré par le kamikaze Ibrahim El Bakraoui. Ce dernier y remercie une personne pour “tout ce que (elle a) fait pour (la cellule)“. Smail, parfois surnommé “fumier“, n’a jamais admis en être le destinataire. “C’est lui, ce n’est pas lui? Rien que de se poser la question montre qu’il y a un doute.”

Belga – Photo : Belga/Benoit Doppagne