Procès des attentats de Bruxelles : Abdeslam et El Makhoukhi absents, le procès reprend le lundi 19 décembre

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Salah Abdeslam et Bilal El Makhoukhi ont refusé de se présenter devant la cour d’assises, ce mardi.

Le procès des attentats du 22 mars 2016 a repris ce mardi avec la fin de la lecture de l’acte d’accusation, débutée mercredi dernier. L’audience du jour a démarré sans les accusés Salah Abdeslam et Bilal El Makhoukhi qui ont refusé de se présenter devant la cour d’assises, installée exceptionnellement dans le bâtiment Justitia à Haren.

Si la police a l’autorisation d’utiliser la force – “mais pas la violence”, a précisé la présidente de la cour d’assises Laurence Massart – pour forcer des accusés détenus à assister à leur procès, il aurait fallu, dans ce cas-ci, utiliser d’une “force vive”, ce que la police voulait éviter. Notamment à la suite de la plainte, jeudi dernier, de l’accusé Ali El Haddad Asufi, qui avait raconté avoir été étranglé par un policier lors de son extraction de la prison de Haren en vue de son transfert au bâtiment Justitia.

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“J’ai demandé d’user de psychologie, en expliquant aux accusés qu’il s’agit de leur procès” et qu’il est dès lors dans leur intérêt de se présenter, a expliqué mardi matin la présidente de la cour d’assises. “La psychologie n’a visiblement pas fonctionné”, a-t-elle constaté. Elle a demandé à ce qu’un procès-verbal soit dès lors rédigé.

Laurence Massart a également précisé qu’aucun certificat médical n’avait été reçu concernant l’absence de Salah Abdeslam lundi, l’accusé disant alors souffrir de la gorge.

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9h50 – La défense de Bilal El Makhoukhi remise en question

Après avoir donné des explications juridiques aux jurés, Laurence Massart a demandé aux autres accusés détenus – Mohamed Abrini, Osama Krayem, Sofien Ayari, Ali El Haddad Asufi et Hervé Bayingana Muhirwa – s’ils souhaitaient assister aux débats, ce qu’ils ont refusé.

La présidente a finalement suspendu l’audience vers 09h50 après avoir appris que Bilal El Makhoukhi n’était pas représenté par un avocat. Me Nicolas Cohen a souhaité prendre la parole pour expliquer qu’il n’avait pas pu s’entretenir avec l’accusé et qu’il ignorait donc les raisons de son absence, et que ce faisant il refusait de le représenter s’il n’avait pas de mandat de la part de son client. Mais Laurence Massart l’a directement interrompu, ne le laissant pas aller au terme de son propos, et a demandé l’intervention du bâtonnier. Une démarche qui pourrait mener à la désignation d’un autre avocat pour représenter Bilal El Makhoukhi.

Après entretien avec celui-ci, la situation a finalement pu être réglée et Me Cohen représentera donc bien son client ce mardi.

Me Xavier Carrette a ensuite expliqué, lors de la suspension d’audience, que l’accusé Ibrahim Farisi voulait dénoncer le fait que les accusés détenus étaient sur le point de retourner en cellule et de quitter la salle d’audience pour le troisième jour d’audience d’affilée. “C’est son procès et il veut aussi, après toutes ces années, comprendre et se défendre”, a justifié l’avocat. La présidente de la cour a cependant refusé de lui permettre de s’exprimer.


11h50 – L’audience reprend

Après une suspension d’audience de près de deux heures, la lecture de l’acte d’accusation reprend enfin. Les procureurs fédéraux lisent désormais les derniers consacrés à Smail Farisi et à Ibrahim Farisi, toujours présent dans la salle d’audience.

L’ensemble des avocats de la défense, n’ayant pas apprécié que la parole n’eut pas été accordée à Mohamed Abrini, a demandé à rencontrer la présidente et le bâtonnier. Face à ce différend sur la forme, selon ses mots, Laurence Massart leur a répété qu’il n’y avait, à ses yeux, pas lieu de commenter des explications juridiques et qu’elle voulait avancer sur la lecture de l’acte d’accusation. Elle accordera la parole aux accusés et à leurs avocats après la lecture de l’acte, leur a-t-elle dit.

Sur le fond, a-t-elle ensuite poursuivi, en s’adressant aux jurés, les avocats de la défense ont des choses à leur expliquer sur la raison pour laquelle leurs clients se retirent en cellule. Mohamed Abrini veut, semble-t-il, le faire personnellement et l’avocate de Salah Abdeslam, Delphine Paci, a aussi des explications et nuances à apporter. Les avocats voulaient faire cela tout de suite mais la présidente de la cour a donc estimé que cela interviendrait après la fin de la lecture de l’acte d’accusation.


12h13 – Smail Farisi et le mystère du sac à dos

Osama Krayem, accusé dans le dossier des attentats de Bruxelles, devait se faire exploser dans le métro bruxellois le 22 mars 2016. Mais il revint finalement à l’appartement de la rue des Casernes à Etterbeek et aurait, selon ses dires, déversé les explosifs dans la douche et les toilettes, laissant le sac à dos derrière lui.

Au lendemain des attentats, Smail Farisi s’est décidé à vider le studio avec l’aide de son frère. “Il y avait un sac à dos bizarre, je n’avais jamais vu un sac à dos comme ça, style sac de randonnée, il était spécial, il était différent de tous les autres. Il était très grand de couleur mauve, je pense”, a-t-il déclaré lors d’un interrogatoire. Il affirme avoir vérifié que le sac était vide et l’avoir jeté à la poubelle. Il déclare également ne pas avoir vu le sac dans l’appartement la veille des attentats.

Les frères Farisi ont apporté les affaires, dont le sac, au domicile paternel à Anderlecht, où le matériel est trié. Le père Farisi a indiqué aux enquêteurs avoir vu un sac de randonnée sur le trottoir au moment de refermer son garage. Il ne sait pas ce que le sac est devenu.

Arrêté le 11 avril 2016, Smail Farisi a été libéré sous conditions le 1er avril 2018. Lui et son frère Ibrahim Farisi comparaissent libres.

Les perquisitions de l’appartement de la rue des Casernes – Photo : BX1

12h29 – Dernier chapitre sur Ibrahim Farisi

Ibrahim Farisi est allé, avec son frère Smail, le lendemain des attentats, le 23 mars 2016, vider l’appartement de Smail situé avenue des Casernes à Etterbeek, qui a servi de planque à la cellule terroriste, selon l’acte d’accusation. C’est de cet appartement de l’avenue des Casernes que les deux kamikazes du métro, Khalid El Bakraoui et Osama Krayem, sont partis le 22 mars 2016 au matin. Krayem y est revenu peu de temps après, ayant renoncé à se faire exploser.

Ce sont les images de caméras de vidéo-surveillance près de l’immeuble qui ont révélé que les deux frères Farisi ont rapidement évacué certains objets de l’appartement. Ils sont vus arrivant sur place le 23 mars à 11h09.

Le document précise que, pour commander un taxi afin de transporter les affaires de l’appartement, Ibrahim Farisi n’a pas appelé avec son téléphone, mais s’est rendu dans un “phone-shop” pour passer cet appel. Lorsqu’il a été interrogé à ce propos par les enquêteurs, l’accusé a répondu qu’il avait procédé de cette manière parce que son abonnement de GSM était suspendu en raison de factures impayées, et non pour garantir la discrétion de cet appel.

Sur les images du 23 mars, les enquêteurs ont constaté qu’Ibrahim Farisi portait des gants en latex pour manipuler certains objets qu’il sortait de l’appartement, notamment un sac à dos ressemblant à celui que portait Osama Krayem le matin du 22 mars. Ibrahim Farisi a déclaré qu’il avait mis ce gant par-dessus un mouchoir enveloppé autour de sa main, parce qu’il s’était coupé avec un verre dans la cuisine. Il a contesté avoir essayé de ne pas laisser ses empreintes sur ce sac qui, par ailleurs, n’a jamais été retrouvé.

Les frères Farisi sont encore retournés à l’appartement de l’avenue des Casernes le 25 mars, pour y enlever les derniers objets. Arrêté en avril 2016 dans le cadre de l’enquête sur les attentats à Bruxelles, Ibrahim Farisi a été libéré sous conditions le 16 novembre suivant. Il a ensuite été engagé par le CPAS d’Anderlecht comme médiateur au service d’accueil.

Ibrahim Farisi est le seul des dix accusés à n’être poursuivi que pour participation aux activités d’un groupe terroriste. Il n’est pas poursuivi pour les assassinats et les tentatives d’assassinats commises dans un contexte terroriste.


12h39 – Fin de l’acte d’accusation

La lecture de l’acte d’accusation doit s’achever avec l’exposé au jury de diverses dispositions légales, détaillant ce que désignent les infractions terroristes ou encore les définitions d’auteur ou co-auteur de telles infractions. Cet après-midi, la parole est donnée à la défense.


15h18 – L’avocate d’Abdeslam demande au jury “de ne pas confondre Paris et Bruxelles

L’avocate de Salah Abdeslam, Me Delphine Paci, a pris la parole mardi après-midi, devant la cour d’assises de Bruxelles, pour présenter son acte de défense dans le cadre du procès des attentats de Bruxelles du 22 mars 2016. Esquissant sa stratégie, axée principalement sur le fait que son client était incarcéré au moment des faits, Me Paci a demandé au jury de “ne pas confondre Paris et Bruxelles“.

Salah Abdeslam, “présenté comme ‘l’ennemi public n°1‘”, selon les mots de Me Paci, “n’est pas poursuivi comme dirigeant d’une organisation terroriste“, a souligné l’avocate au jury. S’il a été condamné pour son implication dans les attentats de Paris de novembre 2015 à la réclusion criminelle à perpétuité, et pour la fusillade de la rue du Dries à 20 ans de prison, ces faits ne sont pas ceux jugés dans le cadre de ce procès, a-t-elle insisté. “La question qui va vous occuper et qu’il vous faudra trancher porte sur sa participation, fermement contestée, aux attentats de Bruxelles, commis alors qu’il était incarcéré. Il s’agira de ne pas confondre Paris et Bruxelles“, a souligné Me Paci, esquissant les traits de sa stratégie de défense.


17h34 – Nouvelle suspension d’audience, liée cette fois à une question de procédure

L’après-midi de mardi a été marquée par une longue suspension d’audience, de près de deux heures, liée à un procès-verbal relatant ce qu’il s’était passé à la prison de Haren mardi matin, au moment d’en extraire Salah Abdselam et Bilal El Makhoukhi. Ces deux derniers ont en effet refusé de se déplacer jusqu’au Justitia alors qu’ils y sont normalement obligés. Le premier est resté dans sa cellule, le second a décidé de ne plus se déplacer jusque devant la cour alors qu’il se trouvait dans le local de la prison destiné à la fouille.

La présidente a lu le procès-verbal en question devant la cour. Il était cependant anonyme, avec une enveloppe jointe et scellée contenant le nom des policiers qui sont intervenus mardi matin à la prison de Haren. A la reprise des débats, vers 14h50, la présidente a expliqué ne pas avoir ouvert l’enveloppe et a demandé aux procureurs fédéraux si elle devait joindre le procès-verbal ainsi que l’enveloppe au dossier. Ces derniers lui ont répondu par l’affirmative et Laurence Massart s’est donc exécutée, rendant de facto les documents accessibles aux différentes parties au procès.

Quelques dizaines de minutes plus tard, ayant des doutes sur l’interprétation des procureurs fédéraux, elle a finalement décidé de suspendre l’audience afin de vérifier certains articles du code d’instruction criminelle. Celui-ci prévoit que les procès-verbaux ne peuvent être anonymisés que si cela risquerait de compromettre l’identité d’enquêteurs ou de policiers des unités spéciales. Après près de deux heures de suspension, la présidente a finalement prononcé une ordonnance, plaçant sous scellés cette enveloppe, qui contiendrait les noms de policiers des unités spéciales, et qui restera fermée. Elle ne sera donc pas consultable par les parties, pour éviter que l’identité des policiers ne puisse être révélée. Le PV reprenant l’audition a, lui, été joint au dossier.

Au vu de l’heure, la présidente a ensuite décidé de suspendre l’audience, vers 17h30. Le procès reprendra lundi prochain, 19 décembre, avec la poursuite de la lecture du sujet d’accusation et les déclarations de défense. Les audiences de mercredi et jeudi avaient en effet été suspendues en raison de la tenue d’un sommet européen à Bruxelles, qui nécessite une forte présence policière dans la capitale.

Gr.I. avec Belga – Photo : Belga/Pool Didier Lebrun