Manifestation à l’ambassade d’Israël: plainte en vue contre Boris Dilliès, celui-ci juge “légal” le recours à la force

Une plainte collective est en voie d’être déposée à l’encontre de la commune d’Uccle, de la zone de police Marlow ainsi que du bourgmestre, Boris Dilliès (MR), pour “usage disproportionné de la force” lors du rassemblement organisé mardi soir devant l’ambassade d’Israël, a indiqué jeudi le cabinet d’avocats Progress Lawyers Network (PLN), porteur de la plainte.

Hier soir, la police a de nouveau fait usage de gaz lacrymogènes et de canons à eau pour disperser une nouvelle manifestation pro-palestinienne devant l’ambassade d’Israël à Uccle.

Comme mardi soir, des centaines d’étudiants ont à nouveau marché vers l’ambassade israélienne pour dénoncer la situation en Palestine. L’appel a été lancé par les occupants de l’ULB et de la VUB après qu’un étudiant de la VUB a dû subir une intervention chirurgicale après avoir été touché au visage par un canon à eau dans la nuit de mardi à mercredi.

Le bourgmestre justifie l’intervention de la police pour des raisons de sécurité, indiquant que des groupes violents, notamment des black blocs, s’étaient joints à la manifestation. 

Mardi, dès 18h00, plusieurs centaines de manifestants se sont réunis devant l’ambassade d’Israël, située à Uccle, afin de dénoncer la situation à Gaza. Après moins d’une heure de mobilisation “pacifique”, selon les organisateurs, la police a déployé canons à eau et gaz lacrymogène pour disperser la foule.  Un manifestant a notamment été blessé au visage après un coup de matraque reçu de la part d’un agent de police, et une étudiante de la Vrije Universiteit Brussel (VUB) – touchée au visage par le canon à eau – a dû subir une opération à l’œil. 

Une nouvelle manifestation est prévue ce soir devant l’ambassade d’Israël. 

►Reportage de David Courier et Frédéric De Henau

Le bourgmestre réagit

Le bourgmestre a justifié ce recours à la force en pointant une manifestation “illégale” sans demande d’autorisation préalable. Selon lui, il a par ailleurs été demandé aux manifestants de quitter les lieux, sans que ces derniers n’obtempèrent. “J’ai donc autorisé la police à disperser les manifestants”, avait assumé le maïeur mardi soir.

Il précise que les moyens policiers utilisés lors de cette mobilisation “non autorisée” sont légaux et légitimes.

“C’est leur droit de porter plainte. Mais il y a une réalité, c’est que cette manifestation n’avait pas fait l’objet d’une demande d’autorisation et était donc illégale. L’usage de la force a été utilisé conformément au droit”, a soutenu Boris Dilliès, se référant aux articles 41 et 42 du règlement général de police.

Bien que “désolé” pour les manifestants blessés, le bourgmestre a estimé que “lorsqu’on participe à une manifestation illégale, on prend ce genre de risques”. “Excepté les étudiants pacifiques, ce rassemblement était également constitué de militants d’extrême gauche venus uniquement se confronter à la police”, a-t-il ajouté.

Cinq plaignants

“La plainte est pour l’instant constituée de cinq plaignants (sans compter l’étudiante de la VUB), tous blessés à la suite des moyens utilisés par la police”, a expliqué l’avocate Selma Benkhelifa, membre du PLN.

L’avocate pointe un usage “disproportionné” de la force, sur base notamment de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH).

“Le simple constat qu’une manifestation n’est pas non-autorisée n’habilite pas à recourir aux moyens spécifiques utilisés mardi par la police – à savoir gaz lacrymogène et canons à eau”, a précisé l’avocate.

Un rassemblement, identique à ceux organisés ces deux derniers jours, est prévu jeudi, à 18h00, devant l’ambassade d’Israël. “Ce soir, les mêmes moyens policiers seront déployés – au minimum”, a fait savoir le maïeur.

La Ligue des droits humains (LDH) a condamné les évènements

Le droit fondamental de manifester implique l’obligation pour les autorités publiques de garantir et faciliter les manifestations dès lors qu’elles restent pacifiques“, souligne la LDH face à cette situation. “En démocratie, l’absence de demande préalable ne peut en aucun cas être le prétexte à une restriction de l’expression publique pacifique des citoyens“, poursuit-elle.

Face à l’appel à une nouvelle mobilisation mercredi par des étudiants de l’Université libre de Bruxelles (ULB) et de la Vrije Universiteit Brussel (VUB), la LDH conclut en appelant “urgemment les autorités communales uccloises à respecter le droit à la manifestation pacifique et à garantir le droit à l’expression publique“.

L’ONG Amnesty International a quant à elle demandé une enquête approfondie sur l’incident, émettant des doutes quant à la légalité de la décision prise de disperser ce rassemblement.

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30 mai 2024 - 12h55
Modifié le 31 mai 2024 - 07h00