Une diplomatie parallèle, l’édito de Fabrice Grosfilley

Ce lundi, Fabrice Grosfilley évoque dans son édito le déplacement de Philippe Close, bourgmestre de la Ville de Bruxelles (PS), en Ukraine.

C’est un voyage surprise annoncé hier soir sur Twitter. Philippe Close, le bourgmestre de Bruxelles, est en voyage en Ukraine. Un déplacement de plusieurs jours pour affirmer la solidarité de la ville de Bruxelles avec les Ukrainiens.

Ce déplacement d’un homme politique belge n’est pas le premier en terre ukrainienne. Benoît Lutgen et Georges Dallemagne pour “Les Engagés” s’étaient rendus à Lviv il y a quelques semaines. Charles Michel, président du Conseil européen, avait lui passé quelques heures à Kiev, la capitale du pays. Dans le premier cas, le déplacement des deux parlementaires engagés avait permis d’amener de l’aide humanitaire et des gilets pare-balles. Dans le second cas, on était plus dans un registre diplomatique classique. Être à Kiev, se tenir aux côtés des Ukrainiens, dans une ville régulièrement bombardée, est un témoignage de solidarité, une manière de dire que nous sommes solidaires des assiégés et que c’est le camp d’en face qui porte la responsabilité du conflit.

Le déplacement de Philippe Close appartient donc à ces deux registres. Celui de la logistique, et celui des messages diplomatiques. Au rayon logistique, Philippe Close était à la tête d’un convoi qui acheminait trois tonnes de matériel médical et de médicaments, ainsi que deux ambulances offertes par les pompiers de Bruxelles à leurs collègues ukrainiens. En ce qui concerne la diplomatie, Philippe Close ne représente évidemment pas la Belgique, ça ne figure pas dans ses prérogatives. Mais en tant que bourgmestre de la Ville de Bruxelles, et de ce fait de la capitale de l’Union européenne, il n’est pas n’importe quel bourgmestre. C’est probablement la raison pour laquelle le bourgmestre de Kiev, Vitaly Klychko, l’ancien boxeur, a tenu à l’inviter.

Mais il y a probablement autre chose derrière ce voyage. Dans les premiers clichés qui nous sont parvenus, on voit notamment Philippe Close au chevet d’un blessé. La scène se passe à l’hôpital de Lviv, mais d’autres visites du même type sont prévues dans les prochains jours à Kiev. Et parmi les personnes qui accompagnent Philippe Close, il y a notamment une urgentiste de l’hôpital Saint-Pierre. Ce qui est en train de se mettre en place à travers ce voyage est une sorte de diplomatie des hôpitaux. Et on peut imaginer que d’ici à quelques jours, c’est un nouveau partenariat qui pourrait se mettre en place. Entre les hôpitaux bruxellois d’un côté, l’infrastructure de santé ukrainienne de l’autre. Et on rappellera quand même que Kiev, avec ses 3 millions d’habitants, fait partie de la vingtaine de villes jumelles avec lesquelles Bruxelles est associée.

Que des bourgmestres jouent ainsi les chargés de mission dit aussi beaucoup du changement de paradigme que nous sommes en train de vivre. Puisque officiellement, nous ne sommes pas en guerre avec la Russie, il est parfois difficile pour l’État belge d’affirmer franchement son soutien aux autorités ukrainiennes. Que les bourgmestres de Bastogne ou Bruxelles fassent le chemin de l’Ukraine est une manière de pallier une forme de prudence un peu excessive. Comme si la diplomatie des villes était en train de prendre de vitesse notre diplomatie fédérale.

Un édito de Fabrice Grosfilley