Toujours plus vers l’Est, l’édito de Fabrice Grosfilley
Ce lundi, Fabrice Grosfilley évoque dans son édito la demande d’adhésion de la Suède et de la Finlande à l’OTAN.
Il voulait repousser l’OTAN loin des frontières de la Russie. Et finalement, il va obtenir l’effet inverse. Vladimir Poutine va devoir vivre avec une alliance atlantique qui est en train de s’étendre vers l’Est.
La Finlande l’a confirmé hier et la Suède vient de l’annoncer officiellement aujourd’hui, elles sont donc désormais candidates à l’entrée dans l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord, cette alliance qui prévoit que toute attaque contre l’un de ses membres est une attaque contre l’ensemble de l’alliance. À ce jour, cette alliance, dont le siège est à Bruxelles, compte trente membres. Les derniers élargissements remontent à 2017 avec le Monténégro et à 2020 avec la Macédoine du Nord. Mais d’anciens membres du “bloc de l’Est”, comme on l’appelait autrefois, font partie de l’Alliance depuis le début des années 2000 : la Pologne, la Hongrie, la République Tchèque, les Pays baltes, la Slovaquie, la Slovénie, la Roumanie.
Ce grignotage progressif des anciens pays de l’Est est l’une des raisons mises en avant par Vladimir Poutine pour justifier l’invasion de l’Ukraine. La perspective que l’un de ses voisins intègre l’Union européenne et l’OTAN était jugée comme une menace par le pouvoir russe. Pour Moscou, l’Union européenne reste un concurrent économique et politique, qui, en imposant une autre gouvernance, avec le respect de l’État de droit, la séparation des pouvoirs éloigne ceux qui la rejoigne de la grande Russie, qui n’a pas tout à fait la même vision de la démocratie et de ce que doit être la vie politique. Quant à l’OTAN en elle-même, dont le pilier militaire reste la présence importante de forces américaines sur le territoire européen, elle est depuis toujours considérée comme une force ennemie par le pouvoir russe. Ce qui était vrai du temps de l’Union soviétique hier l’est toujours aujourd’hui.
En voulant mettre au pas l’Ukraine, Vladimir Poutine aura finalement obtenu l’effet inverse de ce qu’il recherchait. Non seulement, il n’a pas réussi à mettre son voisin au pas et son offensive militaire ressemble aujourd’hui à un enlisement, pour ne pas dire une défaite. Mais en prime, il a rendu l’OTAN encore plus désirable pour ceux qui n’y étaient pas encore. La Suède et la Finlande, deux pays pour qui le non-alignement était une signature diplomatique, ont donc sauté le pas de l’adhésion. Ces deux riverains de la mer Baltique sont régulièrement survolés par l’aviation russe, leurs eaux territoriales ont parfois la visite de sous-marins, ils ont alors jugé plus sûr de se mettre à l’abri en rejoignant l’OTAN. Pour la Russie, c’est un camouflet. Sa frontière avec la Finlande, jusqu’en 1918, appartenait à la Russie de Tsars et mesure plus de 1300 kilomètres de long.
Voici Vladimir Poutine avec un voisin direct membre de l’OTAN. Avec une mer Baltique, le débouché naturel de Saint Petersbourg qui bascule du côté de l’OTAN. Aujourd’hui, Vladimir Poutine a indiqué dans un discours qu’il ne considérait pas ce nouvel élargissement comme une menace immédiate, mais que le déploiement d’infrastructures militaires entraînerait une réponse. La menace est là. Elle ne masque pas une tendance de fond qui fait que pour les états d’Europe, l’OTAN agit aujourd’hui comme un aimant. Alors que l’alliance avec Moscou a les allures d’un repoussoir.
■ Un édito de Fabrice Grosfilley