Hadja Lahbib face au Parlement ce mercredi : retour sur l’affaire des visas iraniens

Cet après-midi à 15h, la ministre des Affaires étrangères Hadja Lahbib sera interrogée par la commission des Relations extérieures de la Chambre.

Jeudi dernier, la ministre des Affaires étrangères Hadja Lahbib (MR) a confirmé en séance plénière qu’elle avait octroyé des visas à une délégation iranienne. Le but de leur visite était de participer à la réunion du Brussels Urban Summit organisée en partie par Pascal Smet (Vooruit), le désormais ex secrétaire d’Etat bruxellois à l’Urbanisme, au Commerce extérieur et aux Relations internationales. Du 12 au 15 juin, la Région bruxelloise a mis en place un sommet mondial des villes. Ainsi, le réseau mondial de grandes villes Metropolis était invité. Mais le problème est que le vice-président de cette association est le maire de Téhéran, Alireza Zakani, un conservateur du régime iranien.

Le 20 mars, un haut responsable de la diplomatie belge en charge du Moyen-Orient recommande au secrétaire d’État Pascal Smet et aux dirigeants de Metropolis de ne pas inviter la délégation. À ce moment, la Belgique est confrontée à la détention d’Olivier Vandecasteel et les tensions avec le régime iranien sont très présentes.

Le 26 avril, les dirigeants de Metropolis jugent que la situation est très inconfortable et souhaitent qu’une communication directe entre Bruxelles et le maire de Téhéran soit faite. En effet, le refus officiel de la Belgique à la participation de la délégation iranienne n’a été mentionné qu’à travers un système informatique.

Le 10 mai, lors d’une conversation téléphonique entre Pascal Smet et Hadja Lahbib, la situation prend un autre tournant. Dans un mail reprenant le compte rendu, la ministre fédérale n’aurait pas exprimé de problème à inviter des villes russes ou iraniennes. Les visas n’allaient pas être bloqués, ni refusés.


La démission de Pascal Smet

Dimanche, le secrétaire d’État bruxellois Pascal Smet a décidé de démissionner à la suite de la polémique. Selon lui, il n’y a pas eu de pression afin d’autoriser les visas. “Nous n’avons jamais exigé que le maire lui-même soit présent. Nous voulions une délégation de la ville au niveau administratif et politique si cela pouvait être autorisé politiquement“, a déclaré Pascal Smet. “De plus, les courriels indiquent qu’il s’agissait principalement d’un ton informatif et de communication. Aucune pression n’a été exercée sur les Affaires étrangères“, a encore déclaré le secrétaire d’État.

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Dans un courriel, on peut également y lire que la Région bruxelloise a pris en charge les frais d’hébergement de membres de la délégation.

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Le cabinet du Premier ministre consulté

Hadja Lahbib a précisé qu’elle avait consulté le Premier ministre Alexander De Croo concernant ces visas iraniens. En toute fin de procédure, le 7 juin, Alexander De Croo a eu connaissance des demandes avant l’octroi des visas.

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Plus moyen de faire machine arrière. Des invitations officielles ont été envoyées et, selon le Premier ministre, la Belgique n’avait pas d’autres choix que de délivrer ces visas. Un refus aurait pu “humilier” l’Iran et mettre en danger certains otages européens, comme le professeur Djalali condamné à mort en 2017.

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Hadja Lahbib sur la sellette

Du côté de l’opposition, la N-VA demande qu’Hadja Lahbib démissionne, tout comme certains Ecolo. Pour le PS, ils attendent le discours du Premier ministre afin de calibrer leur avis. Même s’ils remarquent que la situation est très délicate et que la position de la ministre semble très compromise.

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Dans cette affaire, quelques zones d’ombre planent encore sur l’obtention de ces visas. Ils ont été délivrés dans la précipitation et dans des conditions inhabituelles, selon les informations de l’Écho. Le 15 mai, dans une circulaire encadrée par la ministre, il était noté que toute demande de visa devait être traitée individuellement. En cas de doute sur un des candidats, son visa pouvait être refusé. Mais, les demandes iraniennes ont été faites au dernier moment, en juin. Donc dans l’urgence, il a fallu opter pour une délivrance express. Un doute est alors permis : avec cette validation rapide, les services de sécurité ont-ils eu le temps de vérifier chaque profil ?

Autre élément, celui des invités. La liste des demandes iraniennes n’était pas la même que celle de la Région bruxelloise. En tout, treize personnes de la délégation ont reçu une lettre officielle. Pourtant, sept personnes ne faisaient pas partie de la liste envoyée à l’ambassade, car ils se sont inscrits après coup, le 3 juin.

C’est notamment sur ces questions que la ministre des Affaires étrangères devra s’expliquer ce mercredi devant les députés.

La Rédaction / Image : Belga