L’opposition Ecolo a dénoncé mardi le projet de réforme des médias de proximité avancé par la ministre Jacqueline Galant (MR), estimant que celui-ci allait à la fois nuire à la cohésion des territoires mais aussi réduire le pluralisme des médias en Fédération Wallonie-Bruxelles.
“Les médias de proximité ont pour mission de fournir une information de qualité très proche du quotidien des personnes qui vivent dans nos territoires”, a commenté Bénédicte Linard, ministre des Médias sous la précédente législature. “Seuls eux vont aussi loin dans la couverture de la réalité de ces territoires”. Pour les Verts, la réforme annoncée mardi par la ministre Galant est dès lors “incompréhensible” car on va “perdre des outils de cohésion dans lesquels les gens ont confiance“, souligne la cheffe de groupe Ecolo au parlement de la FWB. L’élue voit aussi dans les projets de la ministre Galant un affaiblissement de l’information de proximité, mais aussi “une nouvelle attaque contre les médias publics”. Pour Bénédicte Linard, le plan Galant entre en contradiction avec l’accord de majorité présenté il y a moins d’un an puisque la mesure va réduire le pluralisme des médias que la majorité entendait pourtant défendre. “C’est une nouvelle décision unilatérale de la ministre, sans véritable dialogue. Or, tous ces médias de proximité sont liés par des conventions dont l’évaluation était pourtant prévue à mi-parcours. On assiste donc à une nouvelle décision sans concertation. Mais on en a l’habitude maintenant…“, conclut la députée.
“La note va plus loin que ce qui avait été annoncé par la ministre”, réagit Matélé
Le plan présenté mardi par la ministre Jacqueline Galant concernant la rationalisation du secteur des médias de proximité en Fédération Wallonie-Bruxelles va plus loin que ce que la libérale avait annoncé, estime le directeur général de Matélé, Laurent Constantiello.
L’impact de cette réduction se ferait surtout sentir dans le Hainaut – qui compte aujourd’hui quatre médias de proximité, à savoir Télé MB, Notélé, Antenne Centre et Télésambre- ainsi que pour les trois acteurs établis en province de Namur – Bouké, Matélé et Canal Zoom, ce dernier couvrant une commune namuroise et trois brabançonnes. “De manière générale, la note va plus loin que ce qui avait été annoncé par la ministre. Il était en effet question de geler les indexations, mais pas de raboter une seconde fois les subventions allouées aux médias de proximité”, a-t-il déclaré sur le site internet de Matélé. Ce média de proximité touche une aide directe de la Fédération Wallonie-Bruxelles de 650.000 euros. “On nous demande plus de synergies, mais on supprime l’organe qui les facilite. La ministre parle de coconstruction, mais force ensuite la main de manière unilatérale. On s’écarte fort du scénario de fusions volontaires inscrites dans la déclaration de politique générale du gouvernement”, a-t-il encore regretté.
Laurent Constantiello est revenu sur les visites de terrain effectuées par la ministre au sein des différentes rédactions des médias de proximité. “Ces visites durant lesquelles on a pu échanger et montrer des choses en termes de bonnes pratiques n’ont pas été entendues. On a pourtant mis en avant une certaine efficience, on a essayé de lui montrer ainsi qu’à son cabinet qu’il y avait des bonnes pratiques qui permettent à une petite structure d’être agile et constructive”, a-t-il encore déclaré. Ce dernier regrette que les décisions prises par la ministre Galant l’ont été en fonction des provinces. “J’aurais préféré qu’on prenne des éléments du métier en compte et qu’on ne se limite pas à un découpage archaïque par province. Matélé a mis beaucoup de choses en place pour répondre au digital, on a mis nos journalistes en JRI (journaliste reporter d’images) pour plus de productivité, on a des synergies avec Booké et TV Lux… On est déjà dans une dynamique d’innovation et d’évolution.”
Si la province de Namur compte bien moins de communes que celles de Liège ou de Hainaut, en termes de superficie, elle est pratiquement aussi étendue que ces deux autres provinces. “Si on ne va pas à Bièvre ou Vresse-sur-Semois, personne n’ira. La RTBF reprend déjà pas mal de nos sujets dans ses JT, on a déjà une belle complémentarité avec elle. Au niveau de notre collaboration, c’est difficile d’aller plus loin de ce qu’on fait déjà maintenant. “
Le conseil d’administration de Matélé va désormais analyser cette note. “On va travailler à une réponse commune avec le réseau de médias de proximité mais aussi individuelle au niveau de Matélé. Tout comme Booké, nous avons construit notre identité, on a l’adhésion dans notre zone et on n’a pas envie de détruire ce projet-là. Matélé a 47 ans et on a envie de continuer sur cette voie.”
“Une mesure qui va affaiblir le pluralisme des médias”, déplore le PS
L’opposition PS en Fédération Wallonie-Bruxelles a dénoncé mardi le projet de réforme des médias de proximité de la ministre Galant qui, selon les socialistes, va réduire le pluralisme et la diversité du paysage médiatique francophone.
“Les médias de proximité sont l’un des garants de la démocratie car ils permettent aux citoyens de s’informer de manière différente sur leur ville et région. Plus on a de médias qui s’expriment, plus on a une pluralité des informations”, fait valoir la députée communautaire Sabine Roberty, spécialisée sur les dossiers médias. “Défendre les médias de proximité est donc essentiel car ils font partie intégrante du paysage médiatique, d’un ensemble. Quand on s’attaque à un, on s’attaque à tous…”, estime encore la députée. Celle-ci ne voit en réalité dans les choix de la ministre Galant qu’une simple “logique budgétaire”. “La ministre Galant, déjà quand elle était députée, trouvait qu’il y en avait trop. Or, leur budget ne représente en réalité que 0,075% du budget de la Fédération Wallonie-Bruxelles! Ce n’est pas ça qui va sauver la Fédération”.
Pour Mme Roberty, plutôt que de contraindre les télévisions locales à fusionner, il conviendrait plutôt d’instaurer un cadre où des fusions pourraient intervenir “sur base volontaire, de manière sereine”. Plutôt que de forcer, les socialistes estiment que le gouvernement devrait encourager davantage les synergies entre médias de proximité entre eux, ainsi qu’avec la RTBF. La ministre Galant a proposé mardi un plan pour réduire de 12 à 8 en cinq ans le nombre de médias de proximité en FWB. Son objectif est de ne plus compter d’ici 2031 au plus tard qu’une télé locale par province, à l’exception du Hainaut et de Liège qui pourraient en avoir deux vu leur poids démographique plus important.
“Il faut tenir compte des spécificités des médias de proximité” (Sépul)
Le réseau des médias de proximité (RMDP), qui représente l’ensemble des médias de proximité de Wallonie et de Bruxelles, entend mettre les semaines à venir à profit pour élaborer plusieurs réponses au plan de réforme présenté mardi par la ministre Galant pour les télévisions locales.
“Il y a des choses à faire pour faire évoluer le paysage audiovisuel en Communauté française, mais ce qui est important, c’est de tenir compte aussi des spécificités des médias de proximité, c’est-à-dire des missions de service public qu’ils jouent et du fait qu’ils mettent en valeur nos territoires”, a commenté mardi Sandrine Sépul, directrice du RMDP, après la réunion avec la ministre. “Ceux-ci jouent un rôle essentiel dans la transmission d’informations de qualité, ce qui est aujourd’hui un véritable enjeu dans la société dans laquelle on vit”, a-t-elle ajouté. La ministre Galant a proposé mardi aux acteurs du secteur de réduire le nombre de médias de proximité de 12 à 8 en d’ici 2031, en conservant un média par province, à l’exception du Hainaut et de Liège qui pourraient en avoir deux vu leur poids démographique. “Il ne faut pas réfléchir en termes de nombre de médias, mais plutôt en termes de vision”, estime Mme Sépul. “Quelle vision veut-on du paysage audiovisuel en Communauté française? Quelle place veut-on donner à l’information de proximité, à la mise en valeur des territoires? C’est dans cette optique-là qu’il faut réfléchir”, selon elle. Si Sandrine Sépul dit comprendre la nécessité d’économies, elle invite toutefois à ne pas perdre de vue “la cohérence (de la réforme) par rapport aux territoires”.
Parmi les mesures proposées mardi, la ministre Galant propose notamment de mettre un terme à la subvention du RMDP par la FWB. Pour sa directrice, cet outil est toutefois précieux. C’est là que s’organisent les différentes synergies qui existent aujourd’hui entre médias de proximité. “C’est donc important que ce réseau puisse subsister, quitte à revoir son fonctionnement”, conclut Mme Sépul.
La prochaine rencontre entre la ministre et le secteur est prévue le 10 juin prochain.
“Travailler ensemble pour maintenir un certain pluralisme”, réagit Antenne Centre
L’annonce concernant l’avenir des médias de proximité, présentée mardi par la ministre des Médias Jacqueline Galant, n’est pas une surprise pour Antenne Centre, le média de la région du Centre dans le Hainaut, a réagi son directeur Michael Kaibeck.
“On s’attendait à quelque chose de cet acabit”, confirme-t-il. “Je retiens surtout que c’est une ‘pièce à casser’, comme l’a souligné la ministre. Nous avons quelque chose sur la table, enfin un document après plusieurs mois de discussions. On peut donc partir sur des discussions et faire nos propositions pour construire l’avenir du secteur.” Le Hainaut est une des provinces qui pourraient être les plus touchées par le projet: le Hainaut compte actuellement quatre médias de proximité (Télé MB, Notélé, Antenne Centre et TéléSambre) et l’objectif serait de revenir de quatre à deux opérateurs. “Je ne suis pas opposé à une quelconque évolution du secteur des médias de proximité mais je dis toutefois que passer de quatre à deux en Hainaut, c’est ne pas tenir compte de certaines réalités”, ajoute Michael Kaibeck. “Il faut être conscient que si on passe de quatre à deux chaînes en Hainaut, c’est tout un pan de la proximité qui va être mis à mal en termes d’actualité et d’information. On travaille sur les zones de couvertures mais aussi sur les subsides. Donc avec moins d’argent et des zones plus grandes à couvrir, c’est la proximité, le service final au citoyen qui vont s’en ressentir.”
L’idée avancée mardi par la ministre Galant est de voir la FWB ne plus subsidier à partir de janvier 2031 qu’un média de proximité par province seulement, à l’exception du Hainaut et de Liège. Vu leur poids démographique, celles-ci pourraient en disposer de deux chacune. “Il est très compliqué de se projeter sur les cinq années à venir”, ajoute Michael Kaibeck. “Il y a beaucoup de travail sur la planche, toute cela doit faire l’objet de réflexions, de discussions, de négociations. Il y a beaucoup de paramètres à prendre en compte, notamment la santé financière des uns et des autres, les zones de couverture, le personnel. Ces éléments nécessitent réflexion. Une chose est certaine, c’est qu’on va vers une transformation du secteur et qu’on va travailler tous ensemble pour faire en sorte qu’elle soit la moins douloureuse possible d’un point de vue social et au niveau de la qualité des contenus et, donc, de l’aspect démocratique. Nous devons ensemble faire en sorte qu’un certain pluralisme des médias soit maintenu.”
Belga