Procès des attentats de Bruxelles : de nombreux experts présentent leurs conclusions

Abrini dans le box des accusés - Photo BELGA PHOTO JONATHAN DE CESARE

La cour d’assises de Bruxelles chargée du procès des attentats du 22 mars 2016 entend ce mardi plusieurs experts dans différents domaines.

Des médecins légistes, des odontologues, un spécialiste des explosifs, des experts de l’Institut national de criminalistique et de criminologie (INCC) et un spécialiste de la balistique viennent éclairer le jury de leurs connaissances.

L’audience de lundi, très technique, s’est majoritairement concentrée sur les analyses ADN réalisées dans le dossier. Un toxicologue et un graphologue sont également intervenus.

Mercredi, la journée débute avec les témoignages de Mohammed Bakkali et de Yassine Atar, incarcérés en Belgique après leur condamnation dans le dossier des attentats de Paris de 13 novembre 2015. L’audition du terroriste du Thalys, Ayoub El-Khazzani, a, elle, été annulée, l’homme ayant refusé d’être transféré depuis sa prison française pour se présenter devant la cour.

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Belga – Photo d’illustration (6 avril 2023)


9h47 – Seuls trois accusés sont dans le box ce mardi

Si la salle d’audience de la cour d’assises chargée de juger les attentats du 22 mars 2016 à Bruxelles s’est quelque peu vidée de son public depuis la fin de l’interrogatoire des accusés, c’est également le cas du box de ces derniers. Mardi matin, ils n’étaient ainsi que trois à s’y trouver pour assister aux débats.

Tout comme lundi, Salah Abdeslam, malade, était absent. Il en allait de même pour Hervé Bayingana Muhirwa, qui est également resté à la prison de Haren.

Parmi les accusés présents en début d’audience mardi, Osama Krayem a, comme à son habitude, demandé à retourner en cellule. Sofien Ayari l’a imité, expliquant être quelque peu souffrant. Il ne reste dès lors que trois accusés dans le box: Bilal El Makhoukhi, Ali El Haddad Asufi et Mohamed Abrini. S’ajoute à ce trio Smail Farisi, qui comparait libre à ce procès. Son frère Ibrahim Farisi était lui absent en début de journée.

Les bancs n’étaient pas clairsemés qu’au niveau des accusés. Leurs avocats n’étaient pas non plus très nombreux pour écouter les témoignages des experts entendus mardi.

Même constat du côté des avocats des parties civiles, des journalistes ou du public.


11h23 – Les experts donnent leurs conclusions sur les armes, mais ont peu à dire

Trois experts en balistique ont été appelés à la barre, mardi matin, devant la cour d’assises de Bruxelles, au procès des attentats du 22 mars 2016, pour parler notamment de deux armes retrouvées à proximité des corps des kamikazes à l’aéroport de Zaventem.

Le bref résumé des rapports des experts a contrasté avec les questions nombreuses et larges des jurés, curieux d’en savoir plus au sujet des filières d’acheminement des armes en général, des prix de vente sur le marché noir ou encore de la technique de neutralisation et de “déneutralisation” d’une arme.

Jan De Ceuster, expert en balistique à l’Institut national de criminalistique et de criminologie (INCC), a expliqué qu’il avait été requis sur les lieux de l’attentat à l’aéroport de Zaventem, le 22 mars 2016, afin d’analyser deux armes retrouvées à proximité des restes humains des deux kamikazes. Il s’agissait d’une arme de poing de type revolver contenant cinq cartouches de calibre 22 et d’un pistolet de marque Crvena Zastava de calibre 7.65, qui était également chargé.

Le travail de l’expert s’est limité à identifier et décrire ces armes, car celles-ci n’ont pas servi lors des attaques. “Le pistolet de marque Crvena Zastava est-il une arme courante?“, a notamment demandé l’un des juges assesseurs, à quoi André Chabotier, également expert en balistique, a répondu non, précisant qu’il s’agissait d’une arme produite dans les années 1970.

Comment remet-on en opération une arme qui a été neutralisée ?“, a également questionné un juré. Pour le même expert Chabotier, bien que la procédure pour rendre une arme inutilisable est plus complexe qu’avant, un “bon artisan” peut inverser le processus, mais il doit être extrêmement qualifié.

Enfin, ce sont des questions sur les filières d’acheminement des armes à l’époque des attentats et sur les prix de celles-ci sur le marché noir qui ont émané du jury. Selon les experts, des armes comme le pistolet Crvena Zastava proviennent de conflits armés.

On voit certains types d’armes plus souvent pendant un certain temps par exemple, et c’est en lien avec les guerres. Cela a été le cas des kalachnikovs après le conflit des Balkans dans les années 1990. Il y a aussi déjà des armes qui reviennent d’Ukraine aujourd’hui“, a exposé André Chabotier.

Un troisième expert de l’INCC, Sébastien Charles, a également présenté les résultats de ses analyses en résidu de poudre qu’on lui avait demandé d’effectuer, en 2019, sur un sac retrouvé dans l’une des planques de la cellule terroriste. “Les résultats viennent soutenir l’hypothèse que ce sac a été en contact avec une arme à feu ou un objet qui a été contaminé par des résidus de tir. Mais on n’est pas face à une énorme quantité de résidus de tir. L’origine de ces traces est soit une arme soit une personne qui a été contaminée par des résidus de tirs sur les mains et qui a manipulé le sac“, a-t-il développé.


13h30 – Le TATP est une substance très sensible et le risque d’explosion est constant

L’expert Alexandre Herman, de l’École royale militaire, spécialisé dans l’analyse des composants chimiques d’explosifs, a présenté mardi matin, devant la cour d’assises de Bruxelles qui juge les attentats du 22 mars 2016, les résultats de ses analyses. Elles ont été effectuées notamment sur des vêtements retrouvés dans les planques de la cellule terroriste. Mais le chimiste a surtout été questionné sur le procédé de conservation du TATP et sur sa sensibilité.

Alexandre Herman a présenté le résultat de ses analyses effectuées sur neuf vêtements que les enquêteurs lui ont remis. Il s’agissait de vestes, pulls et pantalons saisis dans les planques de la cellule terroriste, notamment celle de la rue Max Roos à Schaerbeek où environ 130 kilos de TATP ont été fabriqués en quinze jours en mars 2016. Sur les neuf vêtements analysés, quatre contenaient des “quantités significatives d’acide sulfurique”.

Sur question de la présidente, l’expert a précisé qu’il est peu probable que des ions d’acide soient présents sur les vêtements d’une personne qui ne manipule pas ladite substance. Mais, a-t-il ajouté, il est possible que le TATP, après s’être évaporé en partie, se cristallise ensuite sur les vêtements, bien que cet explosif est “peu volatil”.

Une autre question posée par la présidente de la cour a porté sur la conservation du TATP. “Si l’on fabrique cela en avril pour un projet [d’attentat] en juin, qu’en est-il de l’efficacité?”, a-t-elle demandé. Pour rappel, il ressort de divers éléments de l’enquête que la cellule terroriste voulait de nouveau frapper la France, lors de l’Euro de football en juin 2016, mais qu’elle a finalement agi dans la précipitation, à Bruxelles, le 22 mars, à la suite de l’arrestation de Salah Abdeslam. Selon Alexandre Herman, le TATP peut rester dans son contenant sans être altéré pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois.

L’expert a toutefois précisé que l’explosif, qui a l’aspect d’une poudre blanche, est toutefois très sensible et représente un risque d’explosion permanent, dès que la température change par exemple ou en cas de choc du contenant.


16h17 – Le blast et les projectiles sont les principales causes des décès à Maelbeek

La cour d’assises de Bruxelles a été replongée, mardi après-midi, au procès des attentats du 22 mars 2016, dans les éléments d’enquête les plus difficiles du dossier sur le plan émotionnel. Les médecins légistes qui ont réalisé les autopsies des victimes à la station de métro Maelbeek ont exposé en détails les résultats de leurs examens. Il ressort de ces derniers que les principales causes des décès sont tout d’abord le blast (souffle de l’explosion) et les nombreux écrous et boulons que contenait la bombe.

Ce sont treize corps qui ont été retrouvés dans la station de métro Maelbeek, a tout d’abord expliqué le docteur Grégory Schmit, médecin légiste. Trois étaient étendus sur le quai, huit ont été découverts dans la rame de métro, et deux autres ont été trouvés entre la rame et le quai opposé.

L’expert légiste a détaillé les lésions traumatiques relevées sur ceux-ci, affirmant que plusieurs victimes étaient gravement mutilées au niveau du haut du corps en raison d’amputations, de dilacérations et de “polycriblage” causé par les projectiles de la bombe. Les constatations médico-légales montrent aussi, notamment, que le corps de la victime Janina Panasewicz a servi de bouclier devant une autre victime, Marie Lecaille, dont le corps était moins endommagé.

Le docteur Schmit a également mentionné un fait particulier: un document d’identité de Léopold Hecht, décédé à l’hôpital le lendemain des attentats, se trouvait dans la poche de la veste d’une victime décédée sur place, Raghavendran Ganeshan. Cette anecdote démontre l’importance de la procédure d’identification des victimes. Bien qu’elle ait été longue, et l’attente extrêmement difficile pour les familles des victimes, celle-ci est nécessaire pour ne pas commettre d’erreur. “C’est vrai que ça prend du temps, mais ça permet d’être certain de qui il s’agit. Une erreur sur l’identité d’une victime serait pire encore”, a commenté le médecin légiste. “On n’a pas chômé. On a travaillé le plus vite possible”, a-t-il assuré.

L’expert a recensé trois causes de décès à Maelbeek. La première est l’effet du blast et l’onde de surpression. “L’onde frappe les corps et crée des lésions aux poumons et aux tympans notamment. De plus, il y a un ricochet sur les murs et d’autres surfaces, ce qui fait que l’onde frappe plusieurs fois les corps”, a-t-il expliqué. La seconde cause sont les lésions “projectilaires” ou “de polycriblage”, autrement dit les écrous et les boulons qui sont projetés à une vitesse très importante. Pour montrer ces dégâts, les médecins légistes ont projeté des images radio dévoilant la présence de nombreux projectiles dans les corps. Enfin, la dernière cause de décès sont les lésions thermiques, autrement dit les brûlures.

Belga