Plan de stationnement à Schaerbeek : des riverains déposent un recours au Conseil d’Etat
Plusieurs riverains ont déposé, ce jeudi, une requête en annulation au Conseil d’Etat contre le plan de stationnement en vigueur depuis janvier, qu’ils estiment illégal.
Il faut remonter en janvier dernier pour comprendre la génèse de ce recours. La commune de Schaerbeek adopte alors une nouvelle politique de stationnement : l’entièreté du territoire communal passe alors en zone verte, payante à hauteur de 2 euros l’heure en l’absence de carte de riverain, de 9h à 21h, samedi compris. Et ce, alors qu’une partie du territoire était auparavant en zone bleue, gratuite moyennant l’apposition d’un disque de stationnement. Un nouveau plan, qui est mal passé auprès de certains riverains.
“La nouvelle politique de stationnement rompt le lien social”
“C’est une politique assez extrême dans son application. Cela a un réel impact sur la vie sociale. Schaerbeek a avancé que cette zone était nécessaire pour apaiser les quartiers et permettre aux riverains de se garer. Mais beaucoup de gens reçoivent des invités, des personnes âgées ont besoin d’aide, des grands-parents aident à garder leurs petits-enfants, certains corps de métier doivent passer à domicile, etc. La nouvelle politique de stationnement rompt le lien social : lorsque je souhaite recevoir ma famille, ils ne viennent pas à cause du coût du parking, deux euros de l’heure“, évoque Vanessa Durieux, l’une des riveraines à l’origine du recours introduit mercredi au Conseil d’Etat, “Effectivement, il y a des problèmes de stationnement dans certains quartiers, et des mesures étaient nécessaires. Mais d’autres quartiers, résidentiels, ne connaissaient pas de problèmes de parking, et il était donc inutile d’y imposer cette zone“.
Ces riverains déplorent également la gestion de Parking.Brussels, qui gère le stationnement à Schaerbeek depuis le début de l’année. “Nous recevons des dizaines de mails de riverains ahuris de la façon dont tout est géré : des personnes avec des cartes de riverains sont quand même verbalisés, et même des personnes avec des enfants handicapés alors qu’ils ont une carte PMR“.
Décision a alors été prise, dans le chef de ces riverains mécontents, de lancer une pétition, en février, qui récoltera près de 7.600 signatures. Suite à cette pétition, les riverains interpelleront le conseil communal, mais “rien n’a bougé“, évoque la riveraine Vanessa Durieux, “la commune a simplement promis de réaliser une évaluation du nouveau dispositif au mois de juin, avec des résultats en octobre“.
“Un rapport est attendu après l’été“, nous confirme l’échevine de la mobilité, Adelheid Byttebier (Groen), “Nous construisons déjà ce rapport concernant les impacts du règlement à Schaerbeek. Nous avons demandé à Parking.Brussels de récolter des data avec ses scan cars, notamment durant le confinement“. Le rapport devrait être discuté en automne.
► En janvier, notre équipe avait rencontré plusieurs riverains en colère
En juin, un recours au Conseil d’Etat contre un plan considéré illégal
Ce jeudi, ces riverains ont déposé un recours au Conseil d’Etat, pour demander l’annulation du règlement. “Nous avons essayé de dialoguer avec la commune, mais elle a fait front. Ils ne nous restait donc que les recours juridiques pour aborder le problème“, justifie Vanessa Durieux.
Dans ce document, dont nous avons obtenu une copie, les riverains abordent une série de points liés au nouveau plan de stationnement. “Pour nous, la commune n’a pas respecté le cadre réglementaire régional qui s’impose à elle, et qui indique que chaque commune doit adopter un PACS contraignant (plan d’action communal de stationnement), un document de référence qui expose comment la commune applique le cadre régional de stationnement, et comment sa propre politique communale est développée. Si on souhaite le modifier, il faut passer par une procédure bien spécifique, qui prévoit l’obligation d’une enquête publique, d’une consultation avec les communes limitrophes et la soumission d’un dossier à la Région, qui doit être approuvé par le gouvernement. La commune n’a pas suivi cette procédure, qui est impérative pour un changement aussi important“, explique la riveraine.
“De même, selon une ordonnance régionale, les communes doivent réaliser tous les deux ans une évaluation du PACS, ce qui n’a pas eu lieu. On a donc modifié une situation qui n’a pas été évaluée, alors qu’il était indiqué texto, dans le premier PACS, que le plan de stationnement avait montré son efficacité, et qu’il n’y avait pas de raison pour le modifier“, évoque Vanessa Durieux, “Nous avons demandé des arguments objectifs pour expliquer ce changement de cap, et on nous a répondu par un grand silence : aucun argument objectif n’a été avancé pour la conversion des zones bleues en zones vertes, sauf le volet financier, qui est la principale raison selon nous“.
Les auteurs du recours espèrent, avec ce recours au Conseil d’Etat, l’annulation du nouveau plan de stationnement, “et une remise en question de la commune concernant sa manière d’agir. Le parcours de jogging autour du Parc Josaphat est un nouvel exemple que la commune agit sans concertation préalable avec les citoyens, mais privilégie la politique du fait accompli : la commune met des choses en place en espérant que cela va rester, et c’est aux riverains de rouspéter pour revenir à la situation d’origine“, conclut la riveraine Vanessa Durieux.
“Le plan est parfaitement en règle”, estime l’échevine
Du côté de l’échevine de la Mobilité, “le plan de stationnement est parfaitement en règle“, répond Adelheid Byttebier (Groen), qui n’avait pas encore pris connaissance de la totalité du recours,”Concernant les craintes comme quoi nous n’aurions pas averti en bonnes formes le niveau régional des changements, nous avons pourtant eu confirmation auprès de la commission consultative régionale que nous avions fait le nécessaire correctement auprès du gouvernement bruxellois“.
Sur la question de l’enquête publique, “la couleur des zones peut changer, selon notre information, sans enquête publique. Ainsi, un plan de stationnement donne les instruments avec lesquels on travaille : des zones bleues, vertes, d’abords d’école, de livraison, etc. Si un nouveau supermarché s’implante, il faut créer une nouvelle zone de livraison, et cela se fait sans enquête publique, mais en suivant les règlements policiers“, explique l’échevine.
“Si ces riverains ont assez éléments pour aller au Conseil d’Etat, cela sera une discussion entre juristes, pour voir si ce plan a été correctement suivi ou non“, conclut Adelheid Byttebier, “mais pour nous, c’est bien le cas“.
Arnaud Bruckner – Photo : BX1