Palais des droits : “Peut-être devrions-nous demander un salaire à Mme de Moor pour faire son travail”

Les avocates en charge de plusieurs occupants du Palais des droits accusent les autorités fédérales de déléguer un travail qui leur est normalement dévolu, à savoir le recensement des habitants. Celui-ci est capital afin de poursuivre les transferts vers le réseau Fedasil. L’une de ces avocates, Marie Doutrepont, est l’invitée du 12h30.

La situation s’enlise au Palais des droits à Schaerbeek, où depuis plusieurs mois, des centaines de personnes ont trouvé refuge dans des conditions désastreuses. Le transfert des occupants vers le réseau de Fedasil se poursuit, mais celui-ci est compliqué par la présence dans le bâtiment de nombreuses personnes qui ne sont pas des demandeurs d’asile, explique le cabinet de la secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration Nicole de Moor (CD&V). Cette dernière compte sur les avocats pour établir une liste des occupants qui ont réellement droit à une place d’accueil.

Les avocats visés par la Secrétaire d’Etat sont en réalité les trois avocates ayant lancé une procédure contre l’Etat belge pour une série de personnes qui résidaient dans la rue des Palais et qui ont été hébergées entre-temps“, précise Marie Doutrepont. “Nous lui avons alors répondu de faire réellement la demande aux avocats, c’est-à-dire à tous les ordres du pays, et de leur envoyer un formulaire à remplir. Quand nous avons suggéré ce formulaire, la cabinet de la Secrétaire d’Etat nous a demandé si nous pouvions l’établir nous-même. Peut-être devrions-nous à un moment demander un salaire à Mme de Moor pour faire son travail. Ce serait comique si ce n’était pas tragique“, déplore-t-elle.

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L’avocate rappelle que le recensement des personnes qui résident dans la Palais des droits est le travail de l’administration. “Nous avons pu communiquer les coordonnées de nos clients qui résidaient à la rue des Palais. Nous avons aussi communiqué une liste d’une centaine de personnes pour qui une ONG indépendante spécialisée avait obtenu des mesures auprès de la Cour européenne des droits de l’Homme”, explique-t-elle.

Pour le surplus, Marie Doutrepont estime qu’il appartient à Fedasil – qui est en fait l’instance compétente en la matière et qui a la capacité de le faire avec un service spécialisé – de s’en occuper. “S’ils ont peur de rentrer dans le bâtiment, ils peuvent mettre un conteneur à l’entrée comme l’a fait la Croix-Rouge et nous sommes totalement prêts à collaborer. Mais je trouve cela en tout cas assez énorme que l’on demande à trois avocates de faire la liste des 1.000 personnes qui résident là. Qu’en est-il du RGDP et de la déontologie ? Il s’agit d’une demande officielle et, puisque nous avons refusé, maintenant c’est nous qui bloquons la situation.

“Si l’on fait sortir 100 personnes, 100 autres vont rentrer”

Par ailleurs en ce qui concerne le futur de ce bâtiment, l’avocate ne voit que deux options. “Sur le fond, c’est très bien de recenser les habitants de la rue des Palais et de vouloir vider le bâtiment. Le problème, c’est que si l’on fait sortir 100 personnes toutes les semaines, 100 autres vont rentrer. À mon sens, la seule solution est soit de trouver 1.000 places et de vider tout le monde d’un coup, soit de faire en sorte que ce bâtiment puisse remplir sa fonction initiale d’accueil, ce qui ne me semble pas très compliqué.”

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■ Une interview de Marie Doutrepont, avocate, au micro de Jim Moskovics et Murielle Berck