Manifestation nationale : des milliers de personnes à Bruxelles contre le projet d’interdiction de manifester

La société civile et les trois syndicats FGTB, CSC et CGSLB en front commun, se sont réunis ce jeudi pour manifester contre le projet de loi du ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne (Open VLD). Selon les organisateurs, ce projet d’interdiction judiciaire de manifester menace le droit démocratique “fondamental” à la manifestation. Le vote du texte, initialement prévu ce jeudi, n’a finalement pas été mis à l’ordre du jour de la séance plénière de la Chambre.

Plus de 10.000 personnes selon les syndicats et 7.000 selon la police, se sont donné rendez-vous dès 10h00 devant le cabinet Van Quickenborne. En musique, sous les fumigènes et les pétards, ils ont offert une toilette publique au ministre de la Justice. “Avec sa loi, pour un pipi dans une manifestation, certains activistes pourraient se voir interdire de manifester“, illustrent-ils, en écho à la polémique ayant entouré la fête d’anniversaire du libéral flamand durant l’été.

Le cortège vert, rouge et bleu, s’est ensuite rendu devant les sièges des partis de gauche du gouvernement fédéral (Ecolo, Groen, PS, Vooruit) pour les pousser à ne pas voter cette loi.

Des prises de parole de la FGTB, de la CSC, de la CGSLB, d’Amnesty International, de Greenpeace et de la Ligue des droits de humains ont également eu lieu. “On pense que cette loi va provoquer un étouffement de l’élan de mobilisation chez certaines personnes. Ce texte, dont les contours sont trop flous, risque d’installer un climat de peur et d’inertie, forcément dangereux pour notre droit de protester et notre démocratie“, a dénoncé le porte-parole de Greenpeace Belgique Antoine Collard à Belga.

La crainte principale des manifestants est que cette loi ne devienne un levier pour restreindre les manifestations, même pacifiques. Une des parties de ce texte concerne en effet l’interdiction judiciaire de manifester, qui permet aux juges d’interdire aux émeutiers, de manifester pendant jusqu’à trois ans.

Avec cette loi anti-casseurs, le gouvernement stigmatise les personnes dites ‘violentes’ pendant les manifestations, et s’autorise à interpréter arbitrairement ce qui est violent de ce qui ne l’est pas. Alors qu’en tant que citoyenne, le droit de manifester est précisément un levier essentiel pour réagir face à la violence d’État quand il y en a“, s’est inquiété une jeune manifestante ce jeudi.

Le ministre de la Justice réagit

Le cabinet de Vincent Van Quickenborne a réagi jeudi dans un communiqué, précisant que “cette mesure ne peut être imposée qu’aux personnes reconnues coupables de faits graves de violence contre des personnes ou des agents de police et de destruction grave de biens d’autrui ou d’infrastructures publiques. Cela n’inclut pas l’apposition de graffitis, le barbouillage de façades, le jet de pétards, ou les cris contre un agent de police“.

En outre, “le juge devra mettre en balance la gravité des faits et l’atteinte aux droits et libertés fondamentales“, a indiqué le cabinet.

En plus de dénoncer l’interprétation vaste de la loi, les manifestants posent également la question de la mise en pratique de celle-ci. “Concrètement, comment les autorités vont-elles contrôler l’application de la peine ? Cela signifie-t-il que des contrôles d’identité auront lieu dans des manifestations, ou que des caméras seront utilisées ? Sachant que des manifestations ont lieu tous les jours à Bruxelles, les personnes interdites de manifester pourront-elles encore circuler dans la ville ?“, a questionné le coordinateur du bureau des études de Bruxelles (FGTB) Samuel Droolans.

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Avec Belga

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Reportage de Marie-Noëlle Dinant, Nicolas Scheenaerts et Yannick Vangansbeek