Loyers abusifs : la création d’une commission paritaire en débat au Parlement bruxellois

Ce sera probablement l’une des mesures emblématiques de la législature : le Parlement bruxellois va se pencher sur une ordonnance destinée à lutter contre les loyers abusifs.

Verra-t-on bientôt la création d’une commission paritaire locative, à Bruxelles, afin de lutter contre les loyers abusifs dans la capitale ? La commission Logement du Parlement bruxellois se réunit ce jeudi après-midi pour débattre d’une proposition d’ordonnance émanant de députés de la majorité (Martin Casier pour le PS, Faouad Ahidar pour one.brussels, Arnaud Verstraete pour Groen, Zoé Genot pour Ecolo, Carla Dejonghe pour l’Open VLD et Joëlle Maison pour DéFI), “visant à instaurer une commission paritaire locative et à lutter contre les loyers abusifs“, peut-on ainsi lire dans la convocation de commission, que notre rédaction s’est procurée.

Dans le même temps, une proposition d’ordonnance sera également défendue par les députés PTB pour rendre contraignante la grille des loyers, en parallèle de l’instauration de la même commission paritaire locative.

► Interview | Françoise De Smedt, cheffe de groupe PTB au Parlement bruxellois, était l’invitée de Toujours + d’Actu ce jeudi midi

Si l’ordonnance portée par la majorité est adoptée, la commission paritaire locative devrait entrer en fonction au plus tard début 2022. Alors, comment fonctionnera-t-elle ? Aujourd’hui, il existe à Bruxelles une grille de référence qui tient compte de la taille des biens, du quartier, etc (grille qui est d’ailleurs en cours de recalcul, et devrait être révisée début 2022), et qui définit de manière non-contraignante les loyers pour chaque type de bien.

Si on est 20% au-dessus du cadastre des loyers défini par la grille de référence, le propriétaire est présumé abusif. Il pourrait cependant se justifier, car effectivement il y a des appartements qui ont de bonnes raisons de dépasser ces montants-là [équipements particuliers, rénovations très haut de gamme, etc – NDLR] Mais la présomption est qu’il est abusif, et c’est au propriétaire de se défendre. Et à l’inverse, même si on ne dépasse pas ce montant, le locataire peut estimer que les qualités intrinsèques du bien ne sont pas suffisantes par rapport au loyer demandé, et donc là aussi faire valoir ses droits pour demander une réduction de loyer“, expliquait mardi à notre micro Martin Casier, député bruxellois PS, et l’un des auteurs de la proposition d’ordonnance, “La commission paritaire rendra alors des avis, et pourra dire si la demande de révision est fondée. Et puis c’est le juge de paix qui tranchera en faveur ou en défaveur de l’un ou l’autre

Interview de Martin Casier, député bruxellois PS

► Interview | Martin Casier, député bruxellois PS, était l’invité de Toujours + d’Actu ce mardi midi (06/07/2021)

 

Pour les locataires, on est satisfait mais “on pourrait aller plus loin

Reste que cette proposition d’ordonnance divise les syndicats des locataires et des propriétaires. Pour le premier, la proposition est une avancée importante dans le droit à l’habitat, un pas dans la bonne direction.

Néanmoins, “la grille de référence doit être contraignante“, estime José Garcia, secrétaire général du Syndicat des Locataires, “puisqu’effectivement je ne vois pas pour quelle raison un bien qui vaut x pourrait être loué y. Qu’on admette cela pour la vente, pourquoi pas, mais je dirais que pour des biens de première nécessité, dont le logement fait partie, je ne vois pas pourquoi un bailleur pourrait fixer un loyer au dessus de la valeur. Je ne comprends vraiment pas ce qui pourrait motiver une telle attitude“.

Interview de José Garcia, secrétaire général du Syndicat des Locataires

Les propriétaires s’opposent à la création de la commission

À l’inverse, du côté des propriétaires, on s’oppose fermement à la création de cette commission paritaire locative. “Nous sommes absolument opposés à la création d’une commission paritaire locative car les juges de paix sont actuellement compétents pour traiter d’éventuels loyers abusifs qui seraient pratiqués entre un bailleur et un locateur“, nous explique Eric Mathay, président de la régionale bruxelloise du syndicat national des propriétaires, “D’ailleurs, il y a encore eu récemment un jugement rendu par la justice de paix de Saint-Gilles en cette manière, et il prouve bien qu’un juge de paix peut à un moment dire ‘le loyer est excessif par rapport à la qualité du logement qui a été donné en location’“.

Il s’agit d’un organe inutile, et une perte de temps en plus. Je ne dis pas qu’il n’existe pas des problèmes, il en existe certainement, mais encore une fois on crée une couche en plus dans la lasagne alors que le juge de paix est compétent “, explique-t-il également.

► Versus | Faut-il encadrer les loyers à Bruxelles ? (03/03/2021)

Interview d’Eric Mathay, président de la régionale bruxelloise du syndicat national des propriétaires

Arnaud Bruckner – Photo : Belga (archives)

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08 juillet 2021 - 15h09
Modifié le 08 juillet 2021 - 17h46