Les CPAS demandent un effort de 2,3 milliards d’euros au gouvernement fédéral
Les CPAS du royaume exigent du prochain conseil des ministres spécial de début juillet qu’il arrête une stratégie globale phasée, à 2,3 milliards d’euros, passant par une augmentation de toutes les allocations sociales jusqu’au seuil de pauvreté européen, soit au-delà de 2.000 euros pour une famille avec deux enfants.
“Avec un revenu de 1.180 euros par famille avec 2 enfants, il est impossible de rencontrer les défis qui se posent, par exemple dans une ville comme Bruxelles”, a expliqué Jean Spinette (PS), coprésident de la fédération des CPAS bruxellois. Les CPAS plaident en faveur de l’individualisation des droits sociaux et de la globalisation des revenus afin de ne pas punir la cohabitation qui est parfois le dernier tampon de solidarité familiale contre la pauvreté. Un rapport de la Cour des comptes, réalisé en 2012 à la demande du parlement, avait évalué l’impact budgétaire d’un relèvement a minima des allocations sociales à un montant oscillant entre 1,8 et 2,3 milliards d’euros. Les CPAS estiment qu’un tel budget peut être arrêté de façon phasée. Ils admettent qu’une politique sociale “coûte de l’argent” mais soulignent qu’elle engendre un “bénéfice social”.
Outre le relèvement des allocations, les CPAS du pays demandent au gouvernement de mettre davantage de personnes peu qualifiées au travail et de relever les salaires les plus bas en agissant sur la fiscalité et les cotisations sociales patronales et personnelles. L’objectif est de diminuer la tension, de cesser l’opposition entre certains groupes de la population, par exemple les travailleurs sociaux et les usagers des CPAS.
Enfin, les sections représentatives des trois fédérations des villes et des communes du pays demandent un meilleur soutien des CPAS. Le ministre de l’Intégration sociale Willy Borsus a compensé récemment la prise en charge par les CPAS des exclus du chômage, a reconnu le président de l’association flamande des CPAS Rudy Coddens. Les centres s’en félicitent mais demandent d’aller plus loin car les moyens en provenance du fédéral sont insuffisants. Le mémorandum appelle à une nouvelle hausse de l’indemnité pour les frais de personnel, une prise en charge “intégrale” de chaque augmentation du revenu d’intégration (seule une partie est prise en charge par le fédéral, l’augmentation du nombre de bénéficiaires pesant sur les communes), un système unifié du fonds énergie et un arrêt des répercussions des charges sur les entités locales.
Les trois organisations admettent que le gouvernement fédéral a déjà pris un certain nombre de mesures en soutien de la lutte contre la pauvreté. Mais à l’instar de celles prises par les gouvernements précédents, elles manquent d’ambition, estiment-elles. Le président de la section CPAS de l’union des villes et des communes wallonnes, Luc Vandormael (PS) se demande notamment si la lutte contre la fraude sociale doit constituer une priorité. “Elle constitue un devoir pour les CPAS mais elle n’est pas prioritaire. Une enquête (commandée il y a deux législatures par Maggie De Block lorsqu’elle était secrétaire d’Etat à l’Intégration sociale) a démontré que la fraude sociale atteignait 4% des demandes octroyées. La priorité d’un CPAS est l’aide et l’action sociale. Aujourd’hui, il y a danger. Une idéologie présentant le pauvre comme un profiteur percole de manière inquiétante”, a-t-il estimé.
À politique inchangée, la Belgique n’atteindra pas les objectifs qu’elle s’est assignés: une diminution de 380.000 personnes en situation de pauvreté en moins par rapport à 2010, selon la Stratégie EU2020, et l’extinction de la pauvreté d’ici 2030, selon l’objectif de développement durable de l’ONU. Depuis dix à quinze ans, un cinquième de la population belge (2,3 millions de personnes) fait face à un risque de pauvreté, une réalité qui n’évolue pas. Et de 2004 à 2016, le nombre de bénéficiaires du revenu d’intégration ou d’un revenu équivalent a augmenté de 27%. Or, ce revenu est de 33% inférieur au seuil de pauvreté. (Belga)
- Images de Belga : interview de Luc Vandormael, président de la section CPAS de l’union des villes et communes wallonnes.