L’édito de Fabrice Grosfilley : pouvons nous sortir du pétrole ?

Les Cop se suivent et se ressemblent, et Cop après Cop, le climat se réchauffe toujours plus. Les Cop ce sont” les conférences des parties”, des réunions pilotées par les Nations Unies qui réunissent tous les États  qui ont ratifié la convention sur les changements climatiques. Elles ont théoriquement lieu chaque année en novembre ou décembre. Outre les représentants des gouvernement,  la société civile, les entreprises, les climatologues participent également aux  débats.  C’est lors de la Cop de 2015 qu’ont été signés les accords de Paris. Avant cela, il y avait eu le protocole de Kyoto, lors de la Cop de 2008. Si nous en sommes à la Cop 28, cela veut dire que cela fait une trentaine d’années que les Etats se réunissent pour discuter du climat, penserez-vous. En réalité, c’est même plus vieux que cela. Le mouvement avait été lancé en 1992 lors d’un sommet de la Terre qui se tenait à Rio De Janeiro. Cette année là, une convention sur le climat qui mettait déjà l’accent sur le nécessité de réduire les gaz à effet de serre avait déjà été mise sur la table. La déclaration de Rio comprenait au total 2500 recommandations, et plus d’une centaine de chefs d’état avait participé au sommet.

Nous sommes donc déjà 31 ans après le sommet de Rio. Il y a déjà eu 27 conférences des parties, deux protocole de Kyoto et un accord de Paris. Celui-ci prévoyait de prendre  les mesures nécessaires pour limier le réchauffement à 1,5 degrés. Nous en sommes loin : au rythme actuel à la fin du siècle c’est à dire dans 70 à 80 ans, un temps que  connaitrons nos enfants ou petits enfants, le réchauffement devrait être compris entre 2,5 et 2,9 degrés. Dans un podcast que vous trouverez  sur le site de BX1 ou sur les plateforme de podcast, nous vous avons expliqué que 1,5 degré de réchauffement mondial, signifie une élévation des températures moyennes de 4 degrés en Région bruxelloise, avec des périodes de canicules qui se démultiplieraient  pendant l’été. Si le réchauffement mondial n’est pas de 1,5, mais de 2,5 ou 2,9 degrés, ce n’est pas une élévation de 4 degrés qui nous attend à Bruxelles, mais plutôt 6 ou 7.

Ce matin le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, lance donc un nouvel appel. Il demande à cette Cop 28 d’aboutir à un texte qui parlera explicitement de la sortie des énergies fossiles. Jusqu’à présent les accords sur le climat annoncent des objectifs  : réduction des gaz à effet de serre,  températures à ne pas dépasser… Mais les textes signés par les chefs d’Etat et de gouvernement restent flous sur la manière de les atteindre. Pour Antonio Guterres il faut donc désormais dire clairement qu’on doit sortir des énergies fossiles. A Glasgow en 2021, la communauté internationale s’était déjà engagée à sortir du charbon. Il faudrait désormais qu’elle puisse dire la même chose au sujet du gaz et du pétrole.

Antonio Guterres, très engagé dans le combat climatique,  veut donc aller plus loin qu’ une simple promesse de réduction des énergies fossiles : “une réduction, vague et évasive, dont le véritable sens n’est clair pour personne”, a-t-il insisté. Il est vrai que lors ces grands messes diplomatiques on aboutir plus souvent à des compromis suffisamment ambigus pour que tout le monde s’y retrouve, qu’à des engagements clairs et chiffrés. Peut-on imaginer qu’une Cop organisé à Dubaï, un pays producteur de pétrole,  décide de sortir du pétrole ? Quand on sait que le président de la Cop est un émir qui préside une société pétrolière, et  qu’il a profité de ses contacts diplomatiques préparatoires pour signer des contrats de fourniture avec de nouveaux clients, on peut se permettre d’en douter. Pourtant on ne sait jamais, un sursaut est toujours possible.

“L’objectif de 1,5°C n’est pas mort, il est vivant”, affirme ce matin encore Antonio Guterres. “Nous avons le potentiel, les technologies, les capacités, et l’argent. La seule chose qui manque toujours, c’est la volonté politique.” Nous sommes loin de Dubaï. Chez nous, comme dans l’ensemble de l’Union Européenne,  la transition climatique est en cours. Elle ne va pas sans crispation. Réduire nos factures de chauffage , mieux isoler les maison,  ça va. Se dire que demain nous roulerons tous à l’électrique ou que nous ne roulerons plus, ou que nos entreprises tourneront à l’énergie verte c’est beaucoup moins évident. Les recommandation des scientifiques se heurtent à la réalité, à nos pratiques, à notre désir de confort, à la crainte d’une déclassement économique et d’une vie qui serait demain sans hydrocarbures, beaucoup plus compliquée. Ce qui est vrai pour Dubaï et les émirats, l’est, à une autre échelle, partout dans le monde.