L’édito de Fabrice Grosfilley : inquiétude unanime sur le budget

Dans son édito de ce mercredi 5 juin, Fabrice Grosfilley revient sur le débat au Parlement bruxellois concernant le budget.

La situation budgétaire de la Région bruxelloise n’est peut-être pas désespérée, mais elle est grave. Suffisamment grave pour que le prochain gouvernement soit contraint de prendre des mesures d’assainissement. C’est l’un des enseignements du grand débat que BX1 a organisé hier au Parlement bruxellois. Dix têtes de liste aux élections régionales, six francophones et quatre néerlandophones, ont été amenées pendant deux heures à croiser leur point de vue. Pas un débat pour faire le buzz, les amateurs de clashs ou de petites phrases assassines seront probablement restés sur leur faim. Mais un débat sérieux où chacun a pu, thème par thème, développer son point de vue et donner quelques éléments clés de son programme pour Bruxelles.

Que retenir de ces deux heures d’échange ? D’abord, effectivement, une inquiétude réelle sur l’état des finances. Nous avons demandé aux dix candidats de donner une note sur 5 représentant leur inquiétude par rapport au budget régional : 0 signifie “je ne suis pas inquiet, il n’y a aucune mesure à prendre” et 5 signifie “je suis très inquiet, il faut prendre des mesures d’urgence, et cela peut impliquer d’aller jusqu’à la réduction du nombre de fonctionnaires”. Les notes sont allées de 3 à 5, avec une majorité de 4 et une moyenne globale de 4,2. On peut donc dire que notre classe politique est réellement inquiète. Avec un endettement qui approche désormais les 13 milliards et qui a triplé en quelques années, comme l’a souligné Christophe De Beukelaere dans l’opposition. Avec des communes qui ne se portent pas bien et auxquelles la Région doit régulièrement prêter main forte, a souligné Bernard Clerfayt dans la majorité. Avec une région structurellement sous-financée et que l’État fédéral devrait aider davantage, ont reconnu quasiment tous les partis. Au niveau des pistes d’économies, de très nombreux partis ont évoqué hier une simplification des structures de la Région bruxelloise, donc des administrations que l’on regrouperait, des doublons que l’on supprimerait. Personne n’a été beaucoup plus loin, personne n’a envisagé d’augmenter les impôts non plus.

Autre enseignement de ce débat : une réelle différence de perception de ce que doit être la Région entre francophones et néerlandophones. Pour faire simple, une dimension régionaliste affirmée chez les néerlandophones, une plus grande place réservée aux communes pour les francophones. Les partis flamands sont ainsi tous en faveur de la fusion des zones de police et plaident tous aussi pour qu’on transfère certaines compétences qui sont aujourd’hui dévolues aux communes vers la Région. La plupart des francophones s’opposent à la fusion des zones de police et souhaitent aussi conserver l’autonomie communale. Ce n’est pas un détail, cette différence de point de vue, quand on sait que les compétences dont on parle ici peuvent être la mobilité ou l’urbanisme, par exemple. Celle qui va le plus loin côté néerlandophone dans ce débat, c’est la N-VA. Cieltje Van Achter a confirmé hier soir qu’elle souhaitait la disparition des 19 communes, qui seraient remplacées par des districts. Sur la fusion des zones de police, on pourra noter cette proposition de Sven Gatz pour l’Open VLD qui préconise d’aller dans un premier temps vers une mutualisation des services de soutien, les services administratifs par exemple, qui seraient confiés à Safe Bruxelles.

Tout le monde, francophone comme néerlandophone, s’est aussi prononcé pour une simplification des institutions bruxelloises. La COCOF, Commission communautaire française, la VGC (son équivalent néerlandophone), la COCOM, qui ont chacun un gouvernement distinct, comme l’ont imposé les réformes de l’État, c’est peu lisible. Il faut essayer de rapprocher ces institutions, et tout mettre sous la coupole  du seul gouvernement bruxellois, ont défendu plusieurs interlocuteurs.

Enfin, un mot des alliances et des préférences. On a pu noter que Groen et Ecolo paraissaient très alignés hier, Elke Van den Brandt faisant ouvertement campagne pour que Zakia Khattabi soit ministre-présidente. Et puis surtout qu’aucun parti n’envisageait de gouverner avec le Vlaams Belang. Vous savez qu’on soupçonne parfois la N-VA d’être ambiguë sur cette question. Ces dernières semaines, Bart De Wever a exclu de faire alliance avec l’extrême droite. Position reprise très clairement par la cheffe de file du parti en Région bruxelloise, Cieltje Van Achter, qui a indiqué qu’elle ne s’associerait ni à l’extrême gauche, ni à l’extrême droite. Le risque d’une alliance entre les nationalistes de la N-VA et le VB, qui auraient pu ensemble tenter de paralyser les institutions bruxelloises, semble donc à ce stade clairement écarté.

Fabrice Grosfilley