Kazakhgate : le rapport de la commission d’enquête voté en séance plénière ce jeudi

La Chambre a débattu mercredi en séance plénière des conclusions de la commission d’enquête qui a examiné les circonstances qui ont conduit à l’adoption et à l’application de la loi du 14 avril 2011 sur la transaction pénale élargie, un mécanisme permettant l’extinction de poursuites judiciaires contre une somme d’argent, y compris en cours de procédure, pour des délits et même des crimes correctionnalisables.

“Claude Guéant a très clairement dit qu’il y avait une cellule à l’Elysée qui était chargé de cette mission et Armand De Decker a été contacté à cette fin. Donc, les choses sont claires”, insiste le député Olivier Maingain (Défi). “Il a reçu 750.000 € pour faire en sorte qu’un dossier pénal tombe dans l’oubli”, indique la députée Karine Lalieux (PS). Du côté du MR, on reconnaît qu’Armand De Decker, qui est toujours actuellement député bruxellois, a commis des fautes. “Il a utilisé ses fonctions parlementaires pour aboutir à des résultats positifs, en l’occurrence permettre la transaction pénale et c’est une forme d’influence qui n’était pas correcte”, explique le chef de groupe MR au Parlement David Clarinval.

Alors que le ministre des affaires étrangères Didier Reynders (MR) a été cité en commission, aucune charge formelle n’a été retenue contre lui. Au grand dam de l’opposition, qui accuse la majorité de se protéger. “C’est difficile de poser des questions sur des responsables politiques contemporains, et puis, une commission parlementaire n’a pas tous les moyens. Monsieur De Decker n’a pas accepté de répondre à nos questions”, souligne le député Georges Gilkinet (Ecolo). “Ce que je retiens aussi, c’est que le MR a tout fait pour protéger Armand De Decker, qui est d’ailleurs toujours sénateur MR”, complète Karine Lalieux.

Une affaire d’Etat en lien avec une vente d’hélicoptères entre la France et le Kazakhstan

Au cœur des travaux figuraient un certain nombre d’interrogations sur une possible intervention partisane extérieure ayant influencé les processus législatif et judiciaire dans l’affaire du “Kazakhgate”. Ces interrogations étaient nées de révélations de la presse, d’informations tirées d’enquêtes en cours en France et en Belgique. En 2011, à l’époque du président Nicolas Sarkozy, alors que se négociait un important contrat militaire portant notamment sur la vente d’hélicoptères, l’Elysée s’était montré soucieux de rencontrer les doléances kazakhes de voir trois milliardaires proches du président Nazarbaïev, Patokh Chodiev, Alijan Ibragimov et Alexander Machkevitch, tirés du marasme judiciaire dans lequel ils étaient empêtrés en Belgique dans l’affaire Tractebel. Une équipe a été mise en place par l’avocate française Catherine Degoul. Le sénateur et ancien président de la Haute assemblée Armand De Decker l’a rejointe. L’Elysée a obtenu satisfaction en 2011.

La loi de transaction pénale élargie a été votée en Belgique et appliquée au trio. Lors des travaux de la commission d’enquête, les déclarations de l’ex-secrétaire général de l’Elysée Claude Guéant furent les plus spectaculaires parmi celles entendues de la bouche des 170 témoins auditionnés. “Ils ont effectivement fait un beau travail, puisqu’ils ont obtenu, moyennant la transaction, l’arrêt des poursuites qui étaient engagées depuis déjà dix ou douze ans dans une affaire dite ‘Tractebel’, je crois. Cela arrangeait la France, c’est vrai”, a-t-il admis. Avant de préciser: “Pourquoi? Parce que le président du Kazakhstan, M. Nazarbaïev, avait fait savoir qu’il lui serait agréable que les poursuites contre M. Chodiev soient interrompues, soient arrêtées, que cela ne pourrait que faciliter les relations commerciales que nous pouvions avoir avec ce pays”