Greenpeace escalade le siège du Conseil européen pour contester l’accord UE-Mercosur

Des militants de Greenpeace se sont rassemblés jeudi matin à Bruxelles pour protester contre le projet d’accord commercial entre l’Union européenne (UE) et quatre pays sud-américains du Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay et Uruguay).

Sept militants de Greenpeace ont escaladé le siège du Conseil européen, rue de la Loi, avant de suspendre une banderole sur la façade du bâtiment sur laquelle on pouvait lire “Stop EU-Mercosur”.

Un camion agricole a ensuite pulvérisé des nuages d’eau simulant l’épandage de pesticides devant le bâtiment, en protestation du risque d’augmentation des exportations européennes de pesticides en Amérique du Sud.

 

Le projet d’accord de libre-échange, en travaux depuis une vingtaine d’années et finalisé en 2019, prévoit entre autres une forte réduction des droits de douane sur plusieurs catégories de marchandise, notamment certaines denrées alimentaires, mais aussi certains produits chimiques interdits dans l’UE.

Pour l’ONG, le texte entre en conflit avec le Green Deal européen, malgré un volet environnemental qui, en théorie, permettrait aux partenaires d’aborder les questions de changement climatique et de développement durable dans leurs échanges. Greenpeace pointe particulièrement du doigt les différents standards sanitaires entre les partenaires, notamment concernant les pesticides européens, pour certains interdits dans l’UE mais légaux en Amérique du Sud. “Ces pesticides provoquent des dégâts sanitaires et sociaux dans les pays dans lesquels ils sont exportés, notamment les pays du Sud global“, déplore Albane Aubry, chargée de campagne à Greenpeace Belgique. “Et ils se retrouvent in fine dans nos assiettes.

L’accord risque également d’inonder le marché belge de produits à bas prix, selon l’ONG. “L’accord aura des impacts sur les agriculteurs en Belgique, notamment par l’importation de bœuf bon marché qui va rentrer en compétition avec les produits locaux“, alerte la chargée de campagne. “Ça va discriminer négativement les agriculteurs et agricultrices de Belgique, mais également celles et ceux du Mercosur.”

Un accord déjà critiqué en 2021

Dans une évaluation d’impact parue en 2021, le SPF Économie reconnaissait déjà le potentiel effet négatif d’une augmentation de produits sud-américains aux prix plus compétitifs sur le marché belge. “Pour les producteurs agricoles de viande bovine, de betteraves et de viande de volaille, cette perspective de nouvelle pression sur les prix constitue une menace potentielle“, y expliquait le service fédéral, en émettant toutefois des réserves. “L’effectivité de cette menace doit être relativisée et dépendra des stratégies des différents opérateurs au sein des filières.”

À Greenpeace Belgique, pareil optimisme n’est pas à l’ordre du jour. “Ça va venir augmenter la mainmise des grosses multinationales sur le système alimentaire“, s’inquiète Albane Aubry. “Autant les agriculteurs et les agricultrices que les consommateurs et consommatrices seraient affectés négativement par cet accord.

L’accord UE-Mercosur avait déjà été critiqué en 2021. Plusieurs ONG avaient alors reproché à la Commission européenne de ne pas avoir publié son étude concernant l’impact sur le développement durable de l’accord avant de conclure les négociations commerciales avec le Mercosur. Une enquête de la médiatrice européenne Emily O’Reilly leur avait donné raison : “La conclusion d’un accord commercial avant l’évaluation complète de son impact potentiel risque de saper [les valeurs de l’UE] et la capacité du public à débattre des avantages de l’accord“, avait-elle déclaré. “Cela risque également d’affaiblir la capacité des parlements européen et nationaux à débattre de manière exhaustive de l’accord commercial.”

Si les négociations entre partenaires aboutissent, le processus de ratification de l’accord pourrait débuter au second semestre 2023, pour un début de mise en application en 2024.

Belga – Photo : Greenpeace